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1317. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Ainsi les deux Frances, au-delà et en deçà de la Loire, la France du Midi et celle du Nord ; l’Angleterre, placée si près de nous, et sur laquelle a passé la conquête française, représentée par les Normands ; l’Espagne, dont les provinces limitrophes ont longtemps parlé la même langue que notre Midi ; enfin l’Italie, voilà tout ce qui nous occupera. […] Il a rencontré en purgatoire un de ces poëtes, l’élégant Sordello ; et il en a mis un autre en enfer, le belliqueux Bertrand de Born, qu’il représente comme un cadavre sanglant et tronqué, marchant sa tête à la main. […] Ces chartes, ces contrats, dont je vous ai parlé, renferment sans cesse des applications de ille, illa, illud, qui représentent nos articles. […] Ils étaient reçus plusieurs jours dans les palais et dans les châteaux ; ils racontaient des romans de chevalerie, représentaient des fabliaux, et quelquefois parodiaient les cérémonies les plus saintes de la religion. […] Ainsi dans ces temps que l’histoire représente comme grossiers et crédules, déjà régnait une liberté d’esprit en contradiction souvent avec les actes, et qui n’empêchait pas le mal, mais le blâmait Cette disposition même était plus générale qu’on ne le croit.

1318. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

L’un met le gouvernement dans l’équilibre de différents pouvoirs dont aucun n’est issu directement du peuple ; l’autre le fait dériver de la Loi elle-même, de la Charte ou Constitution, pouvoir impersonnel sur lequel aucune personne ou collection de personnes n’aura de prise ; l’autre le fait dériver de la Raison et le met dans les « classes moyennes » tenues pour représenter plus que d’autres la raison générale de la nation. […] Mais le représentant est précisément un homme qui représente celui qui ne peut donner de mandat. « Tous les jours dans les tribunaux, l’enfant, le fou et l’absent sont représentés par des hommes qui ne tiennent leur mandat que de la loi : or le peuple réunit éminemment ces trois qualités ; car il est toujours enfant, toujours fou et toujours absent. » Ah ! […] Plus elle sera ancienne, plus elle représentera la vie indéfinie du pays. […] Figurez-vous un patricien romain du Ve siècle qui n’a rien compris à Jésus, mais que les circonstances ont fait chrétien, sans changer le fond de sa nature ni le tour de ses idées, qui apprend que l’empire est détruit, qu’il n’y a plus dans le monde que des souverainetés partielles et locales, qui, dans le trouble où le jette un tel désordre, s’écrie : « Il reste l’évêque de Rome pour représenter et pour refaire l’unité du monde ! 

1319. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

De là le reproche qui nous est fréquemment fait de n’avoir pas découvert ou signalé tel homme déclaré de génie, et qui le plus souvent ne représente qu’un accident littéraire. […] Remarquez d’abord que ce mot, qui vous choque et qui ne représente qu’un acte naturel, n’est écrit qu’une seule fois dans le livre. […] L’antiquité égyptienne, l’antiquité romaine avaient des autels pour les divinités qui représentaient ce que vous appelez une incongruité, et, outre les ouvrages spéciaux, il existe en France cinquante sociétés diplômées de francs-p… ! […]   Si j’ai rapporté ce lambeau de conversation, c’est que j’ai cru intéressant de montrer un croquis de lui-même par ce charmant écrivain qu’on a représenté de si diverses façons. […] Comme toujours, chez l’ancienne ambassadrice, le monde diplomatique est avantageusement représenté, mais l’Institut prime tout, et la place même des convives précise l’intention du dîner.

1320. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

Non, aucun langage ne représenterait la tendresse qui animait ses yeux et son maintien ; je ne ferais rien que de gauche et de lourd. […] Je courus chez les Gerock, et demandai un crayon et du papier, et je dessinai, à ma grande joie, le tableau entier aussi chaud qu’il se représentait dans mon âme ; tous partagèrent ma joie sur ce que j’avais fait, et leur approbation me rassura.

1321. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance. »

Sismondi, tout d’abord, et comme par précaution, le lui avait rendu quand il disait, — avant de le connaître personnellement, il est vrai, et sur la simple annonce de l’Histoire de France que Chateaubriand se proposait d’écrire : « J’ai une grande admiration pour son talent, mais il me semble qu’il n’en est aucun moins propre à écrire l’histoire : il a de l’érudition, il est vrai, mais sans critique, et je dirais presque sans bonne foi ; il n’a ni méthode dans l’esprit, ni justesse dans la pensée, ni simplicité dans le style : son Histoire de France sera le plus bizarre roman du monde ; ce sera une multiplicité d’images qui éblouiront les yeux ; la richesse du coloris fait souvent papilloter les objets, et je me représente son style appliqué aux choses sincères comme le clavecin du Père Castel, qui faisait paraître des couleurs au lieu de sons. » Sismondi ne voyait et ne prédisait là que les défauts. […] Comme vous, je suis persuadé que c’est un enseignement tout nouveau qui serait nécessaire pour satisfaire les âmes pieuses ; comme vous, je ne vois commencer nulle part cet enseignement : bien au contraire, je vois reproduire la religion par ses abus, par son côté haïssable. » Sismondi représente à Channing qui, de loin, paraît avoir jugé trop indulgemment les choses, comment en Amérique, pays neuf, on n’a pas eu à supporter le vieil échafaudage religieux avec tout ce qui en était l’accompagnement et la conséquence, cette institution toute-puissante et intolérante qu’il a fallu, avant tout, renverser au XVIIIe siècle : ce fut une lutte et une crise par où il était nécessaire de passer.

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