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732. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Goethe et de Bettina, traduites de l’allemand par Sébastien Albin. (2 vol. in-8º — 1843.) » pp. 330-352

Elle lui rendait surtout, et utilement pour son talent d’artiste, les impressions et la fraîcheur du passé qu’il avait perdues dans sa vie un peu factice : « Mes souvenirs de jeunesse connaissent tout ce que tu me dis, lui écrivait-il ; cela me fait l’effet du lointain qu’on se rappelle tout à coup distinctement, quoiqu’on l’ait pendant longtemps oublié. » Il ne se prodigue pas pour elle, mais jamais il ne la rebute ; il lui donne la réplique tout juste assez pour qu’elle ne se décourage pas et qu’elle continue. […] Nous avons besoin de nous rappeler que nous sommes en Allemagne pour nous rassurer. […] Quand il voyait quelqu’un malade, triste et préoccupé, il rappelait de quelle manière il avait écrit Werther pour se défaire d’une importune idée de suicide : « Faites comme moi, ajoutait-il, mettez au monde cet enfant qui vous tourmente, et il ne vous fera plus mal aux entrailles. » Sa mère savait également la recette ; elle écrivait un jour à Bettina, qui avait perdu par un suicide une jeune amie, la chanoinesse Gunderode, et qui en était devenue toute mélancolique : Mon fils a dit : Il faut user par le travail ce qui nous oppresse.

733. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

Je me rappelle, à cette époque, une correspondance qui eut lieu entre lui et M.  […] Le poète, à la lecture du premier article de Carrel sur les représentations d’Hernani, lui avait écrit une lettre explicative, et dans laquelle il lui rappelait les singulières prétentions des soi-disant classiques du jour ; Carrel y répondit par une lettre non moins développée qui commençait en ces termes : « Je suis pour les classiques, il est vrai, monsieur, mais les classiques que je me fais honneur de reconnaître pour tels sont morts depuis longtemps. » Dans la critique de l’Othello de M. de Vigny, il se faisait fort de prouver « que toute la langue qu’il faut pour traduire Shakespeare est dans Corneille, Racine et Molière ». […] Et restituant à la révolution de Juillet son sens général et unanime, la montrant indépendante des menées souterraines du carbonarisme, régulière, pour ainsi dire, et légale, et avouable en plein soleil, il ajoutait ces mémorables paroles, où un vrai patriotisme respire : Cette victoire est celle de la nation entière, et la nation qui n’a jamais conspiré, la nation qui croit ne s’être pas insurgée, mais avoir réprimé et puni l’insurrection du pouvoir, la nation, disons-nous, s’étonnerait et s’alarmerait de manifestations qui ne lui rappellent point des efforts et une gloire à elle, mais des dévouements particuliers à des affiliations politiques, et qui ne peuvent être appréciés à toute leur valeur que par ceux qui les ont vus de très près.

734. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Ces débuts rappellent ceux du bon Amyot. […] En les écrivant, Rollin, qui aimait à marcher et à penser toujours sur la trace d’un ancien, se rappelait certainement cette parole de Pline le Jeune sur la maison de campagne que voulait acheter Suétone : Il ne faut à ces messieurs les savants, absorbés comme lui dans l’étude, que le terrain nécessaire pour délasser leur esprit et réjouir leurs yeux. […] Il n’enfante que des désirs mourants et des projets sans consistance… Ses goûts et ses pensées, par un contraste affligeant, appartiennent à la fois à tous les âges, mais sans rappeler le charme de la jeunesse, ni la gravité de l’âge mûr.

735. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Quand on se rappelle que cette qualité est si rare en Allemagne, qu’il ne la partage qu’avec Lessing, que Goethe lui-même gâte ses romans par d’interminables suites, que le second Meister fait regretter la vérité sereine et profonde du premier, que Jean Paul est illisible, et Immermann incohérent, Hoffmann diffus et lâche, on aperçoit combien est rare et d’emprunt le mérite que s’est acquis Heine par la juste mesure de ses écrits. […] Telle page des Reisebilder peut être comparée exactement à une page des nouvelles de Musset (car la prose allemande reste, malgré tous les maniements, poétique et un peu chantante) ; tel des Fragments anglais rappelle de près la passage délicieux où Théophile Gautier commente le Comme il vous plaira de Shakespeare. […] Je me rappelais la nuit que je passai à veiller près de son lit — le lit sur lequel gisait son pâle et beau corps, aux lèvres silencieuses et pâles… — Et quel regard singulier me jeta la vieille femme chargée de garder le cadavre, quand elle m’abandonna ce soin pour quelques heures !

736. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre I. La critique » pp. 45-80

Gilbert de Voisins rappellent les Prétextes d’André Gide. […] Rappelons encore les travaux de M. de Gourmont et les noms de MM.  […] Et pour les nouveaux auteurs comme pour les plus grands ne faut-il pas toujours rappeler ce passage de Quintilien (Inst.

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