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288. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Certes, je suis loin de méconnaître les progrès que l’art musical a faits depuis les couvents, j’ai admiré plus que tout autre le Requiem de Mozart et les messes de Cherubini, et, pour qui se tient au point de vue de l’art pur, nul doute que les vastes proportions, la richesse d’harmonie, les grands effets d’instrumentation des compositions modernes n’offusquent singulièrement la simplicité, la nudité du chant grégorien ; sous ce rapport, il n’y a pas de comparaison à établir : mais voulez-vous sentir où gît la supériorité réelle du simple chant d’église ? […] Un bien-être de plus, un mieux-être que la science, la civilisation, une bonne police, un gouvernement attentif et philanthropique, procurent au grand nombre des gens de travail et aux particuliers, est une liberté de plus, et qui, pour ne pas être écrite sur une Charte ou sur un papier, n’en est pas moins pratique, positive et de réelle jouissance. […] Ils aimeraient mieux ne faire qu’une seule étape en progrès réel que d’en faire deux d’une seule enjambée, si c’était contre leur principe.

289. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Il y a certes là un progrès de civilisation, un progrès réel, quoique bien lentement acquis. […] « L’histoire, me disait mon ami, qui n’est pas inconséquent et qui tient fort de Hume et de Fontenelle, n’est le plus souvent, et surtout à cette distance, qu’une fable convenue, un quiproquo arrangé après coup et accepté, une superfétation réelle portant sur une base creuse et fausse. […] L’indifférence religieuse, malgré les réveils apparents ou en partie réels que j’ai signalés, est grande et au-delà de ce qu’elle a jamais été ; l’anarchie, en cet ordre d’idées, est croissante et s’étend chaque jour.

290. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre IV »

D’un côté, un fait réel, dûment constatable ; de l’autre, hypothèse pure. »81 À ces objections, M.  […] Peut-être a-t-il, quant à l’essence réelle de son esprit, pleinement raison, et reste-t-il le plus souvent, même au milieu de son laboratoire littéraire, un véritable poète épique 83. […] Il a eu beau emprunter à ce qu’il a vu ou à ce qu’il a lu bien des traits exacts en eux-mêmes, ces traits rapprochés les uns des autres ne font pas un tout réel ; sans doute, chacun d’eux peut être observé isolément dans la réalité, mais leur réunion est disparate et choquante.

291. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

Arvède Barine931, par une création synthétique que dirige un remarquable sens psychologique, rend de pâles figures historiques aussi vivantes, aussi réelles que des personnages de roman. […] Fustel de Coulanges est un philosophe, ou plutôt un homme de science : ce qu’il poursuit, c’est la réduction du réel à des lois ; tous ses travaux sont des généralisations. […] Trois de ces Mémoires me paraissent se distinguer dans la foule : ceux de Mme de Rémusat943, qui a pour ainsi dire donné le branle, une femme intelligente, curieuse, un peu commère ; ceux de Marbot944, un soldat, très brave et pas du tout paladin, qui nous donne la note très juste et très réelle de l’héroïsme militaire du temps, mélange curieux de naturelle énergie, d’amour-propre excité et d’ambition d’avancer ; ceux enfin de Pasquier945, un honnête homme sans raideur, excellent serviteur de tous les régimes pour des motifs légitimes, fidèle à ses maîtres sans servilité, à sa fortune sans cynisme, et très clairvoyant spectateur de toute l’intrigue politique ou policière qui se machinait derrière le majestueux tapage des batailles946.

292. (1890) L’avenir de la science « XVI »

XVI Ai-je bien fait comprendre la possibilité d’une philosophie scientifique, d’une philosophie qui ne serait plus une vaine et creuse spéculation, ne portant sur aucun objet réel, d’une science qui ne serait plus sèche, aride, exclusive, mais qui, en devenant complète, deviendrait religieuse et poétique ? […] Les écrits de la jeune école sont nets, cassants, réels, matérialistes. […] Voilà ce qui a succédé au développement littéraire le plus idéaliste que présente l’histoire de l’esprit humain, et cela non par une déduction logique ou une conséquence nécessaire, mais par contradiction réfléchie et en vertu de cette vue prédécidée : la grande école a été idéaliste ; nous allons réagir vers le réel.

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