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857. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Quand l’idée n’est pas ce voyage du Poète à sa propre recherche, c’est, mieux encore, la contemplation immobile et unique du Poète par lui-même. […] La notion dans la poésie classique à une valeur propre et le vers apporte des idées, des lumières, des raisons et une raison, en général sur le cœur humain. […] Et ce culte elle ne le rend — c’est sa pierre de touche — qu’à ceux qui prouvèrent leur œuvre par leur vie, qui de leur propre foi donnent une raison à la foi d’autrui. […] Dans le fait que Beckford, pour son Vathek, a employé une autre langue que la sienne, il reconnaît, croirait-on, une sympathie secrète à sa propre manière, à lui qui alla se chercher et s’inventer une syntaxe non à vrai dire étrangère, mais propre. […] mais sur une langue étrangère, propre à l’amphithéâtre, l’anglais.

858. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME GUIZOT (NEE PAULINE DE MEULAN) » pp. 214-248

Elle lut davantage ; elle lisait lentement ; son esprit fécond et réfléchi, dès les premières pages d’un livre, allait volontiers à ses propres pensées suscitées en foule par celles de l’auteur. Elle savait l’anglais et s’y fortifia ; cette langue nette, sensée, énergique, lui devint familière comme la sienne propre. […] Un endroit des Contradictions montre bien à quel point la pensée de Mlle de Meulan allait d’elle seule et se formait en toutes choses ses propres jugements. […] On ne conquiert, on n’occupe si intimement un esprit de la force de Mlle de Meulan, qu’en modifiant le sien propre et en l’assouplissant sur bien des points. […] Pour bien juger un tel livre, surtout d’utilité et d’application, il faudrait avoir autorité, expérience, et s’être formé ses propres idées sur le sujet. « Le moment des réformes politiques est celui des plans d’éducation, » a dit une femme spirituelle et généreuse, Mme de Rémusat, qui elle-même a payé sa dette utile avec charme.

859. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

Les hommes à puissante imagination, tels que le Tasse, sont au nombre de ces victimes de leur propre supériorité. […] J’ai la certitude que le duc a donné ses ordres en conséquence. » VII Soit par la félonie de ses amis devenus ses assassins, soit par sa propre indiscrétion à lire ou à réciter ses vers en public, le Tasse apprit, peu de temps après, qu’on imprimait, à son insu, la Jérusalem délivrée dans plusieurs villes d’Italie à la fois. […] La gloire de son nom, accrue par la cupidité des éditeurs de la Jérusalem, était cependant déjà tellement sans rivale dans toute l’Italie, qu’un propre neveu du grand Arioste lui écrivait à Modène pour lui décerner la couronne et la suprématie sur son oncle même. […] Le Tasse, comme on l’a vu, n’avait d’autre prison à cette époque que ses propres appartements dans le palais de Ferrare, ou dans la villa de Bello Sguardo, sous la surveillance de deux serviteurs de la cour. […] Alphonse répondit de sa propre main au cardinal Albano une lettre que nous possédons, et qui prouve assez que le séquestre mis sur les papiers et sur les poésies du Tasse à Ferrare, n’avait d’autre objet que d’en prévenir la destruction par les mains d’un insensé, dans un de ses accès de mélancolie.

860. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

Et c’est ce qui le rendra propre à représenter dans le siècle l’esprit de toute la religion, c’est ce qui en fera l’adversaire par excellence et la barrière du libertinage intellectuel et moral. […] Il fallut des freins intérieurs pour retenir l’âme avec son propre consentement et l’empêcher de glisser dans l’impiété scandaleuse. […] On l’a repris aussi d’avoir confondu casuistes et jésuistes, comme si tous les ordres religieux n’avaient pas leurs casuistes : le fait est vrai ; mais il est vrai aussi que les autres ordres sont perdus au sein de l’Église ; les jésuites existent à part, forment un parti, ayant unité de vues et d’ambition, et la casuistique leur a été plus propre qu’à personne ; ils ne l’ont ni créée les premiers, ni seuls employée ; mais elle n’a été qu’un accident ailleurs, elle a été chez eux une méthode de domination. […] Pour les règles, l’auteur n’en reçoit que de son sujet : et dans le mépris de la rhétorique il trouve le plus juste emploi et le maximum de puissance de tous les moyens de la rhétorique, qui, chez lui, sont reçus de la nature des choses, qui partout sont les formes propres et nécessaires, partout aussi les formes simples et naturelles. […] Ce don de profondeur, qui est l’originalité propre de l’esprit de Pascal, apparaît à chaque page dans les Pensées, surtout dans celles qui se rapportent aux deux premières parties du plan précédemment expliqué.

861. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre III. Les immoralités de la morale » pp. 81-134

En de pareils cas l’instinct social s’est réellement retourné contre lui-même et sa propre influence tend à le détruire. […] Pour nous faire imiter nos contemporains, l’âme sociale peut nous abandonner à nos propres goûts. […] Chaque homme même se persuade vite que la patrie est en danger quand ses propres intérêts sont lésés. […] Il lui présente le devoir comme conforme à son propre intérêt, et comme la seule activité digne d’une volonté libre. […] Il faudrait même que chaque individu se fît, d’après des principes généraux, sa propre morale.

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