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1345. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Jadis le désordre et l’élan intérieur produisaient et excusaient les concetti et les écarts ; désormais on les fit à froid, par calcul et sans excuse. […] C’est qu’en effet il est le roi du goût et l’arbitre des lettres ; il juge les nouveautés, la dernière tragédie de Racine, une lourde épopée de Blackmore, les premières odes de Swift, un peu vaniteux, louant ses propres écrits jusqu’à dire « qu’on n’a jamais composé et qu’on ne composera jamais une plus belle ode » que sa pièce sur la fête d’Alexandre, mais communicatif, aimant ce renouvellement d’idées que la discussion ne manque jamais de produire, capable de souffrir la contradiction et de donner raison à son adversaire. […] Pour produire, il faut inventer une conception personnelle et conséquente ; il ne faut pas mêler deux conceptions étrangères et opposées : Dryden n’a pas fait ce qu’il fallait, et a fait ce qu’il ne fallait pas. […] V Arrêtons-nous pourtant un instant encore, et cherchons si, parmi tant de rameaux avortés et tordus, la vieille souche théâtrale, livrée par hasard à elle-même, ne produira pas sur un point quelque jet vivant et sain. […] Car le goût est un système instinctif, et nous mène par des maximes intérieures que nous ignorons ; l’esprit, guidé par lui, sent des liaisons, fuit des dissonances, jouit ou souffre, choisit ou rejette, d’après des conceptions générales qui le maîtrisent et qu’il ne voit pas ; elles ôtées, on voit disparaître le tact qu’elles produisent, et l’écrivain commet des maladresses, parce que la philosophie lui a manqué.

1346. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Celle que produit le portrait un peu métaphysique de madame de Staël est une impression d’antipathie. […] Il avait encore de clairs réveils : où serait la joie si l’enfance et le matin n’en produisaient pas ? […] Elle était grande et puissante, si l’on en juge par les effets qu’elle produisait, dit-on. […] L’esprit ne sort jamais de lui-même : ce qu’il croit sentir au dehors de lui, c’est en lui qu’il le sent, c’est lui-même qui le produit. […] La science, dit-il, produit le désir, qui produit l’action, qui produit la souffrance.

1347. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

En 1800 il put, par tolérance, rentier en France Fontanes l’encouragea et le produisit. […] C’était un dilettante fécond, qui jouissait de toutes choses, et qui produisait toutes choses pour en jouir, se promenant à travers créations, comme les autres à travers les œuvres d’autrui. […] Il cessa dès lors, non de produire, mais de publier. […] La Fontaine lit, Lamartine écoute le vent, Hugo regarde ; puis ils laissent ce qu’ils ont recueilli en eux se transformer au creuset de leur âme, et ils produisent. — On dirait que Vigny ferme les yeux et les oreilles. […] Il en résulte qu’un des plus vigoureux penseurs parmi les poètes a peu produit.

1348. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Il a peu produit. […] Dès qu’elle s’est appliquée à élaborer un langage, elle a produit comme son fruit naturel la périphrase. […] Le moyen âge au contraire produit des œuvres nettement symbolistes, telles que le Roman de la Rose et la Vita Nuova. […] Et voilà la Muse qui produira beaucoup d’enfants et qui de tous points se place à l’opposé du Narcisse mallarméen et symboliste. […] Paphos s’impose, comme une hallucination niée par l’esprit en même temps qu’elle se produit aux sens.

1349. (1930) Le roman français pp. 1-197

Mais c’est aussi, sans doute, que Balzac avait deviné ce que produirait cette société de la Restauration. […] Il a fallu à la littérature allemande tout ce temps-là jour produire des œuvres « anti-guerre ». […] Mais le commerçant — ou l’éditeur — n’est pas une bête : il ne se livre à cette publicité que s’il constate que le produit « prend déjà », qu’il s’en manifeste un besoin ou un goût. […] Il est tout entier, en effet, le produit de sa mémoire, mais il est impossible de savoir si ses souvenirs sont volontaires ou involontaires, tant il semble toujours tout se rappeler. […] Suzanne et le Pacifique est un excellent exemple de l’intérêt, de l’amusement, peut-être aussi, pour certains, de l’agacement que peuvent produire cette manière.

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