Les moins profonds sentent vaguement qu’il y a là quelque chose d’indestructible ; mais leur premier mouvement est de se révolter, de prendre fait et cause pour la nature humaine, comme s’ils étaient les représentants de ses droits ou les types de sa pureté. […] Mais les Pensées comme les Maximes vivent par le fond ; et c’est faute de vue ou d’impartialité qu’on prend pour des figures peintes des corps pleins d’embonpoint et de vie. […] Ne prend-on pas la fidélité à la grammaire, une certaine élégance, une propriété superficielle, pour le bien écrire ? […] Tenez pour vraie toute chose qui prend ainsi possession de vous, qui fait corps avec vous ; tenez pour mal écrit tout ce que vous oubliez. […] La Rochefoucauld le prend sur le fait, alors que, par le relâchement de tous les liens sociaux, il s’échappe, laissant voir à nu toute cette corruption que refoule et contient l’excellence des polices humaines.
C’est un récit écrit d’après une confidence, et destiné à celle même qui a raconté, qui sourit en se revoyant si justement, si légèrement peinte, et qui, avec une douce malice, prend à quelques endroits la plume pour y retoucher. […] Au lieu de voir la vérité et de s’adoucir par là, il a pris cette occasion de vous faire du mal auprès du roi, et de tâcher à m’y rendre de mauvais offices. […] C’est trois jours après cette lettre écrite, que le 29 juin, sur le soir, vers cinq heures, Madame étant à Saint-Cloud, demanda un verre d’eau de chicorée à la glace ; elle le prit, et neuf ou dix heures après, à deux heures et demie du matin, le 30, elle expira dans toutes les douleurs de la plus violente colique. […] En cette soudaine atteinte où la mort la prit comme à la gorge, elle garda sa présence d’esprit, pensa aux choses essentielles, à Dieu, à son âme, à Monsieur, au roi, aux siens, à ses amis, adressa à tous des paroles simples, vraies, d’une mesure charmante et, s’il se peut dire, d’une décence suprême. […] Elle était à l’extrémité, elle venait de prendre le dernier breuvage quand il arriva.
Babou n’a pas appuyé beaucoup sur ce caractère, mais ses traits sont si justes et si pénétrants à la fois que nous avons eu quelque chose d’aussi réel qu’un portrait pris sur le vif d’un homme, et qui sait ? […] Les deux compartiments devaient communiquer sans doute, il en prenait gaîment son parti et il en riait. […] Ou bien, dans sa pensée intime, car nous prenons souvent nos prétentions pour notre conscience, le spirituel et amusant satirique se croit-il naïvement des quarts d’heure de justicier et d’oubli de malice dans la justice ? […] Elle est chaude, savoureuse, embaumée, et se prend comme une tasse de café. […] Quand il ne se donnera point pour ce qu’il n’est pas, on sera toujours heureux de le prendre pour ce qu’il est.
Ce fut Royer-Collard qui, je crois, prit sur lui la responsabilité de cette comparaison, mais le Journal des Débats la répéta et la délaya dans une foule d’articles. […] Le hasard lui avait donné jusqu’à un titre, pour qu’il pût l’oublier… Il mourut jeune, c’est vrai, — mais il ne vit point baisser ce qu’il put très bien prendre pour de la gloire, et d’ailleurs il ne croyait pas mourir. […] Il est vrai que Sainte-Beuve, cet homme des « coteaux modérés », doit aimer la modération en toutes choses et peut prendre pour de la poésie ce qui n’en est pas à des yeux plus exigeants que les siens. […] Prenez et lisez-en une page au hasard, sans dire le nom de l’auteur, et je défie qu’on reconnaisse plus le style d’Alexis de Tocqueville que le style d’un autre ! […] Alexis de Tocqueville a bien pu le prendre pour elle.
Fatigué d’une étreinte si vaine, il peut un jour prendre dans ses bras autre chose que cette nuée et produire une œuvre vivante. […] Tel est le fond de ce livre dans lequel un esprit, fait pour mieux que cela, se remue puissamment dans le vide et finit par mourir faute d’air, comme un robuste oiseau pris sous la machine pneumatique. […] Au moins le formica-leo prend des insectes nécessaires à sa vie en creusant son trou dans le sable, mais les psychologues, comme M. […] et que prennent-ils, que l’inanité ? […] Or, comme il estime que la science doit faire, dans un temps donné, les destinées du genre humain, il se trouve que la religion et la morale, qui ne sont pas la vérité scientifique et sur lesquelles les philosophes ont pris l’avance, s’en iront un jour avec les vieilles lunes.