Nous avons donné le plus bel exemple, dans le monde moderne, de cette propriété de la vérité, qui est de susciter dans l’esprit qui la possède le désir et le devoir d’en faire part aux autres. […] L’influence de Descartes fut celle d’un homme de génie qui avait appris à chacun sa véritable nature, et, avec l’art de reconnaître et de posséder son esprit, l’art d’en faire le meilleur emploi.
Chaque institution doit être examinée dans ses rapports, non point avec un idéal abstrait ou supposé réel, mais avec le peuple qui la possède. […] Le même homme possède en général — implicitement ou non — autant de morales qu’il a de besoins à satisfaire.
De Hartmann, qui lui aussi platonise, nous dit que deux cubes ne possèdent point par eux-mêmes la qualité d’être égaux ; supprimez le premier, l’égalité en question n’existe plus pour le second ; l’existence du second ne peut enrichir le premier d’une qualité nouvelle, ni changer sa nature, ni par conséquent être cause de son égalité avec l’autre cube : la notion de l’égalité n’est donc pas tirée des choses. — Jusque-là, ce beau raisonnement platonicien peut se soutenir : il eût comblé d’aise Socrate et embarrassé peut-être Protagoras ; mais pourtant il s’agit de nos perceptions et non des cubes eux-mêmes. […] De Hartmann sépare artificiellement ce qui est uni et continu dans la conscience, puis il invoque l’inconscient pour pouvoir souder les fragments qu’il avait séparés : « Puisque, dit-il en termes platoniciens, toute âme d’homme ou d’animal possède en réalité l’idée de la similitude et de l’égalité, il ne reste plus qu’à admettre que l’ensemble d’opérations qui y aboutit se déroule, en sa partie essentielle, hors de la conscience ; et que le résultat auquel il conduit, la notion d’égalité et le jugement que A et B sont égaux, tombe seul sous le regard de la conscience. » Cette mythologie, par laquelle le métaphysicien allemand se tire d’embarras, est aussi peu scientifique que l’hypothèse platonicienne de la réminiscence.
Ces inégalités capricieuses sont de la plus haute importance ; car elles prouvent que la faculté que deux espèces possèdent de pouvoir s’allier peut être complétement indépendante de leurs affinités systématiques ou de toute différence reconnaissable dans leur organisation totale. […] La faculté que possèdent certaines plantes de pouvoir être greffées ou écussonnées sur d’autres est si évidemment indifférente à leur prospérité à l’état de nature, que personne ne supposera, je présume, qu’elle leur ait été donnée comme une propriété spéciale ; mais chacun admettra au contraire qu’elle doit dépendre incidemment de quelques rapports inconnus dans les lois de croissance de ces plantes.
La civilisation moderne a joint de nouveaux éléments d’observation à ceux que possédait l’antiquité30. […] Et en vérité je suis tenté de croire que beaucoup d’entre eux le possèdent.