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231. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Mmc Swetchine, dès sa jeunesse, ne lisait que la plume à la main et faisait d’abondants extraits de ses lectures ; on en possède, sans compter ce qui s’est perdu, 35 cahiers reliés. […] Théologiquement, elle n’a jamais douté qu’elle ne possédât la vérité absolue dans le dogme et le symbole chrétien ; elle n’a varié que du moins au plus, en se faisant chaque jour plus strictement fidèle, plus catholique et plus orthodoxe. […] Vous me manquez, comme si nous avions passé beaucoup de temps ensemble, comme si nous avions beaucoup de souvenirs communs ; comment s’appauvrit-on à ce point de ce qu’on ne possédait pas hier ?

232. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Depuis lors, M. de Laferrière est passé à l’histoire pure, en allant prendre copie en Russie des nombreuses lettres de Catherine de Médicis que possède la Bibliothèque impériale de Saint-Pétersbourg ; mais il est resté fidèle à la variété de ses goûts et à sa littérature première en y ajoutant, chemin faisant, quantité de menu butin recueilli ou glané sur d’autres branches plus agréables qui s’offraient à lui. […] Il se loue donc d’avoir gardé la juste mesure dans l’exercice des charges publiques, de s’être donné à autrui sans s’être ôté à soi-même, « sans s’être départi de soi de la largeur d’un ongle. » On ne conduit jamais mieux la chose publique que lorsqu’on se possède ainsi. En dehors des choses sérieuses et même au jeu, cela sert de se posséder toujours.

233. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « QUELQUES VÉRITÉS SUR LA SITUATION EN LITTÉRATURE. » pp. 415-441

Ce qui est, ce qui s’est déjà accompli et parcouru, ce que nous possédons, voilà une matière plus sûre ; tenons-nous à en toucher, à en presser quelques points essentiels et à les caractériser. […] Quiconque voudrait se régler sur les décisions de ce juge banal ou vénal se trouverait posséder un joli code de bon goût ! […] Je me suis dit souvent qu’on ne connaissait bien un homme d’autrefois que lorsqu’on en possédait au moins deux portraits.

234. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Puisqu’on connaît le portrait de Mlle de Liron, puisque j’ai osé citer un passage de Mlle Aïssé malade, qui, en donnant une incomplète idée de sa personne, laisse trop peu entrevoir combien elle fut vive et gracieuse, cette aimable Circassienne achetée comme esclave, venue à quatre ans en France, que convoita le Régent, et que le chevalier d’Aydie posséda ; puisque j’en suis aux traits physiques des beautés que Mlle de Liron rappelle et à l’air de famille qui les distingue, je n’aurai garde d’oublier la Cécile des Lettres de Lausanne, cette jeune fille si vraie, si franche, si sensée elle-même, élevée par une si tendre mère, et dont l’histoire inachevée ne dit rien, sinon qu’elle fut sincèrement éprise d’un petit lord voyageur, bon jeune homme, mais trop enfant pour l’apprécier, et qu’elle triompha probablement de cette passion inégale par sa fermeté d’âme. […] C’était une personne de vertu et de religion : Mlle Aïssé lui confia tout le passé, et ses scrupules encore vifs, ses remords d’un amour invincible ; Mme de Calandrini lui donna de bons conseils, lui fit promettre, au départ, d’écrire souvent, et ce sont ces lettres précieuses que nous possédons. […] Elle, ses gens, tout ce qu’elle possède, j’en dispose comme elle, et plus qu’elle ; elle se renferme chez moi toute seule et se prive de voir ses amis ; elle me sert sans m’approuver ni me désapprouver, c’est-à-dire elle m’a offert son carrosse pour envoyer chercher le Père Boursault, etc… » Ce qui ne touche pas moins que les sentiments de piété tendre dont Mlle Aïssé présente l’édifiant modèle, c’est l’inconsolable douleur du chevalier à ses derniers moments.

235. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre V. Des ouvrages d’imagination » pp. 480-512

Quand les qualités qu’on possède ne suffisent pas pour atteindre à ce but, l’on a recours au vice pour se faire remarquer ; il donne des formes confiantes, une sorte d’assurance et de fermeté, du moins contre le malheur des autres, qui peut faire quelque illusion. […] La splendeur de la puissance, le respect qu’elle inspire, la pitié qu’on ressent pour ceux qui la perdent quand on leur suppose un droit à la posséder, tous ces sentiments agissent sur l’âme, indépendamment du talent de l’auteur, et leur force s’affaiblirait extrêmement dans l’ordre politique que je suppose. […] Le public français accueille difficilement au théâtre les essais dans un genre nouveau ; admirateur, avec raison, des chefs-d’œuvre qu’il possède, il pense qu’on veut faire rétrograder l’art, quand on s’écarte de la route que Racine a tracée.

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