Son début poétique fut un certain Portrait d’Iris, que Quinault trouva si joli qu’il s’en fit honneur auprès d’une demoiselle dont il était amoureux : Ses cheveux longs et noirs, luisants et déliés, Par boucles épandus et galamment liés, Ombragent doucement la fraîcheur de sa joue… Ce sont, en un mot, de ces vers à ravir Quinault et à mettre Boileau hors de lui. […] Quelques mois avant cette publication aimable et ce cadeau pour l’enfance, il donnait (1696) le premier tome in-folio intitulé : Les Hommes illustres qui ont paru en France pendant ce siècle, avec de magnifiques portraits gravés : le second tome, qui parut en 1700, complétait l’ouvrage et le nombre de cent, auquel Perrault s’était fixé pour ces portraits.
À quoi Mme des Ursins répondait, le 20 décembre : Vous me faites un portrait de la plupart des hommes, qui n’est pas trop à leur avantage : ce que j’y trouve de pis, c’est qu’il me paraît assez naturel. […] Je m’arrête dans la citation de ce portrait que l’inépuisable peintre ne termine pas si tôt. […] (Voir, au tome XIV de ces Causeries, le complément du portrait de Mme des Ursins.)
Il est en habit du matin, chapeau à trois cornes, debout dans une des allées de Versailles ; beau, fin, délicat de visage, élégant de taille, de port, de geste, la jambe bien faite ; c’est un très joli portrait, et qui contraste agréablement avec celui que Rigaud fit plus tard du grand seigneur, du duc et pair arrivé au faîte des honneurs, dans toute la maturité et dans toutes les largesses de la vie, portrait à grand fracas, à perruque solennelle, où la cuirasse et l’armure sont à demi noyées sous l’hermine, mais où la physionomie plus pleine exprime bien de la force et de la beauté. En voyant ces deux aspects d’un même personnage, je mettais en regard dans ma pensée les deux portraits que Saint-Simon a tracés également de d’Antin, l’un au début (t.
Gilles est l’ébauche, Jacques est la charge, Nicolas est le portrait. […] Dans la satire et dans l’épître, du moment qu’il ne s’agit point en particulier des ouvrages de l’esprit, Boileau est fort inférieur à Horace et à Pope ; il l’est incomparablement à Molière et à La Fontaine ; ce n’est qu’un moraliste ordinaire, honnête homme et sensé, qui se relève par le détail et par les portraits qu’il introduit. […] Ce chef-d’œuvre de satire est celle qu’il adresse à son Esprit, sujet favori encore, toujours le même, rimes, métier d’auteur, portrait de sa propre verve ; il s’y peint tout entier avec plus de développement que jamais, avec un feu qui grave merveilleusement sa figure, et qui fait de lui dans l’avenir le type vivant du critique.
Cette jeune femme, sur laquelle tous les portraits s’accordent, était, dès l’âge le plus tendre, une perfection mignonne de bon sens, de prudence, de grâce et de gentillesse : Mme de Stainville, à peine âgée de dix-huit ans, nous dit l’abbé Barthélemy, jouissait de cette profonde vénération qu’on n’accorde communément qu’à un long exercice de vertus : tout en elle inspirait de l’intérêt, son âge, sa figure, la délicatesse de sa santé, la vivacité qui animait ses paroles et ses actions, le désir de plaire qu’il lui était facile de satisfaire, et dont elle rapportait le succès à un époux digne objet de sa tendresse et de son culte, cette extrême sensibilité qui la rendait heureuse ou malheureuse du bonheur ou du malheur des autres, enfin cette pureté d’âme qui ne lui permettait pas de soupçonner le mal. […] Elle semble quelquefois se rappeler ce qu’elle n’a jamais appris… » Mais j’aime mieux, pour donner de la duchesse de Choiseul une idée saillante, emprunter les portraits en miniature qu’en a laissés un pinceau moins élégant et moins peigné que celui de l’abbé Barthélemy, mais plus vif en images : Ma dernière passion, dit Horace Walpole, qui ne la connut que quelques années plus tard (en 1766), et, je crois, ma plus forte passion est la duchesse de Choiseul. […] Walpole renouvelle à tout propos ces portraits de la jolie duchesse, et, puisque j’en suis à ces échantillons divers de son pinceau, j’ajouterai celui-ci encore, comme le plus complet et le plus ravissant de tous : La duchesse de Choiseul n’est pas fort jolie, mais elle a de beaux yeux, et c’est un petit modèle en cire qui, pendant quelque temps, n’ayant pas eu la permission de parler, comme en étant incapable, a contracté une modestie dont elle ne s’est point guérie à la Cour, et une hésitation qui est compensée par le plus séduisant son de voix, et que fait oublier le tour d’expression le plus élégant et le plus propre.