Il l’avait fait d’une manière plus affectueuse encore et plus vive à l’époque où M. de Talleyrand avait donné sa démission d’ambassadeur à Londres, et s’était tout à fait retiré de la vie politique. […] Il savait que, si la politique est ingrate, les lettres de leur nature sont reconnaissantes. […] Si la bonne foi est nécessaire quelque part, c’est surtout dans les transactions politiques, car c’est elle qui les rend solides et durables. […] Il les considérait comme des truchements et, jusqu’à un certain point, des apologistes de sa politique auprès des jeunes générations dont ils étaient les princes par le talent. […] Ma part dans la politique (en allemand), tome VI, le chapitre intitulé Talleyrand et ses rapports avec les Allemands.
Jean Passerat, l’un des auteurs de la Satyre Ménippée, était encore le seul, avant Béranger, qui eût imprimé au couplet, au quatrain politique, une véritable perfection littéraire. […] La circonstance la plus apparente dans la carrière du chansonnier, l’occasion politique, qui avait décidé du cours de sa verve, venait de manquer brusquement, après quinze ans d’escarmouches et de combats : il semblait qu’il fût désarmé par le triomphe. […] D’abord, bien que la couleur politique, à proprement parler, ne soit pas celle qui domine dans le volume, Béranger, en quatre ou cinq places mémorables, a fermement marqué sa pensée, sa sympathie et ses pressentiments prophétiques dans le duel qui se continue ; par son éloge de Manuel, par son Conseil aux Belges. par la Restauration de la Chanson, et surtout par sa Prédiction de Nostradamus, il a fait acte de présence dans les rangs de la pure démocratie ; il a d’avance (bien qu’à une date inconnue) signé de son nom imposant les registres de la Constitution future. […] Ces quatre ou cinq pièces politiques, jointes à tant de délicieuses chansons personnelles, d’une inspiration et d’une fantaisie intimes, telles que Mon Tombeau ; Passez, jeunes Filles ; le Bonheur ; Laideur et Beauté ; la Fille du Peuple, et ce sémillant Colibri, qui est le lutin familier du maître et la personnification éthérée de sa muse comme est la Cigale pour Anacréon ; toutes ces pièces ensemble auraient suffi à composer un charmant recueil final, digne assurément de ses aînés, et la dernière couronne eût brillé verdoyante encore, pour bien des saisons, au front du citoyen et du poëte. […] On ferait preuve d’un esprit bien superficiel en n’y voyant que des accidents particuliers auxquels se serait pris le poëte : Béranger a dramatisé, sous ces figures populaires, toute une économie politique impuissante, tout un système d’impôts écrasants ; il a touché en plein la question d’égalité réelle, du droit de chacun à travailler, à posséder, à vivre, la question, en un mot, du prolétaire.
Mais, malgré ces différences profondes, et qui intéressent surtout notre avenir et notre destinée (car il s’ensuit que la décadence dont on nous menace par analogie n’est nullement nécessaire), malgré cet élément essentiellement nouveau d’une industrie libre marchant au flambeau de la science, et travaillant non pas à corrompre, mais à améliorer la vie, il y a des ressemblances frappantes dans l’ordre politique. […] Troplong, ne possède aucun ouvrage qui renferme, sur l’état politique des Romains, les lumières qu’Aristote nous a données sur la république de Sparte, et Xénophon sur la république d’Athènes. […] et que tous ceux qui ont eu à leur jour une part de la responsabilité politique et de ses fièvres veuillent bien répondre sans y mêler d’arrière-pensée : est-il rien de plus difficile et qui exige une trempe, une vocation plus particulière ? […] j’appelle girondinisme en politique vouloir imprudemment les moyens, accumuler les motifs, les émotions et les impulsions, sans vouloir la fin. […] Il n’a eu qu’à appliquer au problème politique les mêmes qualités.
Le règne d’après, si Richelieu, moins sentimental que Henri II, et qui n’avait pas perdu de favoris parmi les sept mille tués sous Henri IV, frappa plus cruellement le duel que personne, ce fut moins sagesse et moralité du législateur que politique à la Tarquin, qui abat les têtes de pavot aristocratiques, non plus avec une baguette, mais avec la hache du bourreau. […] Rien de plus médité, d’une raison plus haute, plus politique et en même temps plus chrétienne dans la pensée. […] … Quand les grandes préoccupations d’échafaud cessèrent, — sous le Directoire, par exemple, — la politique fut une cause nouvelle de duels, et depuis ce temps-là elle le fut toujours et elle l’est encore ; mais ce n’est pas pour la politique qu’on se battait, en ces duels soi-disant d’opinion, c’était pour l’injure qui s’adressait à la personne, et dont la politique n’avait été que l’occasion.
Née des Ursins, de race pontificale, et Montmorency par mariage, cette femme, qui ne fut jamais qu’une épouse et une veuve chrétienne, a plus attiré son délicat biographe que les gloires tapageuses d’une époque où les femmes se dessinaient, avec plus ou moins de prétentions ambitieuses, des rôles politiques et littéraires. […] La politique de Richelieu que nous rencontrons ici, non pas dans son ensemble, mais dans une des particularités les plus formidables de son action, est une des difficultés qu’aucun historien n’a, selon nous, jusqu’ici vaincue. […] Il a fait obéir l’Histoire… Amédée Renée n’a pas plus définitivement jugé que les autres la politique du grand Cardinal. […] D’ailleurs, ce grand faucheur, qui avait pris au sérieux la méthode de Tarquin, n’abattit point de fleurs innocentes ; toutes, plus ou moins, étaient empoisonnées, et si « les successeurs de Richelieu — nous dit Renée dans un dernier trait — n’eurent pas besoin de cette politique de sang pour réussir », c’est que la besogne avait été bien faite. […] … D’un esprit politique trop ferme pour ne pas comprendre la grandeur de Richelieu, tout en l’accusant, il a été entraîné, charmé, par son sujet ; mais il reprendrait tout son regard demain, s’il rencontrait Richelieu ailleurs qu’entre l’échafaud de Montmorency et la cellule de sa femme.