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234. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXX » pp. 330-337

Je me porte fort bien : je suis très contente, car je suis disgraciée96. » Cette dernière phrase peut se traduire ainsi : le suis très contente, car je suis disgraciée par madame de Montespan, parce que je suis eu faveur auprès du roi. […] Remarquez enfin dans la lettre de madame de Coulanges le mot qui commence la phrase qui suit la nouvelle : « Cependant, dit-elle, elle est plus occupée de ses anciennes amies qu’elle ne l’a jamais été. » Cependant vient bien après l’approbation d’un homme tel que le roi ; mais quel ridicule serait égal à celui de madame de Coulanges disant : M. de Coulanges mon mari trouve madame Scarron de fort bonne compagnie, et cependant elle veut toujours bien nous regarder !

235. (1896) Le livre des masques

Ils parlent ; oui, ils disent des mots qui troublent un instant le silence, puis ils écoutent encore, laissant leurs phrases inachevées et leurs gestes interrompus. […] Un autre nom a été donné, historiquement, à un tel état de vie : quiétisme ; cette phrase de M.  […] Phrases moins que vibrations, vibrations si spéciales que peu d’âmes s’y trouvent d’accord. […] Des phrases, oui ; mais les phrases ne sont encore que la parure et la pudeur de son art ; il a senti, songé ou pensé avant de dire ; surtout il a aimé : et telle de ses métaphores jaillit comme une éjaculation, comme un des « cris » de sainte Thérèse. […] Huysmans est dur, comme ses phrases, comme ses épithètes, comme ses adverbes.

236. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Dryden veut mettre dans son théâtre les beautés de la tragédie française, et d’abord la noblesse des sentiments ; Est-ce assez de copier, comme il fait, des phrases chevaleresques ? […] Qu’est-ce que Dryden vient faire ici avec ses phrases écrites ? […] Ils croient couvrir toutes ces crudités sous de bonnes métaphores correctes, sous des périodes poétiques nettement terminées, sous un appareil de phrases harmonieuses et d’expressions nobles. […] Il oppose les idées aux idées, et les phrases aux phrases, pour que le lecteur, guidé par le contraste, ne puisse dévier de la route tracée. […] Quelles misères que ses beaux mots d’auteur, sa galanterie, ses phrases symétriques, ses froids regrets, si on les compare aux cris douloureux, aux effusions vraies, à l’amour profond qui éclate chez l’autre !

237. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. (Suite et fin.) »

La pureté du langage et du style n’est pas la netteté ; elle est plus élémentaire, sinon plus essentielle ; elle consiste « aux mots, aux phrases, aux particules, et en la syntaxe. » La netteté ne dépend que « de l’arrangement, de la structure, ou de la situation des mots, de tout ce qui contribue à la clarté de l’expression. » Emendata oratio, c’est la pureté ; dilucida oratio, c’est la netteté. […] Les aigles ne s’amusent point à prendre des mouches… » C’est bien pensé, c’est bien dit, mais je dois avertir que je rends service à sa phrase en la coupant. […] Poitevin qui s’est amusé, dans ce qu’il appelle une Cacographie, à recueillir les prétendues mauvaises phrases des meilleures écrivains du temps. […] Poitevin cite comme un exemple de mauvaise phrase et de manière de dire incorrecte la pensée suivante : « On ne montre pas sa grandeur pour être à une extrémité, mais bien en touchant les deux à la fois, et en remplissant tout l’entre-deux. » M. Poitevin me fait l’honneur de m’attribuer cette phrase, sans doute pour l’avoir vue citée dans quelqu’un de mes écrits, et il la signe tout uniment de mon nom.

238. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

Ils abusent des « avec », des « de », ce dernier mis à la place de « par », l’autre supprimant des lambeaux entiers de phrases. […] Tous les jours on entend dans les salons des phrases de cette qualité : « J’aime à ce que vous veniez me voir. — Je pars à Nice. — Madame X. a une jolie dentition. — La rue de la Paix est très passagère », etc., etc. […] Qui de nous peut se vanter de ne pas hésiter, souvent, au moment d’employer telle locution ou telle tournure de phrase ? […] Avez-vous remarqué que, dans la rédaction courante des journaux, une phrase dite française comprend invariablement un nombre exagéré de mots d’argot étranger qu’on emploie à la place de mots français existants : pourquoi box au lieu de stalle, pourquoi lad au lieu de palefrenier… et tant d’autres ? […] Enfin, lorsqu’on rencontre dans une circulaire signée de M. le Ministre de l’Instruction publique (authentique), des phrases entières écrites dans le plus pur charabia, par exemple : « Que les instituteurs imprègnent leurs leçons d’un souffle amplement patriotique… » et bien d’autres du même acabit, on est endroit de se demander si la connaissance du latin, cette langue si logique et si intransigeante sur la propriété des termes, ne devrait pas être exigée des rédacteurs de nos ministères, afin que nos actes officiels français soient au moins écrits en français.

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