L’intervention est licite et obligatoire toutes les fois qu’un pays franchit ses limites, ses droits personnels, ses conventions, ses traités, sa géographie, et porte atteinte, les armes à la main, au droit public, propriété commune de l’Europe, et que l’Europe garantit à la civilisation générale. […] Elle aimait dans M. de Talleyrand tout à la fois l’aristocratie réhabilitée par la république, le talent remis à sa place par la liberté, le charme personnel de la grâce des mœurs et de la politesse d’esprit réinstallé dans la société par ce débris si jeune encore de l’ancien régime, recueilli et relevé par son influence. […] Les frères de Napoléon et Napoléon lui-même ayant voulu enlever Marie-Louise à la capitale et en disposer seuls comme d’un gage personnel de transaction, M. de Talleyrand, dépourvu de tout prétexte de négociation avec l’Europe, n’eut plus qu’à se prononcer entre un homme et la patrie. […] M. de Talleyrand fut véritablement arbitre de l’univers au congrès des rois ; il ne dut cette autorité personnelle qu’à son génie de diplomate, et non à son titre de plénipotentiaire. […] Son hôtel, ou plutôt son palais, était plein, depuis l’atrium jusqu’au salon, d’une foule immense et somptueuse, dans tous les costumes, sous toutes les décorations de toutes les époques où il avait joué les grands rôles de la vie sociale, et rendu des services publics ou des services personnels à cette multitude de clients.
Plus il est original, plus il marque profondément ce qu’il fait de son empreinte personnelle. […] Il a tout l’air d’ignorer ou d’oublier que le vrai principe démocratique est ce principe aristocratique : Place au mérite personnel ! […] Lors donc qu’il croit devoir exposer les résultats de ses recherches personnelles, ce n’est pas en vue de jeter de la poudre aux yeux ; il ne veut pas séduire, mais instruire. […] Rien que des impressions personnelles. […] « Il y a beau temps, écrit-il, qu’elle est de chez nous… Elle tenait nos pères par la main et aujourd’hui nous la suivons encore. » Enfin, il n’a pas lieu de se plaindre de son lot personnel.
Ailleurs il utilise, il invoque ses souvenirs personnels. Mais ce qui domine et enveloppe l’instruction et la biographie, la morale et l’histoire, dans ces oraisons funèbres, c’est l’émotion personnelle de l’orateur. […] Il y a un élément personnel et lyrique encore dans ces admirables discours, envers qui l’on n’est pas juste, faute de les regarder d’assez près. […] Il y a d’excellentes choses, des vues originales, une exposition magistrale dans la Connaissance de Dieu et de soi-même, et dans la Logique, où il mêle avec indépendance saint Thomas et Descartes, suivant surtout son sens personnel de la vérité des choses.
Puis Lamartine sentit le besoin d’objectiver son sentiment : du lyrisme personnel il tâcha de passer à l’épopée symbolique, où les émotions d’ordre universel se dépouillent des expressions trop directement subjectives de l’élégie ou de l’ode, et s’élargissent en s’apaisant. […] D’inspiration personnelle, de sentiment original et profond, il n’y en a guère plus dans ces étincelantes Orientales que dans les Odes : l’intensité des images, la puissance des rythmes firent, avec raison, le succès du livre. Dans une dernière pièce l’auteur dénonçait lui-même la fantaisie créatrice de sa poésie, il disait adieu à son beau rêve d’Asie, et remisait pour ainsi dire tout le bibelot oriental qu’il avait déballé : il annonçait une poésie plus intime et plus personnelle. […] Hugo nous présente, un tableau qui se suffirait à lui-même par son immédiate objectivité, mais au travers duquel le poète nous fait surgir quelque vaste conception de sa philosophie personnelle.
En métaphysique c’est le contraire : l’œuvre est personnelle ; elle porte le caractère d’un individu ou au moins d’une race. […] Il est possible que le psychologue tout en se livrant à ses recherches incline à l’une des deux solutions ou à toute autre, comme le physiologiste peut incliner au mécanisme ou à l’animisme, mais ce sont là des spéculations personnelles qu’il ne confond pas avec la science. […] Enfin la méthode objective, au lieu d’être personnelle comme la simple méthode de réflexion, emprunte aux faits un caractère impersonnel, elle se plie devant eux, elle moule ses théories sur la réalité. […] Il est vrai que la méthode d’observation intérieure étant strictement personnelle, dès qu’on en applique les résultats aux autres hommes, on la viole ; on procède objectivement et le pas le plus décisif est fait.