Il essaye de décomposer et d’expliquer la fortune d’André Chénier par toutes les raisons les plus étrangères au talent même et au charme de ses vers ; il côtoie complaisamment les suppositions les plus gratuites en finissant par les rejeter sans doute, mais avec un regret mal dissimulé de ne les pouvoir adopter : « On se demanda, écrit-il (lorsque ces Poésies parurent), si on n’admirait pas sous la garantie d’une muse posthume l’effort d’un esprit moderne ; si, sous la main d’un éditeur célèbre et poëte lui-même, telle épître ou telle élégie n’avait pas pu s’envoler d’un champ dans un autre, et sans qu’il lui fût bientôt permis de revenir à la voix de son premier maître. […] remy trouve sous sa plume, et qu’à notre tour nous nous permettons de souligner : « C’est en notant de pareils traits, dit-il, et beaucoup d’autres du même genre, qu’une lecture nouvelle et attentive des Poésies d’André Chénier indiquera d’elle-même que nous avons été porté à combattre ce sentiment, qui a fait placer par certaines personnes les productions de ce poëte parmi les grands monuments de l’antiquité littéraire. » Quel style, et au moment où l’on se fait juge de la grâce elle-même ! […] Chénier a eu d’abord et il n’a pas du tout perdu une qualité que les Grecs prisaient fort et qu’ils ne cessent d’exprimer, de varier, d’appliquer à toutes choses, je veux dire la jeunesse, la fraîcheur et la fleur, le èáëåñüí, si l’on me permet de l’appeler par son nom, le novitas florida de Lucrèce.
Ils prennent les lois et les règles comme des conditions données à leur activité, comme une sorte de cahier des charges imposé à l’artiste qui entreprend de faire une œuvre, tout au plus comme une méthode qui permet d’obtenir économiquement et sûrement la plus grande somme de perfection. […] Non moins habilement, Perrault choisit la forme du dialogue : c’est la plus commode, quand il faut plaire à un public léger ; elle a de plus cet avantage, qu’elle permet à l’auteur aussi d’être léger et superficiel, et que le décousu, le paradoxe, l’affirmation téméraire et sans preuves, tout ce qui invaliderait une exposition dogmatique, se tourne ici facilement en grâces. […] Seulement, il y a un seulement, un honnête homme ne se permet pas d’attaquer les personnes comme fait l’auteur des Satires.
Ils ont l’enfance du cœur qui permet de s’amuser à des riens Quelquefois aussi (et alors elle est moins aimable et sonne un peu faux aux oreilles des profanes), cette gaieté laisse entrevoir une arrière-pensée d’édification ; elle paraît commandée et voulue ; elle s’étale comme un argument en faveur de la foi, comme un défi à la tristesse ou aux rires mauvais des pécheurs. […] Et notez que cet éclat survient dans une des parties les moins importantes du sermon, dans le développement d’un argument accessoire Le style, souvent excellent, n’est pas toujours d’une entière pureté (c’est une critique que l’on peut se permettre, puisque le Père Monsabré apprend par cœur et récite ses discours, comme Massillon et comme les neuf dixièmes des orateurs). […] La diction est une lutte désespérée contre l’immensité des nefs ; elle ne peut guère se permettre les notes fines, pénétrantes ou voilées, les accents qui vont à l’âme.
Tout cela nous apparaîtra à mesure que nous parcourrons ses ingénieuses études et nous permettra sans doute de définir son talent. […] Rabusson, employant par badinage le mode lyrique qui permet tout, nous explique en quoi l’amour des vieux peut préparer les femmes à l’amour des jeunes. […] La dissipation de la vie ne permet guère le recueillement où se nourrissent et croissent d’ordinaire les profondes amours.
La Révolution le sauva : en le rejetant par-delà les mers et dans la diversité des exils, elle lui permit de grandir par lui-même, de se développer sur son propre fonds, d’écouter la muse inconnue dans la solitude, de se reconnaître et de se tremper directement dans les épreuves. […] Cet homme primitif a pu se recouvrir ensuite chez M. de Chateaubriand, mais il a persisté sous tous les casques et sous tous les masques ; il ne lui a jamais permis depuis de faire aucun rôle, même les rôles les plus sérieux, sans venir bien souvent à la traverse, et sans dire en soulevant la visière : « Je suis dessous, me voilà ! […] Bertin l’aîné, qui se permettait de retrancher à chaque article ce qu’il ne croyait pas bon, sans que l’auteur (chose rare) s’en plaignît jamais ou même s’en informât.