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1106. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — I » pp. 139-158

Il n’est pas étonnant, remarque-t-il encore, que mon intime connaissance avec ces échantillons de l’espèce m’ait appris à avoir en horreur l’amusement du chasseur ; celui-ci sait bien peu quelles aimables créatures il persécute, de quelle gratitude ils sont capables, combien ils sont folâtres et gais d’humeur, avec quel bonheur ils jouissent de la vie, et que s’ils sont pénétrés, comme on les voit, d’une crainte si particulière de l’homme, c’est uniquement parce que l’homme leur a donné trop de motifs pour cela. […] La poésie commençait à le partager ; il y recourait de temps en temps, mais seulement quand il avait quelque chose de particulier et de plus vif à exprimer, et qui lui eût paru excessif en prose : les vers alors lui semblaient « le seul véhicule convenable à la véhémence de l’expression ».

1107. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

En revanche, Rohan se plaît fort à célébrer une action héroïque de sept soldats de Foix qui, s’enfermant dans une bicoque auprès de Carlat, arrêtèrent le maréchal et toute son armée deux jours entiers, et, après lui avoir tué plus de quarante hommes, se sauvèrent au nombre de quatre ; trois sur les sept, trois proches parents, voulurent demeurer et se sacrifier, parce que l’un était blessé et hors d’état de sortir : « Ainsi les quatre autres, dit Rohan, à la sollicitation de ceux-ci et à la faveur de la nuit, après s’être embrassés, se sauvent, et ces trois-ci se mettent à la porte, chargent leurs arquebuses, attendent patiemment la venue du jour, et reçoivent courageusement les ennemis, desquels en ayant tué plusieurs, meurent libres. » Ce sont là les seuls éclairs du récit chez Rohan, qui voudrait bien assurer aux noms de ces braves soldats une immortalité dont il n’est pas le dispensateur : il fallait de certains échos particuliers, et qui ne se retrouvent pas deux fois, pour nous renvoyer les glorieux noms qui ont illustré les Thermopyles. […] L’honneur de Richelieu est de l’avoir senti avec une énergie ardente et un indomptable génie d’exécution : le malheur de Rohan, celui de sa position, est de n’avoir pu le sentir, d’avoir été l’allié naturel et comme nécessaire de l’étranger, de quiconque était alors l’ennemi de la patrie, d’avoir continué de penser là-dessus comme un seigneur féodal en retard, devenu républicain par rencontre, et qui, en vue d’une conviction religieuse particulière, usait de tous les moyens de défense, sans se douter de ce qu’il allait choquer au sein de cet autre sentiment moral et religieux aussi, de ce sentiment patriotique, tout à l’heure universel.

1108. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Mémoires ou journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guetté. Tomes iii et iv· » pp. 285-303

Le mémoire, conçu et commencé dans une intention toute particulière, mais bientôt, à mesure que l’auteur avançait et s’y développait, continué et composé réellement en vue du public, est fort utile et fort attachant. […] Cette idée de Versailles n’est point particulière alors à Bossuet, elle est celle de tout le siècle.

1109. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Ernest Naville est d’ailleurs, jusqu’à un certain point, indépendant de l’opinion qu’on a des écrits philosophiques et de la doctrine particulière de Maine de Biran ; c’est l’histoire d’un espritet d’une âme. […] Si on le prenait au mot et si l’on s’emparait de ses aveux au pied de la lettre, il serait l’homme le plus impropre aux affaires qui y ait jamais été mêlé ; mais, capable ou non dans tel ou tel emploi particulier, il est certes le moins homme d’État de tous les hommes.

1110. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

» M. de Tende ne fut pas en reste, et lui rivant son clou : « Monsieur, ne faites pas tant le difficile ; quand on a besoin d’un pardon général, on peut bien en accorder un particulier. » On a relevé une plaisante bévue de Marolles, qui a cité quelque part Politien dans sa traduction du Moschus de Théocrite, pour dire que Politien avait traduit L’Amour fugitif de Moschus. […] Au point de vue de la description des caractères et de l’observation naturelle des talents, l’étude de Marolles a sa moralité particulière : il nous apprend à ne mépriser personne.

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