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504. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

Ici de belles pages plus générales viennent consoler, cependant, de cette histoire allégorique et mystique si prolongée, et qui nous paraît, malgré tout, un peu dure : c’est un coup d’œil jeté sur l’état du monde avant la venue du Messie, sur la préparation graduelle des esprits à le recevoir. […] La vie de Jésus, le scandale qu’il cause par sa prédication et sa vertu même, l’attentat commis en sa personne par la Synagogue, sa condamnation et son supplice, sont résumés en une page touchante : « Le Juste est condamné à mort : le plus grand de tous les crimes donne lieu à la plus parfaite obéissance qui fut jamais. » — Autant j’ai pu paraître en garde précédemment, autant je dirai ici en toute conviction que ces pages admirables par la simplicité et la beauté morale de l’expression sont en bonne partie vraies, de quelque côté qu’on les envisage. […] On ne saurait mieux comprendre qu’en lisant Bossuet à cet endroit et dans tout ce qui suit, la difficulté qu’il y avait pour le monde, pour l’univers païen, à faire ce grand pas, à sortir non plus en la personne de quelques individus d’élite, mais en masse et par classes et nations tout entières, de cette chose confuse et qui nous paraît si absurde, l’idolâtrie. […] Ainsi ce Mithridate qui fournit matière à un si beau chapitre chez Montesquieu, n’est pas même nommé chez Bossuet. — A propos du Droit romain, des lois romaines qui ont paru si sages et si saintes que leur majesté a survécu à la ruine même de l’Empire, Bossuet a ce beau mot, souvent cité : « C’est que le bon sens qui est le maître de la vie humaine « y règne partout. » La fin de cette troisième partie peut paraître brusquée. […] De loin, il s’élèvera et paraîtra de plus en plus, aux regards d’une postérité qui aura, je le suppose, bien d’autres visées, comme une colonne, ou mieux une double ou triple pyramide un peu singulière d’aspect ; mais en approchant, en le considérant de près, que de belles et grandes choses on y retrouvera, dites pour la première fois et de cette manière durable et superbe qui ne saurait s’imiter !

505. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite.) »

J’ai reçu des lettres d’une personne (sans doute Mlle Leduc) que vous voyez souvent ; mais il ne me paraît pas encore qu’elle ait reçu des miennes. […] L’éclat de la dernière affaire, la part importante qu’il y avait prise, paraissent avoir excité l’ambition du comte de Clermont : il aspirait à être chargé de ce nouveau siège, comme il l’avait été de celui de Namur. […] C’est surtout contre le tout récent maréchal de Lœwendal, le vainqueur de Berg-op-Zoom, que le comte de Clermont paraît avoir voulu se mettre en garde par ce diplôme ; il craignait d’avoir à obéir à celui qu’il avait eu nominalement sous ses ordres. […] » Il est difficile d’intéresser la postérité à des plaisirs passés, qui ont pu paraître charmants à leur minute ; mais elle-même aurait tort aussi de trop chicaner des gens qui ont pris où ils l’ont voulu un divertissement à leur usage. […] Hors ce seul jour, il ne parut plus jamais à l’Académie.

506. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

Craufurd publia ceux de Mme du Hausset, et qu’on vit paraître cette suite de petits volumes chez le libraire Léopold Collin : Lettres de Mmes de Villars, de Tencin, de Mlle Aïssé, etc., etc. […] Ni les femmes du xvie  siècle elles-mêmes, bien qu’elles aient eu le tort d’être effleurées par Brantôme, ni celles du xviiie , bien que ce soit l’air du jour de leur être d’autant plus sévère qu’elles passent pour avoir été plus indulgentes, ne me paraissent tant à dédaigner. […] Mme de Staal était une personne vraie, et son livre est un livre vrai dans toute l’acception du mot : ce caractère y paraît empreint à chaque ligne. […] Son caractère ambitieux et sec parut se dessiner de plus en plus en avançant ; Grimm prétend qu’il était pédant et peu aimable ; il nous apprend que des mécomptes d’ambition lui troublèrent finalement la tête, au point qu’il se jeta par une fenêtre et se tua. […] A peine la duchesse du Maine fut-elle morte a son tour, qu’on se disposa à publier les Mémoires : ils parurent en 1755 ; on n’attendit même pas que le baron de Staal eût disparu.

507. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

L’effroi ou la honte que ces prédications parurent jeter dans l’âme des deux amants, furent plus forts et plus déterminants en 1675 qu’ils ne l’avaient été dans les années précédentes, où les carêmes n’avaient pas été prêches avec moins de véhémence, et où les vérités de la religion n’avaient pourtant rien obtenu. […] Il se rendit au-devant du roi, à huit lieues de Versailles, et parut devant lui. […] On dit qu’elle n’est plus si fort l’admiration de tout le monde, et que le proverbe a fait son effet en elle ; mon amie de Lyon (madame de Coulanges) m’en paraît moins coiffée. […] Cependant je m’y trouve plus résolue que jamais, et rien ne me paraît si difficile que de demeurer dans l’état où je suis. » Cette lettre est l’expression d’une mélancolie profonde. […] La jalousie de madame de Montespan est arrêtée par un mouvement de dévotion qui paraît avoir décidé le roi à se séparer d’elle : elle s’éloigne ; le roi rapproche de lui madame de Maintenon qui croit à sa conversion et l’y encourage.

508. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le cardinal de Retz. (Mémoires, édition Champollion.) » pp. 238-254

Il en conclut que le ministère était encore moins à son goût qu’à sa portée : « Je ne sais si je fais mon apologie en vous parlant ainsi, écrivait-il en s’adressant à Mme de Caumartin ; je ne crois pas au moins vous faire mon éloge. » Cette gloire, ce point d’honneur dont Retz nous parle toujours, et qu’il ressentait à sa manière, c’était une certaine réputation populaire, la faveur et l’amour du public, c’était d’être fidèle aux engagements envers ses amis, de ne point paraître céder à un intérêt purement direct ; vers la fin, toute sa doctrine de résistance semble n’avoir plus guère été qu’une gageure d’honneur contre le Mazarin. […] … Les plus sages parurent aussi fous que le peuple, le peuple me parut plus fou que jamais. » La gaieté de certains endroits de son récit ne peut nous couvrir qu’incomplètement le dégoût de ce régime anarchique, contradictoire, et dont ceux qui y étaient plongés, par une illusion trop ordinaire, ne s’apercevaient pas. […] Ici nous retrouvons un cardinal de Retz tout différent (sauf la beauté de l’esprit) de ce qu’il avait paru d’abord. […] En 1675 pourtant, il fut saisi d’une idée qui parut extraordinaire et qui causa une grande admiration à ses contemporains : c’était de renoncer au chapeau, et, se dépouillant de la dignité de cardinal, d’aller vivre en Lorraine dans une retraite absolue. […] Il nous suffit que plusieurs de ses contemporains, et qui l’approchaient de près, aient paru croire à sa persuasion finale du christianisme et d’une autre vie, pour nous imposer la réserve et le respect sur ce point suprême.

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