On n’a pas oublié et on n’oubliera point dans l’histoire littéraire du xixe siècle, — côté burlesque — son coup de couteau à Alphonse Karr pour le punir de l’avoir piquée dans ses Guêpes. […] On n’a pas oublié non plus le crachat dont un soir, en plein salon, — elle étoila le visage surpris du capitaine d’Arpentigny parce qu’il avait osé vanter devant elle Mme George Sand. Le capitaine d’Arpentigny, l’auteur d’un livre charmant sur la physionomie de la Main, et dans son temps, la plus élégante cravache des Gardes du Corps, oublia qu’il en avait une, ce jour-là, et couvrit du mépris le plus miséricordieux et le plus gai cette Furie… C’est à travers ces attitudes — légendaires déjà — qu’on verra toujours Mme Colet, quand on s’avisera de la regarder. […] Mais la vivandière n’oubliait pas qu’elle était Corinne et elle alternait avec elle… L’historienne n’est pas tout dans l’Italie des Italiens, et dans cette espèce d’Italie, il n’y a pas que celle des Italiens de l’heure présente ; il y a l’Italie toute seule, la vieille Italie, l’Italie de Raphaël et de Michel-Ange, qui valait bien l’Italie piémontaise de Victor-Emmanuel. […] l’égotisme, pire que l’égoïsme et dont il sort, l’égotisme qui est l’égoïsme rapetissé et babillard, est suprêmement le caractère de l’Italie des Italiens, — de ce livre fait sur les autres par une femme qui ne s’oublie jamais et qui informe l’univers de l’état de son catarrhe, tout en lui parlant de son héros, Garibaldi !
seigneur Cervantes, que Votre Seigneurie se règle sur le boire, sans oublier le manger, et elle se guérira sans autre remède. » — « Oui, répondis-je, on m’a déjà dit cela bien des fois ; mais je ne puis renoncer à boire quand l’envie m’en prend, et il me semble que je ne sois né pour faire autre chose de ma vie. […] Ceux qui le font mourir le même jour que Shakespeare oublient la différence des calendriers ; il y a entre ces deux dates quelques jours d’intervalle. […] Un aimable écrivain qui, sans se laisser oublier ici, a su depuis quelques années se naturaliser en Espagne, M. […] Et puis, ne l’oublions pas, le xviie siècle ne riait pas précisément pour rire. […] Mais nous tous, critiques ou peintres, en revenant si tard sur le sincère et gai chef-d’œuvre, n’oublions jamais ce qu’il est à la source.
N’oublions pas non plus que, de même qu’en sa période littéraire M. de Chateaubriand eut Fontanes pour conseiller assidu et fidèle, il eut, pour sa polémique politique aux Débats, un ami, homme de goût, et sévère également, M. […] « Épouvanté, j’ai beau crier à mes enfants : N’oubliez pas le français ! […] C’est de cette façon singulière qu’il rendait hommage à ses parents et devanciers ; mais, pour avoir le droit de se plaindre de lord Byron, il l’a oublié parfaitement. […] l’auteur des Mémoires d’outre-tombe a si bien oublié cela, que, dans ce chapitre où il reproche à Byron de ne l’avoir jamais nommé, il ajoute : Point d’intelligence, si favorisée qu’elle soit, qui n’ait ses susceptibilités, ses défiances : on veut garder le sceptre, on craint de le partager, on s’irrite des comparaisons. […] » Un très bon juge me disait à ce sujet, et je ne puis mieux faire que de rapporter ses paroles : « Quant au fond, M. de Chateaubriand se rappelle sans doute les faits, mais il semble avoir oublié quelque peu les impressions, ou du moins il les change, il y ajoute après coup ; il surcharge.
Son Tarare n’attire pas moins la foule, et la vindicte publique est oubliée. […] En rabattant de l’exaltation bien naturelle à un vieillard, plein d’imagination, qui se souvient de son plus beau moment de gloire, on sent en plus d’un passage l’accent de la conviction et d’une sincérité persuasive Beaumarchais, dans ses souvenirs, oubliait sans doute bien des détails qui eussent apporté de l’ombre au tableau, mais il avait raison en parlant de cet intérêt public, de cet aspect patriotique et général sous lequel avait toujours eu soin de placer et de voir même son intérêt particulier. […] Je n’oublierai jamais cet homme ni ce moment-là. […] Nous voudrions, par cette impression, effacer celle que laissent d’autres lettres publiques de Beaumarchais, écrites dans le même temps, et où il s’est oublié, par un dernier retour, à d’indignes irrévérences. Nous n’espérons pas, toutefois, faire oublier jamais à ceux qui les ont vues d’autres lettres de même date, très secrètes, et où la licence déborde.
La vérité que tout le monde oublie devient si piquante dès que quelqu’un y a pensé ! […] Car on l’avait presque oublié. […] cela est certain, malgré la préoccupation éternelle que Napoléon a imposée à toutes les têtes de notre époque, on avait pourtant presque oublié le fond de la pensée du grand organisateur, interrompu à moitié de son œuvre. […] Elle oubliait qu’au sortir de la Révolution française Napoléon ne s’était pas contenté de relever l’autorité, sans laquelle nul gouvernement n’est possible, mais que ce grand passager du pouvoir et de la gloire avait créé tout un ensemble d’institutions, et que c’est par là, justement, qu’il ne passerait pas, et qu’au contraire il confondrait sa destinée avec l’avenir de la France !