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645. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

Joseph de Maistre, qui était avant tout historien, malgré les plus hautes aptitudes à la métaphysique, est entré nettement dans cette question de l’Infaillibilité par la porte des faits et de l’histoire, conduit par un sens pratique de premier ordre, et écartant volontiers tous les arguments qui n’étaient pas historiques avec ce grand geste d’homme d’État qu’il avait, tandis que Saint-Bonnet, au contraire, bien plus métaphysicien que politique, a pénétré dans la même question par l’étude de l’essence même et des principes, allant dans l’essence jusqu’au point où elle est vraiment impénétrable. […] Dans l’impossibilité où je suis de citer tout ce qui me frappe au milieu de ce fouillis de richesses, j’indiquerai au moins le chapitre où l’auteur montre, avec une audacieuse justesse, que sans l’Église le Christianisme aurait fait le mal et l’erreur du monde et qu’il ne serait plus que l’épouvante de l’Histoire ; et celui-là encore qu’il intitule : « Coexistence des pouvoirs d’ordre, de juridiction et d’infaillibilité », dans lequel il prouve d’une manière si piquante que Jésus-Christ, étant et restant dans sa forme humaine sur la terre, n’en serait pas moins tenu d’instituer son Église telle qu’il l’a instituée et telle qu’elle est à cette heure. […] Des esprits, militaires dans l’ordre des idées et pour le service de la vérité, ont, en effet, reproché à Saint-Bonnet la grosseur d’un volume qu’on ne diminuerait pourtant de physique qu’en le diminuant d’intelligence. […] C’est, bien là l’ordre, dans ce monde désordonné, — dans ce monde du Sabbat humain, où, en toute chose, on dit la messe à la renverse.

646. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

De toutes ces formules s’exhalait une vapeur de scepticisme et de matérialisme qui répugnait au chrétien fervent, moraliste austère, homme d’ordre et d’autorité. […] Nous ne durons pas seuls ; mais dans l’ordre de la connaissance, toute durée émane de celle dont nous sommes les fragiles dépositaires. […] Ainsi lié par le sens commun, par l’amour de l’ordre, par le christianisme, il passa trois ans, défaisant l’ouvrage des autres, et creusant de toute sa force, au milieu de la route, un mauvais trou. […] Royer-Collard est un amateur du bon ordre.

647. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  premier article .  » pp. 326-341

Une telle séparation n’a rien que de naturel dans l’ordre actuel des choses ; il ne faudrait pourtant pas que cela fût poussé jusqu’au divorce, et il importe, autant qu’on le peut, de s’y opposer. […] C’est ce qu’attestent aussi les témoignages des Anciens, et c’est à quoi Pisistrate mit ordre par la révision et la rédaction qu’il ordonna. […] Et d’autre part, depuis lui, il y a eu certainement une postérité d’autres chanteurs ou rhapsodes, qui l’ont récité, copié, amplifié ; c’est à quoi Pisistrate prétendit mettre ordre.

648. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Lettres de Rancé abbé et réformateur de la Trappe recueillies et publiées par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont-Ferrand. »

Cela est vrai de l’aveu de Rancé lui-même, et il nous l’exprime à sa manière, quand il dit (lettre du 3 octobre 1675) : « Puisque vous voulez savoir des nouvelles de notre affaire, je vous dirai, quelque juste qu’elle fût, qu’elle a été jugée entièrement contre nous ; et, pour vous parler franchement, ma pensée est que l’Ordre de Cîteaux est rejeté de Dieu ; qu’étant arrivé au comble de l’iniquité, il n’étoit pas digne du bien que nous prétendions y faire, et que nous-mêmes, qui voulions en procurer le rétablissement, ne méritions pas que Dieu protégeât nos desseins ni qu’il les fît réussir. » Il revient en plusieurs endroits sur cette idée désespérée ; son jugement sur son Ordre est décisif : les ruines mêmes , s’écrie-t-il, en sont irréparables . Et que ne dirait-il pas des autres Ordres s’il se permettait également d’en juger ?

649. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mémoires de Casanova de Seingalt. Écrits par lui-même. »

Ayant fait à Padoue de suffisantes études, il revint à Venise, où il reçut du patriarche les quatre ordres mineurs. […] Aussi le jeune abbé, sous un tel maître, fut-il promptement au fait des vertus sociales, si bien qu’un jour M. de Malipiero, en finissant sa sieste plus tôt que de coutume, le trouva trop tendrement engagé dans son salon avec la jeune Thérèse, dont lui-même était épris, et dut y mettre ordre à coups de canne. […] Je te ferai plaisir en t’informant que j’ai si bien mis ordre à mes affaires que je serai pour le reste de mes jours aussi heureuse qu’il peut m’être donné de l’être, privée de toi.

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