Il semble être né exprès pour justifier le mot de Cicéron : « Summa autem laus eloquentiae est, amplificare rem ornando… Le comble et la perfection de l’éloquence, c’est d’amplifier le sujet en l’ornant et le décorant. » Il est maître unique dans ce genre d’amplification que Quintilien a défini « un certain amas de pensées et d’expressions qui conspirent à faire sentir la même chose : car, encore que ni ces pensées ni ces expressions ne s’élèvent point par degrés, cependant l’objet se trouve grossi et comme haussé par l’assemblage même ». […] « On peut quelquefois, dit Voltaire, entasser des métaphores les unes sur les autres ; mais alors il faut qu’elles soient bien distinguées, et que l’on voie toujours votre objet représenté sous des images différentes. » Et il cite un exemple de Massillon ; il aurait pu aussi bien citer celui qu’on va lire : Souvenez-vous d’où vous êtes tombé ; … remontez à la première origine de vos désordres, vous la trouverez dans les infidélités les plus légères : un sentiment de plaisir négligemment rejeté ; une occasion de péril trop fréquentée ; une liberté douteuse trop souvent prise ; des pratiques de piété omises : la source en est presque imperceptible ; le fleuve, qui en est sorti, a inondé toute la terre de votre cœur : ce fut d’abord ce petit nuage que vit Élie, et qui depuis a couvert tout le ciel de votre âme : ce fut cette pierre légère que Daniel vit descendre de la montagne, et qui, devenue ensuite une masse énorme, a renversé et brisé l’image de Dieu en vous : c’était un petit grain de sénevé, qui depuis a crû comme un grand arbre, et poussé tant de fruits de mort : ce fut un peu de levain, etc.
La note du préfet de police de Paris y est l’objet d’une discussion claire, suivie, détaillée, même élégante, le genre admis : Il y a, disait M. […] La facilité avec laquelle je travaillais m’a permis d’embrasser beaucoup d’objets à la fois, et de suffire à une assez lourde tâche ; de telle sorte que je suis peut-être redevable, en fin de compte, à mes études d’Horace et de Cicéron, du peu de succès que j’ai eu dans ma vie administrative et politique.
Ces jeunes princes, objets de tant de vœux et d’espérances et qui n’ont pas vécu, tous ceux à qui la voix du peuple comme celle du poète a pu dire : « … S’il t’est donné de vaincre les destins ennemis, tu seras Marcellus » ; ces figures inachevées que souvent l’imagination couronne, posent en passant un problème que les esprits les plus sérieux et les moins chimériques peuvent méditer au moins un instant. […] Ce que Fénelon écrit en cette année 1708 au duc de Bourgogne, il ne cessera de le répéter et de le lui faire arriver par le canal du duc de Chevreuse durant les années suivantes ; il est affecté dans sa religion de chrétien éclairé, dans sa tendresse de père nourricier et de maître, dans son patriotisme de citoyen, de voir un prince qui devrait être si cher à tous les bons Français, et dont il sait les vertus essentielles, devenu l’objet d’un dénigrement et d’un déchaînement si général.
Sous forme indirecte et à la troisième personne, il raconte sa propre vie en Angleterre, sa fuite ces jours-là loin des jardins publics, loin des promenades fréquentées, sa recherche des sentiers solitaires ; il nous initie aux plus humbles consolations de sa vie misérable, comme ferait un enfant du peuple, un Werther et un René des faubourgs2 : Lorsque la brune commence à confondre les objets, notre infortuné, dit-il, s’aventure hors de sa retraite, et, traversant en bâte les lieux fréquentés, il gagne quelque chemin solitaire où il puisse errer en liberté. […] Il ne serait pas impossible peut-être, dans une étude suivie sur Chateaubriand, de noter avec la même précision la date de quelques-uns de ses autres revirements, et celle, par exemple, de sa prochaine rechute épicurienne ; mais ce serait sortir aujourd’hui de notre objet, tout honorable à sa mémoire.
Cousin a une manière commode pour exagérer et agrandir les objets de son admiration : il abat ou abaisse ce qui est alentour. […] Sur l’ambition et sur l’honneur, il dit en face de Louis XIV tout ce qui pouvait prévenir l’idolâtrie future et prochaine dont il fut l’objet, si elle avait pu être combattue.