Cette indispensable distinction correspond essentiellement, pour le monde extérieur, à celle qu’il nous offre toujours spontanément entre les deux états corrélatifs d’existence et de mouvement ; d’où résulte, dans toute science réelle, une indifférence fondamentale entre l’appréciation statique et l’appréciation dynamique d’un sujet quelconque. […] Dès son origine, cette, crise a toujours tendu à transformer en un vaste mouvement organique le mouvement critique des cinq siècles antérieurs, en se présentant comme destinée surtout à opérer directement la régénération sociale, dont tous les préambules négatifs se trouvaient alors suffisamment accomplis. […] Étendue ensuite à l’évolution industrielle et même esthétique, mais restée trop confuse envers le mouvement social, elle tend aujourd’hui vaguement vers une systématisation décisive, qui ne peut émaner que de l’esprit positif, enfin convenablement généralisé. […] Tel est le principe spontané de l’intime connexité qui, tôt ou tard sentie, ralliera nécessairement l’instinct populaire à l’action sociale de la philosophie positive ; car cette grande transformation équivaut évidemment à celle, ci-dessus motivée par les plus hautes considérations spéculatives, du mouvement politique actuel en un simple mouvement philosophique, dont le premier et le principal résultat social consistera, en effet, à constituer solidement une active morale universelle, prescrivant à chaque agent, individuel ou collectif, les règles de conduite les plus conformes à l’harmonie fondamentale. […] Dès lors, on reconnaît aisément qu’un tel mouvement doit surtout dépendre des études astronomiques, qui, par leur nature, offrent nécessairement la pleine manifestation du véritable esprit mathématique, dont elles constituent, au fond, la principale destination.
« L’émotion esthétique a pour cause (étant admise la réalité du monde extérieur, mais comme une réalité de fiction) des différenciations de mouvement de la matière, perçues au moyen des sens. […] Le changement de direction dans le mouvement constitue la forme… « Le poète délaissant la copie du monde extérieur créera ses formes esthétiques par le dégagement de l’essentiel dans les éléments que fournit la nature.
Le développement général de l’esprit est nécessaire pour bien écrire, avant toute préparation particulière Tout revient donc là : habituer l’esprit à réfléchir, à penser sans cesse, lui donner de la pénétration : de sorte que rien ne lui soit insignifiant, que tout ce qu’il aperçoit éveille en lui quelque idée ; que ses idées soient dans un perpétuel mouvement, au lieu de se déposer dans un coin de la mémoire, pour y dormir comme de vieux papiers dans la poudre des archives ; qu’elles se heurtent, s’associent, se groupent, se multiplient par leur incessante activité ; qu’elles se renouvellent au contact des impressions récentes, s’agrandissent, se modifient. […] Mais une âme fine et philosophique qui ait senti ce que la présence de l’homme met d’intérêt dans les choses inanimées, ce que l’indifférente sérénité de la nature a de navrant, quand disparaît ce bonhomme qui allait, venait, bêchait, taillait, introduisant le mouvement, la variété, la vie, peuplant ce désert à lui seul, âme de ce petit inonde ; une imagination imbue de poésie païenne, qui exprime la tristesse de cette impassibilité même, et mette en deuil pour le vieux jardinier les fleurs éternellement belles et souriantes, peuvent seules dicter cette brève parole, où l’on entend un écho d’Homère et de Virgile.
Épilogue Il faut finir ici cette première série des Bas-bleus au xixe siècle, qui sera suivie de plusieurs autres, si le mouvement qui emporte les femmes vers la littérature, ne s’arrête pas… Et il ne s’arrêtera pas. […] Dans la plupart d’entre eux, ce mouvement n’est que l’enragement de l’orgueil et la révolte contre leurs propres facultés, qu’ils méconnaissent, et contre leur fonction sociale, dont nulle femme n’a maintenant ni le souci ni l’idée.
Avec un amour de cloporte pour la poussière, Nisard a remué celle des bibliothèques ; et ce n’a point été, comme on pourrait le croire, pour nous raconter et nous montrer le vaste mouvement littéraire du siècle auquel s’associèrent Juste Lipse, Scaliger et Casaubon, mais — ô piété de ce pieux Énée de l’annotation envers ses ancêtres ! — pour nous retracer simplement les petits mouvements de l’existence trotte-menu de chacun d’eux.