Forgues s’est mis à travailler pour elle, comme s’il eût été M. […] Son gouvernement le breveta de génie et lui mit le harnachement poétique ; mais, sous les caparaçons officiels, on reconnaissait toujours l’indigente nudité de cette majestueuse figure d’Académie, comme on dit dans les Écoles de dessin, laquelle se faisait feuille de vigne avec sa branche de faux laurier. […] Il fallait y mettre un désintéressement fier, et y rencontrer l’expression juste d’un esprit qui n’étudie plus que l’intensité de la nature humaine dans les héros.
Forgues s’est mis à travailler pour elle comme s’il eût été About. […] Son gouvernement le breveta de génie et lui mit le harnachement poétique ; mais, sous les caparaçons officiels, on reconnaissait toujours l’indigente nudité de cette majestueuse figure d’Académie, comme on dit dans les Écoles de dessin, laquelle se faisait feuille de vigne avec sa branche de faux laurier. […] Il fallait y mettre un désintéressement fier et y rencontrer l’expression juste d’un esprit qui n’étudie plus que l’intensité de la nature humaine dans les héros.
Et cela est évident, malgré la bonne contenance des mots et les ressources de la phrase, l’enthousiasme de l’éditeur, ce pompon qu’on se met sur l’oreille d’un autre, M. […] Les hommes d’esprit mettent parfois tout leur esprit à se tromper, et c’est pour cela qu’ils se trompent mieux que les bêtes… mais un éditeur ! […] Il est de la postérité qu’il a inventée ; car la postérité — nous dit-il quelque part — n’est pour lui ni à une première ni à une seconde génération : elle est à plus d’un siècle de distance de celui qu’on juge, et c’est à ce siècle de distance qu’il se met pour juger le sien.
Elles sont, en effet, le contraire de ce qu’on attendait, ces pitoyables et tristes lettres… et personne n’aura d’admiration à leur service, personne excepté MM. de Goncourt, qui phrasent de ces marivaudages sur elles : « Ces lettres de Sophie avec leur tour, leur franchise et leur premier coup, leur agrément libre et poissard, leurs larmes de si belle humeur, leur philosophie en chansons, leur coquetterie à la diable, leur esprit au petit bonheur, leurs charmes à l’aventure, leurs grâces salées… peuvent être le mets des plus délicats. » Ah ! […] Quand on est ce qu’ils sont, l’abjecte, dans Sophie Arnould, on peut ne pas la voir sous les roses de la courtisane et dans les fulgurations d’un esprit qui mit tout son siècle à feu ; mais l’imbécillité, tard venue, — mais enfin venue, — pouvait-elle échapper à qui aime tant les choses de l’esprit et se connaît tant aux choses de l’esprit ? […] … mais pour la lui donner, cette portée, il fallait se mettre au-dessus de son sujet, non pas rester à son niveau.
De donnée, l’histoire en question, attestée par ces pages, est la plus plate et la plus vulgaire des réalités ; mais ce qui la sauve de la déshonorante admiration de ceux qui, en littérature, aiment la réalité pour sa vulgarité et sa platitude mêmes, c’est l’âme qui passe sur cette réalité et qui y met un accent absolument incompréhensible aux porcs littéraires du Réalisme, qui tracassent, pour l’instant, leur fumier, avec un groin presque superbe ! […] Par lui-même, il n’est pas un philosophe, mais il est le fils et la victime de la philosophie du xixe siècle, et voilà pourquoi je le mets ici… Ce jeune homme, à qualités brillantes, qui avait eu, nous dit-il, au collège, l’éclat de tous les prix d’honneur, pour lui des espérances ! […] … Je me le suis demandé plus haut, si cela aurait été meilleur pour sa gloire, en supposant que cet infortuné ait un jour son atome de gloire, de vivre que de mourir ; si, en vivant, il aurait mis un jour au service de quelque grande conception le talent de style contracté, affiné, acéré et passé au feu de toutes les douleurs, un jour ressenties ?