/ 2302
349. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVI » pp. 413-441

Mais les amours finis, elle épargna moins les éloges au grand poète ; elle se livra au charme de ses ouvrages, à mesure que le temps de ces amours s’éloignait. […] Ce mot de reconnaissance ne peut regarder que madame de Sévigné, et les éloges qu’elle se plaisait à donner aux fables du poète, à mesure qu’elles paraissaient, surtout dans les cercles du duc de La Rochefoucauld, qui en était charme comme elle. […] Comme lui, il se dérobait à la bassesse du rôle de courtisan par une certaine familiarité avec eux mais il mit dans cette familiarité plus de réserve et de mesure.

350. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

Et lorsqu’il a dépeint la première entrée des troupes alliées dans Paris le 31 mars 1814, M. de Lamartine, montrant la curiosité succédant à la douleur à mesure qu’on avançait dans les quartiers brillants et le long des boulevards, avait dit : « Tout est spectacle pour une telle ville, même sa propre humiliation. » Quand on a écrit et pensé de telles paroles, on devrait être guéri, ce semble, du rôle de tribun, d’orateur populaire et ambitieux. […] Tous ces portraits séduisent à première vue, et offrent des traits heureux, des couleurs neuves : mais, en général, ils sont outrés et passent la mesure. […]  » Si M. de Lamartine raconte cela, il a une de ces illusions et de ces exagérations de souvenir qui lui sont familières : car il est impossible que je lui aie dit une telle chose, n’ayant jamais l’habitude de mêler ainsi le nom de Napoléon à tout et de le prendre pour mesure de mon admiration : ce serait la première fois que j’aurais usé de ce langage.

351. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

Il faut voir à la fois l’un et l’autre, afin d’être en mesure d’accroître l’un et de diminuer l’autre. […] La sympathie pour les misères humaines et pour tout ce qui touche l’humanité, la curiosité et la compassion pour les races lointaines opprimées, persécutées, l’horreur pour tout ce qui fait souffrir inutilement les hommes, le scrupule dans le choix et la mesure des peines, tels sont les traits les plus nobles et les plus relevés des sociétés démocratiques. […] Il faut donc louer Tocqueville précisément à cause de la généralité de ses vues, qui ne nous enchaînent pas à telle application plutôt qu’à telle autre, et qui, mettant à notre disposition des principes excellents, nous laissent libres de juger de la mesure et des moyens de l’exécution.

352. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Un symbole »

. — Il sera procédé aux mesures prescrites par les titres ii et suivants de la loi du 3 mai 1841 aussitôt après la promulgation de la présente loi. » Après cette consécration définitive de « l’exvoto de la France », le terrain fut acheté, le plan choisi au concours, et les travaux commencèrent. […] Jean Brunet — avec un sens opposé à celui que je lui donne — au cours de la discussion du projet de loi, je dis : « C’est un culte spécial et le fonctionnaire principal de ce culte qui prennent l’initiative de la mesure et qui viennent vous dire, à vous, Assemblée nationale : Sanctionnez ce que nous vous proposons et appliquez-y à notre profit l’autorité légale et supérieure de la France », — je demande si l’État peut, sans commettre la plus coupable des folies, sanctionner ce culte spécial, lui qui n’en propose aucun par son principe même. […] Et comme depuis le commencement du siècle, l’Église est soumise en une certaine mesure à l’État, nous tenterons par tous les moyens de reconquérir l’ancienne et totale toute-puissance. » Tel est le calcul dans son édifiante simplicité.

353. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

En vain je m’attachais à ces croyances dernières comme un naufragé aux débris de son navire ; en vain, épouvanté du vide inconnu dans lequel j’allais flotter, je me rejetais pour la dernière fois avec elles vers mon enfance, ma famille, mon pays, tout ce qui m’était cher et sacré ; l’inflexible courant de ma pensée était plus fort : parents, famille, souvenirs, croyances, il m’obligeait à tout laisser ; l’examen se poursuivait, plus obstiné et plus sévère à mesure qu’il approchait du terme, et il ne s’arrêta que quand il l’eut atteint. […] Cousin avait examiné devant lui l’origine des idées et quelques points de psychologie : c’en fut assez ; sorti de l’école, il se mit au travail, « dévoré de l’ardeur de la science, de la foi en lui-même », jetant les livres, trouvant la psychologie à mesure qu’il l’enseignait. […] Pour nous arracher aux distractions du dehors et aux intérêts sensibles, il faut des idées enflammées et dévorantes ; la force des résistances qu’elles surmontent mesure la force d’obsession qu’elles possèdent ; d’un homme elles font un moine ; et quand volontairement un laïque aujourd’hui se fait moine, c’est qu’il le veut de tout son cœur.

/ 2302