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342. (1892) Boileau « Chapitre II. La poésie de Boileau » pp. 44-72

Ces chantres agenouillés qui enragent, ou fuyant éperdus la main qui les bénit, cela est vrai d’une vérité si spéciale et si propre, que notre meilleur peintre de la vie ecclésiastique l’a repris dans un de ses chefs-d’œuvre : rappelez-vous l’abbé Tigrane en présence de son évêque. […] Et nul doute que Boileau dans tout cet ouvrage ne se montre meilleur artiste que conteur. […] Il s’est échappé à dire que c’étaient là ses meilleurs vers, sans se douter que jamais il ne s’était plus écarté de son vrai génie. […] La meilleure édition de Boileau est encore celle de Berriat-Saint-Prix (4 vol. in-8º, 1830-1837), en attendant celle que la Collection des Grands Écrivains de la France devra comprendre — Quant aux travaux consacrés à Boileau, il suffira de signaler : Sainte-Beuve, Port-Royal, surtout t. 

343. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

En 1500 paraissent à Paris les Adages d’Érasme ; c’est toute la lumière de l’antiquité qui se répand à flots sur le monde : dans ce petit livre est ramassée la quintessence de la sagesse ancienne, la fleur de la raison d’Athènes et de Rome, tout ce que la pensée humaine suivant sa droite et naturelle voie peut trouver de meilleur et de plus substantiel, avec cette forme exquise et simple qui s’était perdue depuis tant de siècles. […] Quelques vers au début d’une de ses meilleures pièces expriment très bien le vœu de son esprit et le vœu de son cœur167 : 1re Fille. — Tout le plaisir et le contentement Que peut avoir un gentil cœur honnête, C’est liberté de corps, d’entendement, Qui rend heureux tout homme, oiseau, ou bête ! […] Il était naturel que sa prose fût de meilleure qualité que ses vers : quand il s’agissait de conter et de causer, cette intelligente femme n’avait pas besoin d’être écrivain pour écrire excellemment. […] Heureusement, si son éducation le rattachait aux Molinet et, aux Crétin, son tempérament le tournait vers les Jean de Meung, les Villon, les Coquillart : il porta dans la poésie aristocratique les meilleurs dons de la poésie bourgeoise.

344. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Même aventure arrive à Pauline : Sévère longtemps a été tout ce qu’elle connaissait de meilleur ; elle l’aimait donc plus que tout. […] La structure de ses meilleures pièces est remarquable : tant les forces, qui sont en présence, sont exactement opposées, se contrepèsent, se composent, se dévient, s’annulent, s’entraînent, avec une sûreté de calcul qui est prodigieuse. […] Mais Du Ryer, Tristan, Rotrou ont vraiment du talent : il est à noter pourtant que toutes leurs meilleures pièces sont postérieures au Cid. […] Dans quelques parties de ses deux chefs-d’œuvre tragiques et dans quelques endroits de ses meilleures tragi-comédies, comme Don Bernard de Cabrère (1648) ou Laure persécutée (1637)329, il nous fait penser à Shakespeare : il est le seul en son siècle de qui on puisse le dire.

345. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre douzième. »

La Bruyère ne veut ni nous désespérer, ni nous réduire à l’alternative d’être des intrigants ou des saints ; il veut nous rendre meilleurs dans notre imperfection, et il nous aide par une morale appropriée à nos forces. […] Cette morale, que l’esprit chrétien a d’ailleurs élevée et épurée, ne prétend donner qu’un fonds de préceptes applicables à tous les temps comme à tous les pays, qui fassent faire à l’homme le meilleur usage de sa raison et rendent plus heureuse la vie présente. […] Pourvu qu’il réussisse, soit à nous amuser aux dépens des autres, soit à nous rendre plus curieux de nous-mêmes, peu lui importe que nous devenions meilleurs ou qu’il suscite dans notre conscience un trouble salutaire. […] Quelqu’un prendra ces procédés à La Bruyère, et, par un meilleur emploi, se les rendra propres, en les appliquant à des choses durables.

346. (1890) L’avenir de la science « II »

De là ce fier caractère d’audace contre les dieux que portent les premiers inventeurs ; de là ce thème développé dans tant de légendes mythologiques : que le désir d’un meilleur état est la source de tout le mal dans le monde. […] Puis il a essayé de reconstruire l’édifice sur de meilleures proportions, mais sans y réussir ; car le vieux temple élevé par l’humanité avait de merveilleuses finesses, qu’on n’avait pas d’abord aperçues et que les modernes ingénieurs avec toute leur géométrie ne savent point ménager. […] Il y a de meilleures raisons pour soutenir qu’une noblesse privilégiée est de l’essence de toute société que pour soutenir qu’une aristocratie pécuniaire lui est nécessaire. […] Il n’est pas plus attentatoire de dire qu’on peut améliorer la société qu’il ne l’est de dire qu’on peut souhaiter un meilleur gouvernement que celui du schah de Perse.

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