Venons-en à son chef-d’œuvre, la Métromanie, pour laquelle il se départit de sa roideur absolue, et par où il a bien mérité du théâtre et de la haute littérature (janvier 1738). […] Gœthe, très au fait de cette partie de notre littérature, a dit, à ce propos, avec bien de la justesse : « Jamais Piron ne put démentir sa nature indisciplinée ; ses vives saillies, ses épigrammes mordantes, l’esprit et la gaîté qui toujours étaient à ses ordres, lui donnèrent une telle valeur aux yeux de ses contemporains qu’il put, sans paraître ridicule, se comparer à Voltaire, qui lui était pourtant si supérieur, et se poser, non pas seulement comme son adversaire, mais comme son rival. » Et les premiers traducteurs de Gœthe, renchérissant sur sa pensée et jaloux de la compléter, ajoutent assez spirituellement et par une image qu’il n’eût point démentie : « Comme il était le Voltaire du moment, on l’excusait de se mettre en parallèle avec le Voltaire des siècles. […] Le parallèle entre Voltaire et Piron était donc à l’ordre du jour parmi les contemporains, mais dans la petite littérature seulement. […] J’ai eu, en m’y mettant, à surmonter mon préjugé à moi-même, et à vaincre une certaine répugnance intime ; mais, après tout, c’est une figure inévitable dans l’histoire de notre littérature ; il avait droit à l’étude. […] Cette littérature stercoraire n’est nullement notre fait.
Oui, j’en serais persuadé depuis quinze jours si je ne l’avais été déjà auparavant, la critique impersonnelle est le vrai ; et « l’application de la doctrine évolutive à l’histoire de la littérature et de l’art » est presque seule « capable de communiquer au jugement critique une valeur vraiment objective »5. […] À considérer dans quel rapport numérique sont les œuvres significatives et durables avec celles (souvent charmantes) que négligeront les historiens de la littérature, on voit que cette critique écrite sur le sable ne convient pas mal à des comédies dont si peu paraîtront un jour gravées sur l’airain. […] De retour à Saint-Étienne, elle laisse échapper, dans une conversation avec son amant, le secret de son voyage à Paris ; comprend, à la colère de Dufresne, que c’est, au fond, sa femme qu’il aime ; éclate en imprécations forcenées, et le chasse. — Cinq ou six ans après, Zaza est devenue une étoile de café-concert de la plus haute distinction, de celles qui portent l’esprit français à travers le monde, qui ont les appointements de vingt généraux de division, qui envoient des lettres aux journaux et qui ont des opinions sur la littérature. […] Pierre Berton et Charles Simon, c’est que l’amour de Zaza est bien, dans son fond, « la grande passion », celle qui s’ennoblit, à ce qu’on assure, par « le désintéressement » et la souffrance, mais que cette passion, égale en « dignité » à celle des amoureuses tragiques de la plus haute littérature, s’exprime ici de la façon la plus bassement vulgaire, et, tranchons le mot, la plus canaille. […] … Il détesta, ou, mieux, il ignora les poésies et les littératures, car il avait horreur de toutes les exagérations, étant un homme précis et régulier… Et si les spectacles de la misère humaine ne lui inspirèrent jamais que le dégoût, en revanche, les spectacles de la nature ne lui suggérèrent jamais rien… » Je cite pour ma démonstration, mais pour mon plaisir aussi, car toute cette oraison funèbre du bourgeois est, en soi, un bon morceau de rhétorique.
Il suppose l’unité de l’art du Midi de l’Europe, qui a trouvé sa plus haute expression dans la littérature française. […] Toutefois, la plus méchante de ces commères habite dans notre propre cœur, et à toute occasion elle cherche à donner de l’air à ses griefs, ses sentimentalités et autre littérature. […] Le chef-d’œuvre de la littérature moderne, Hamlet, est un roman d’aventures. […] Sensibilité extrême et manque d’équilibre moral, voilà, à mes yeux, le caractère de l’état présent de la littérature. […] Il y a un motif favori dans la littérature contemporaine, sur lequel tous les auteurs de haut ou de bas étage jouent aujourd’hui leurs variations ; et ce motif c’est la pitié.
En religion, en politique, en astronomie, il a prouvé de reste que l’invention ne lui manquait pas ; en littérature, il n’a pas moins tenté, et d’assez admirables monuments sont debout encore pour attester, dans leur rudesse première, ce qu’il a osé et ce qu’il a pu.
Il nous paraît avoir mieux saisi notre littérature vivante et en avoir exprimé quelques traits avec bonheur.