Dix années de roman français Il serait assez téméraire de prétendre offrir, dès aujourd’hui, aux lecteurs de la Revue, l’esquisse complète et détaillée de l’histoire du roman français au cours des dix dernières années. […] Si ses excès ont fatigué les lecteurs qui veulent surtout trouver dans le récit imaginatif un divertissement, l’influence de ses promoteurs demeure plus actuelle et plus durable, aujourd’hui même, que l’action déjà étrangement caduque des naturalistes exagérés. […] N’est-ce pas la réaction provoquée par lui qui a réintégré dans le roman le souci du sentiment poétique et l’élégance qui substitue à la crudité des termes certaine préoccupation cérébrale désormais muée en ironie, — une ironie que nous apprécions d’autant plus qu’elle éloigne l’écrivain comme le lecteur des bassesses recherchées autrefois ? […] Nous n’avons pas à rappeler aux lecteurs de la Revue les beautés du récit et la magnificence de son cadre ; il importe pourtant de faire admirer l’enthousiasme et l’éternelle jeunesse de cœur qui brûle, comme un feu mystérieux, sous la conception de l’artiste. […] Mais il y avait, en outre, dans le tempérament de ce délicat et laborieux écrivain, une sève romanesque qui s’est heureusement répandue en des œuvres idéalistes très remarquables comme l’Obstacle, Un remords, Constance, Jacqueline, Tony, À Trianon et surtout Au-dessus de l’abîme, dont le souvenir est demeuré, je n’en doute point, très présent aux lecteurs de la Revue.
On ne peut même dire de lui à present ce que Boileau en disoit de son temps, Et jusqu’à d’Assoucy, tout trouva des Lecteurs.
Il a cru sans doute pouvoir se borner au soin d’instruire son Lecteur ; mais pour instruire, il faut commencer par se faire lire, & c’est à quoi n’a pas songé ce diffus Compilateur.
Sa Traduction en Vers François des Odes d’Anacréon & de Sapho, des Idylles de Moschus, de Bion & de Théocrite, est au dessous de l’attention d’un Lecteur délicat, qui cependant n’en doit pas mépriser les remarques.
On dira peut-être que ces sortes de Productions ne supposent pas de grands talens ; mais on ne pourra disconvenir qu’elles n’annoncent au moins du savoir, du discernement, & du zele pour le progrès des Lettres ; qualités qui le rendent plus digne d’éloges, que tant de Compilations indigestes & rebutantes, enfantées par l’incurable manie de faire gémir la presse & le Lecteur.