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1433. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « UNE RUELLE POÉTIQUE SOUS LOUIS XIV » pp. 358-381

Des réclamations trop vives pour les appointements de son mari la firent jeter en prison : elle y resta huit mois. […] Voltaire, si plein de tact en courant quand il est désintéressé, nous indique du doigt, dans son Temple du Goût, « le doux mais faible Pavillon, faisant sa cour humblement à Mme Des Houlières, qui est placée fort au-dessus de lui. » Pour revenir à l’école même qu’elle représente, et que nous avons montrée un peu jetée de côté dans le dix septième siècle, il semble qu’elle ait eu sa revanche au dix-huitième ; je veux dire que, même sans qu’on s’en rendît compte, cette manière avant tout spirituelle, métaphysique, moraliste et à la fois pomponnée, de faire des vers prévalut et marqua désormais au front la poésie du siècle, avec quelques différences de rubans et de nœuds seulement.

1434. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — I »

Ce passage est assez peu connu, et jette assez de jour dans l’âme de Racine, pour devoir être cité tout au long : « Il y a ici une demoiselle fort bien faite et d’une taille fort avantageuse. […] Il est à regretter qu’il n’ait pas poussé plus loin cette espèce de composition religieuse, et que, dans les huit dernières années qui suivirent Athalie, il n’ait pas fini par jeter avec originalité quelques-uns des sentiments personnels, tendres, passionnés, fervents, que recelait son cœur.

1435. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Bayle, autrement favorisé et pétri selon un plus doux mélange, se trouva, dès sa première flamme jetée, une nature tout aussitôt réduite et consommée, et à partir de là il ne perdit plus jamais son équilibre. […] Il avertit en un endroit son frère cadet qu’il lui parle des livres sans aucun égard à la bonté ou à l’utilité qu’on en peut tirer : « Et ce qui me détermine à vous en faire mention est uniquement qu’ils sont nouveaux, ou que je les ai lus, ou que j’en ai ouï parler. » Bayle ne peut s’empêcher de faire ainsi ; il s’en plaint, il s’en blâme, et retombe toujours : « Le dernier livre que je vois, écrit-il de Genève à son frère, est celui que je préfère à tous les autres. » Langues, philosophie, histoire, antiquité, géographie, livres galants, il se jette à tout, selon que ces diverses matières lui sont offertes : « D’où que cela procède, il est certain que jamais amant volage n’a plus souvent changé de maîtresse, que moi de livres. » Il attribue ces échappées de son esprit à quelque manque de discipline dans son éducation : « Je ne songe jamais à la manière dont j’ai été conduit dans mes études, que les larmes ne m’en viennent aux yeux.

1436. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Ce qui permet aux guerriers de jeter quelque dédain sur les hommes de lettres, c’est que leurs talents ne sont pas toujours réunis à la force et à la vérité du caractère. […] Nous, que le hasard de la vie a jetés dans l’époque d’une révolution, nous devons aux générations futures la connaissance intime de ces secrets de l’âme, de ces consolations inattendues, dont la nature conservatrice s’est servie pour nous aider à traverser l’existence.

1437. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre premier. De l’illusion » pp. 3-31

Si, sur une larve de grenouille, vous séparez la queue et que vous jetiez cette queue dans l’eau, elle s’organise et se développe jusqu’au dixième jour, comme si elle fût restée à sa première place1. […] Écartez l’un de l’autre les coins de la bouche, il devient gai aussitôt ; tirez les sourcils l’un vers l’autre et vers le bas, aussitôt il devient grognon et triste ; et parfois, au réveil, il peut témoigner des émotions insurmontables dans lesquelles l’ascendant de l’attitude l’a jeté et enchaîné.

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