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1229. (1902) La poésie nouvelle

Or, il y avait une philosophie plus juste dans les émerveillements et la terreur que la contemplation des choses inspirait aux premiers hommes. […] Les Chansons d‘Amant ne s’inspirent pas d’un amour, mais de l’amour lui-même, non dans l’abstrait sans doute, mais délivré des contingences qui le pourraient modifier et dénaturer.‌ […] Il s’est inspiré de Virgile et de Dante, mais, moins austère que ses maîtres, plus compatissant et plus attendri, il n’a pas craint de laisser au puéril fantôme sa coquetterie et sa légèreté. […] Une philosophie très pure inspire ces « élévations », sublimes parfois de détachement. […] Cette notion aristocratique de l’Art ne le conduit, du reste, pas à de l’Alexandrinisme : il s’inspire trop directement de la vie et il la veut trop largement exprimer pour se confiner dans une étroite esthétique d’initiés.

1230. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

On n’a pas tout à fait rompu avec le Roman de la Rose ; on s’inspire encore de cette mythologie raffinée, alambiquée, mais ingénieuse. […] — « Monsieur, monsieur, repartit Malherbe, cela ne vous doit pas affliger : ne vous souciez que de bien servir, vous ne manquerez jamais de maître. » Les odes de Malherbe, qui sont inspirées de l’esprit de Henri IV et, en quelque sorte, marquées à son empreinte, à l’effigie de sa politique, sont les plus belles, les plus durables, en ce qu’elles ont été aussi les plus Françaises ; j’y comprends des odes même composées après la mort du grand roi. […] Alfred de Musset semble s’être inspiré de cette douceur d’harmonie dans ses beaux vers sur Fontainebleau, et ce Souvenir de lui, si plein de tendresse, est précisément dans le même rhythme que les Stances de Malherbe150.

1231. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mademoiselle Aïssé »

Je soupçonne fort que vos conseils, et peut-être le procédé d’une autre personne, lui ont inspiré un goût pour la campagne, que je tâcherais de cultiver, si j’avais quelques années de moins. »— Quel est ce procédé ? […] Ils changeraient bien leur prétendu bonheur contre vos infortunes. » Un trait bien honorable pour Mlle Aïssé, c’est l’antipathie violente et comme instinctive qu’elle inspirait à Mme de Tencin. […] Je jure que je n’ai pas cessé un moment de vous être uniquement attaché : vous n’avez pas à la tête un cheveu qui ne m’inspire plus de goût et de sentiment que toutes les femmes du monde ensemble, et je vous permets de le dire et de le lire à qui vous voudrez. » (1746.)

1232. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Quelquefois c’est une romance plaintive qui s’échappe, ou bien quelque élégie inspirée par le sentiment, et qui me rappelle sans trop d’infériorité la belle pièce de Parny sur l’ absence . […] Ou bien c’est un sentiment qui se prononce et qui bientôt demande et inspire une expression poétique et musicale ; peut-être un air connu, dans un secret accord avec sa disposition présente, vient comme par hasard errer sur ses lèvres et lui dicte un refrain qui semble traduire la note par la parole ; parfois enfin quelques mots fortuitement rassemblés, qui représentent une image, qui forment un vers, lui viennent à l’esprit, et bientôt rappellent un air qui les relève et les anime. […] Qu’il nous soit permis d’apporter ici, à l’appui de notre opinion, un exemple que nous ne saurions nous empêcher de trouver fort remarquable ; c’est le petit écrit qu’a inspiré à un jeune homme la lecture de l’ouvrage de Mme de Staël ; sans doute les semences que contient cet ouvrage trouveront rarement une terre aussi promptement, aussi richement féconde.

1233. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Il avait cédé, jusqu’au vote à mort contre l’infortuné Louis XVI, à la terreur que lui inspirait la Montagne ; il avait donné une tête royale pour sauver la sienne ; il se taisait pour qu’on lui pardonnât de vivre. […] Mais, quelle que soit la faveur que les exploits, les disgrâces de Moreau inspirent jusque-là pour ce Scipion de la République, on ne peut contester la justesse et la vigueur du jugement de M.  […] À côté d’un jeune homme qui connaissait la guerre, mais qui ignorait la diplomatie, M. de Talleyrand était plus fait pour inspirer que pour servir.

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