L’impression que produit sur cette classe de personnages la situation des personnages principaux m’a paru souvent ajouter à celle qu’en reçoivent les spectateurs proprement dits. […] La force de ce talisman n’existe plus. » Le spectateur, qui sait que le poignard est suspendu sur la tête du héros, reçoit une impression très-profonde de ce présage que Wallstein méconnaît, et des paroles qui lui échappent, sans qu’il les comprenne. […] Dans les deux cas, le poëte reparaît, pour ainsi dire, en avant des personnages, et il y a une espèce de prologue ou de préface sous-entendue, qui nuit à la continuité de l’impression. […] En ne peignant qu’une passion, au lieu d’embrasser tout un caractère individuel, on obtient des effets plus constamment tragiques, parce que les caractères individuels, toujours mélangés, nuisent à l’unité de l’impression. […] Thécla n’est point une jeune fille ordinaire, partagée entre l’inclination qu’elle ressent pour un jeune homme et sa soumission envers son père ; déguisant ou contenant le sentiment qui la domine, jusqu’à ce qu’elle ait obtenu le consentement de celui qui a le droit de disposer de sa main ; effrayée des obstacles qui menacent son bonheur ; enfin, éprouvant elle-même et donnant au spectateur une impression d’incertitude sur le résultat de son amour, et sur le parti qu’elle prendra si elle est trompée dans ses espérances.
Il ne peut se soustraire à l’afflux des impressions qui viennent de toutes parts. […] Voir avec des yeux de huit, de dix, de douze ans, le soleil se lever sur le même paysage, aussi familier bientôt que l’âme maternelle ; s’attrister ou se réjouir de la venue des saisons ; sentir en soi grandir la joie ou la plainte dont elles sont faites, et avoir l’impression si ennoblissante et si vraie qu’on est tout petit dans un monde bien grand, mais que ce tout petit est l’écho intelligent de cette immensité, quelle bonne école primaire ! […] Au printemps dernier, je voyageais en Tunisie avec la caravane que dirigeait le Résident général de France, et je me rappelle l’impression de limpidité que me laissa le crépuscule, un jour que nous approchions du village de Téboursouk. […] Lorsque nous sommes en présence d’un spectacle, même le plus admirable, du paysage de la plaine de Grenade, je suppose, ou du Bosphore, ou des ruines de Taormina, ou de tel autre, nous n’en recevons pas une impression détaillée, qui ne peut s’exprimer qu’en une feuille d’imprimerie, mais bien une surprise émue, un coup, une envie de pleurer ou de nous écrier : « Comme c’est beau ! […] Lorsqu’on achève de le lire, et surtout de le relire, l’impression qui domine, c’est, avec beaucoup de sympathie pour l’auteur et d’admiration pour le livre, une sorte d’indignation contre ceux qui, en 1862, n’ont pas compris et n’ont pas aimé Dominique.
Les impressions faites par les objets sur le cerveau y demeurent, comme des images sur une plaque sensibilisée ou des phonogrammes sur des disques phonographiques ; de même que le disque répète la mélodie quand on fait fonctionner l’appareil, ainsi le cerveau ressuscite le souvenir quand l’ébranlement voulu se produit au point où l’impression est déposée. […] Or, il n’est pas douteux que nous nous sentions libres, que telle soit notre impression immédiate. […] Nous parlions tout à l’heure de clichés, de phonogrammes : telles sont les comparaisons qu’on trouve dans toutes les explications cérébrales de la mémoire ; les impressions faites par des objets extérieurs subsisteraient dans le cerveau, comme sur la plaque sensibilisée ou sur le disque phonographique. […] Si vraiment mon souvenir visuel d’un objet, par exemple, était une impression laissée par cet objet sur mon cerveau, je n’aurais jamais le souvenir d’un objet, j’en aurais des milliers, j’en aurais des millions ; car l’objet le plus simple et le plus stable change de forme, de dimension, de nuance, selon le point d’où je l’aperçois : à moins donc que je me condamne à une fixité absolue en le regardant, à moins que mon œil s’immobilise dans son orbite, des images innombrables, nullement superposables, se dessineront tour à tour sur ma rétine et se transmettront à mon cerveau.
Foâ 92, regrettent souvent que la traite n’existe plus. » Montesquieu avait donc raison : « Ils ont le nez si écrasé qu’il est presque impossible de les plaindre. » Ainsi, souvent, l’impression que produit sur nous l’aspect physique des hommes gouverne le jugement que nous portons sur leur valeur ; nous classons les gens « sur la mine ». […] Qu’on jette les docteurs de l’égalité au milieu d’êtres totalement différents d’eux par les idées, les mœurs, la conformation anatomique elle-même, et l’on verra ce que deviendra, sous l’assaut des sentiments éveillés par de telles impressions, leur idée générale des droits de l’humanité ! […] Or les voyageurs ne sont-ils pas d’accord pour noter l’impression d’uniformité que leur donne le spectacle d’une foule de primitifs ? On l’a souvent répété : « Qui a vu un Indien les a tous vus133. » — Sans doute, mais ne sait-on pas aussi combien il faut se défier de ces sortes d’impressions, et que, pour un étranger, les différences entre les représentants d’un même type ne deviennent appréciables qu’à la longue ? […] D’une visite à ces sociétés auxquelles Tocqueville demandait le modèle de la démocratie, l’un rapportera l’impression que tous les éléments d’une foule américaine se rassemblent145, l’autre que chaque Américain a son régime, ses idées, ses goûts propres146.
gout se dit au propre du sens par lequel nous recevons les impressions des saveurs. […] Les organes, acoutumés à une telle impression, en sont flatés de telle sorte, qu’une impression diférente ou contraire les aflige, ainsi malgré l’examen et les discussions, nous continuons souvent à admirer ce qu’on nous a fait admirer dans les premières années de notre vie ; et delà peut-être les deux partis, l’un des anciens, l’autre des modernes. […] Les abstractions ou idées abstraites suposent les impressions particulières des objets, et la méditation, c’est-à-dire, les réfléxions que nous fesons naturèlement sur ces impressions. […] Ce qui a surtout doné lieu aux idées abstraites, c’est l’uniformité des impressions qui ont été excitées dans notre cerveau par des objets diférens et pourtant semblables en un certain point : les homes ont inventé des mots particuliers pour exprimer cette ressemblance, cette uniformité d’impression dont ils se sont formé une idée abstraite. […] Tous les objets qui nous environent et dont nous recevons des impressions, sont autant d’êtres particuliers que les philosophes apèlent des individus.