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613. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Il aurait eu besoin, je le répète, d’une révolution (ne fût-ce que d’une Fronde comme en vit Pascal) pour lui rafraîchir l’idée de la réalité humaine, cette idée qui se recouvre si aisément durant les temps calmes et civilisés. […] Montesquieu a tellement vécu en idée parmi ces Romains, qu’il a sur eux un avis, une impression directe, personnelle, qui se produit parfois d’une manière assez naïve. […]  » Partout, à ces beaux endroits si souvent cités, on sent l’homme qui désire la liberté véritable, la véritable vertu du citoyen, toutes choses dont il n’avait vu nulle part l’image parfaite chez les modernes, et dont il achevait de se former l’idée dans l’étude du cabinet et devant les bustes des anciens. […] L’Esprit des lois, à peine publié, excita de grandes clameurs qui n’étaient que le signal de la révolution qu’il allait produire dans les idées. […] Vous pensez que vous n’humiliez personne, et vous humiliez tout le monde ; et, quand je vous compare dans mon idée avec ces hommes absolus que je vois partout, je les précipite de leur tribunal, et je les mets à vos pieds.

614. (1716) Réflexions sur la critique pp. 1-296

Cette ode renferme l’idée générale de mon discours et de mon poëme. […] Voilà une belle idée de la justice divine. […] Qui nous révelera les idées accessoires qu’elles réveilloient ? […] de la poësie. éclaircissons un peu, s’il est possible, les idées qu’on doit avoir de la poësie. […] Je vais m’éxaminer moi-même selon cette idée, et je commence par le fonds des choses.

615. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Mais, si elles sont si intéressantes, que ne prenait-il note de ces idées pour notre plaisir et notre instruction ? […] Cette critique se compose d’idées particulières et d’idées générales. […] Richter a trouvé une fort belle métaphore pour rendre la même idée. […] Mon esprit flottait dans le vague, des idées générales, et il m’était impossible de le fixer sur un point particulier. […] On croirait vraiment que le poète échappe à la loi de l’association des idées ; à coup sûr, il n’a pas fait de plan.

616. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VII. La littérature française et les étrangers »

La littérature du temps de la reine Anne, avec Addison, Pope, Dryden, est gagnée aux idées d’ordre, de méthode, de raison, d’imitation fidèle et correcte de la nature, qui sont les caractères sensibles de nos œuvres classiques. […] Dans le progrès des idées, ce chassé-croisé ne semble pas se produire. […] L’idée de la liberté anglaise devient un lieu commun de l’opinion publique ; le type de l’Anglais franc, indépendant, original jusqu’à l’excentricité, devient un type banal du théâtre et du roman. […] Wieland porte dans toutes ses œuvres et toute sa vie l’empreinte profonde des idées et de l’esprit français. […] Elle aime les idées de Diderot, de Voltaire, leur esprit, leur style.

617. (1888) Demain : questions d’esthétique pp. 5-30

Je vous remercie de la courtoisie du fait et des termes, sans prendre pour moi les ironies légères qui relèvent votre prose, et qui vous sont un moyen facile et louable de faire agréer du « Grand Public » certaines idées dont la gravité l’effaroucherait si elle ne se masquait de sourire. […] Et que le mode d’improvisation, d’art spontané, d’idées unies, claires et clairement offertes, ait dû être la norme de l’époque primitive, je ne le nie point : mais qu’on m’accorde, à cette heure tardive, toutes les lâches aisées étant faites, les fleurs des religions et des légendes étant cueillies, le clair des passions étant déduit, que pour des’entreprises moins simples et moins courtes des procédés plus lents et plus sûrs s’imposent et que licence peut être prise par l’artiste d’exiger du lecteur bénévole une sérieuse, une patiente attention. […] Il me semble qu’à grands traits l’histoire de la littérature moderne pourrait se résumer de la sorte que voici : À la grande différence des païens, pour qui la Forme, sans proscrire l’Idée, la primait, pour les modernes l’Idée, ou plutôt l’Ame Spirituelle, est l’objet principal de l’œuvre littéraire. […] Sans rien oublier des conquêtes naturalistes et romantiques, ceux qui viendront, pour mettre une âme dans un corps agissant, retourneront aux traditions spirituelles et classiques, avec cette importante nuance ; qu’ils sauront que le temps des idées générales est passé  Mais ici deux questions se dressent, une question de fond et une question de forme (comme on disait très jadis). D’abord l’art, en toutes ses manifestations, est essentiellement « l’aspect en beauté » des idées religieuses d’une race et d’une époque vivantes.

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