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387. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Nièces de Mazarin » pp. 137-156

En groupant toutes ces têtes de femmes autour du beau visage du cardinal Jules, en l’entourant de cette guirlande de fleurs humaines, il nous a éclairé d’un reflet velouté qui nous les achève les traits charmants de ce ministre de la souplesse, de la grâce insinuante et de la flatterie, qui régna sur la France par une femme, et dont la politique fut la force dans la douceur. […] Grâce à cette manière d’administrer, il se débarrassa en partie de cette immense fortune dont sa conscience était accablée. » Une telle page, que nous n’avons pas voulu mutiler et qui n’est pas la seule (il y en a plus de sept dans ces sept nièces de Mazarin !) […] Tous ceux qui voudront ajouter à leurs notions sur le grand siècle devront consulter cet ouvrage, où l’érudition brille et fourmille sous les douces lueurs d’un esprit qui a les grâces que donne la vie, et qui est, comme toutes les supériorités expérimentées, tout à la fois désabusé et charmant.

388. (1887) George Sand

Ce fut un succès de grâce renaissante. […] Je n’insisterai pas, je veux seulement indiquer la note qui domine dans cette étrange action de grâces. […] Il y a sur quelques-uns d’entre eux l’impérissable rayon de la grâce idéale. […] Quand par hasard il lui arrive de conserver l’unité de l’œuvre, c’est à son insu et comme par un coup de la grâce. […] C’est une idée chère à l’auteur, et qu’elle reprendra souvent, jamais avec autant de bonheur et de grâce.

389. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

Nous y reconnaissons la tradition d’une des qualités les plus goûtées de notre littérature, la grâce, dont La Fontaine a dit, comme s’il eût voulu se peindre lui-même : Et la grâce, plus belle encor que la beauté. […] La grâce d’un bon nombre de traits n’est que dans le bégaiement de cette langue, et c’est une illusion de croire qu’une pensée est aussi près de l’âme que le mot qui l’exprime est près de sa source. […] Après Socrate, Héraclite, Diogène, nous verrons Juvénal, Horace Qui tant ot (eut) de sens et de grâce ; vers à noter pour la justesse de l’éloge, à une époque où Lucain surpassait Virgile, et Sénèque Cicéron. […] Les premiers demandent grâce pour sa jeunesse, pour son érudition, « telle, disent-ils, qu’il n’est personne qui puisse lui être comparé dans la langue française. » Quelques-uns prétendent qu’on se trompe sur ses intentions ; que, sous cette prétendue licence de langage, se cache un profond esprit de pénitence ; d’autres l’approuvent énergiquement d’avoir dit la vérité à tout le monde, nobles, gens d’Église, peuple. […] On se souvient de ce qu’il a dit de la grâce et du sel d’Horace.

390. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

., Montesquieu mêle avec grâce ce qu’il sait du cœur humain, ce qu’il a vu des mœurs parisiennes, ce que l’histoire lui a appris du caractère français jusque dans les Gaulois du temps de César. […] Il imite tous les vices du lieu : il vend les grâces, il oublie ses amis, il désavoue ses parents, il est vénal et ingrat. […] Favori, il avait vendu les grâces ; serviteur utile et capable, il partage avec ses amis la récompense de son travail. […] Il a de notre pays, avec ses qualités aimables, certains défauts dont nous ne sommes guère moins fiers que de ces qualités ; entre autres, la vanité, dont les étrangers nous accusent presque d’un ton d’envie, à cause des grâces qui la tempèrent. […] Quelle bonne grâce aurais-je à ne pas compter parmi les mérites de ce livre le bien que j’en ai reçu ?

391. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1868 » pp. 185-249

* * * — La politesse est à la fois la fille de la grâce française et du génie jésuite. […] C’est le type, dans la disgrâce physique, de la grâce morale ; il y a chez cet apôtre du doute, la haute et intelligente amabilité d’un prêtre de la science. […] Il a osé des choses monstrueuses, mais en les sauvant, avec ces atténuations de la voix, cette grâce légère de la langue, que possède ce gros homme, si délicat causeur. […] Mais laissons là les grâces pendule-Empire de son style. […] … Et cela relevé de tant de grâce mélancolique et malade et de bouffonnante ironie : du Falstaff et du Mercutio mêlés.

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