La délicatesse est dans le mécanisme intellectuel et à la surface des manières : le tempérament reste robuste, ardent, grossier, largement, rudement jovial, d’une gaieté sans mièvrerie, où la sensation physique et même animale a encore une forte part. […] Je veux bien qu on ne porte pas à son compte l’athéisme scientifique, singulièrement grave et fort, de don Juan, quoique, malgré tout, on ait peine à concilier le choix de Sganarelle, comme défenseur de Dieu et de la religion, avec un respect sincère de ces choses. […] Elle s’est formée elle-même, hors de l’influence d’une mère ; et notez que Léonor et Ansélique sont orphelines : leur éducation les a donc faites fortes plutôt que tendres391. […] Henriette, c’est la prose, mais quelle forte et claire et charmante prose ! […] 402 » Toute la pièce est écrite dans ce ton, avec une verve âpre et triste, en sorte que l’on a peine à rire dans cet enchevêtrement de friponneries, sans éclaircie et sans arrêt, où seuls un valet balourd, un marquis ivre et une revendeuse forte en bec représentent les honnêtes gens.
Peut-être irait-il même jusqu’à encourager des hommes d’un plus fort génie à se jeter dans la carrière ! […] Il y a trois musiques, dit Wagner : « Il y a la musique italienne, délicieuse et perverse, qui provoque et qui déprave, princesse peut-être, courtisane certainement ; belle comme les Vénus du Titien, et impudique comme les Arétines de Pierre d’Arezzo ; ne se souciant de rien, sinon de plaire et d’énerver ; triomphant des âmes fortes par sa faiblesse même ; jolie certes, et troublante comme un enchantement lascif, mais banalisant sa beauté dans des concessions de carrefour. […] Robuste et créée pour les fortes besognes, prête aux plus rudes enfantements, belle d’ailleurs, elle se consumait dans une longue virginité. […] D’une scène à l’autre, tout y change ou tout s’y confond ; ceux qui se plaisent à étiqueter les œuvres sont fort embarrassés. […] Les gardiens des sacramentelles tabulatures sont fort hésitants.
Malgré la splendeur des œuvres que créa sa forte virilité, on trouve au fond de ces tableaux débordants de vie et ruisselants de lumière, les teintes crépusculaires d’un pessimisme assombrissant. […] Le son des cloches devient toujours plus fort. […] La sympathie voyante est plus forte que la passion aveugle. […] Mais celle-ci, reconnaissant un maître, demeure suspendue sur la tête d’un Pur et d’un Fort. […] Mais les clairvoyants, qui savent lire plus avant dans l’âme contemporaine n’hésiteront pas à y reconnaître de nombreux et forts sous-courants spiritualistes et régénérateurs, qui trahissent sa douloureuse et profonde aspiration vers l’idéal.
Le Romantisme ouvre l’ère du sérieux, de la mélancolie, du sentimentalisme, des images grandioses et des descriptions sensationnelles : « les ouvrages gais, prédisait Mme de Staël avec un sens de rare divination, vont être dédaignés comme de simples délassements de l’esprit, dont on conserve fort peu de souvenir ». […] Il est des années que j’enlève des foires d’Allemagne de fort belles parties de littérature brute, que je fais dégrossir à Paris, dans un atelier de traduction. […] La sensible Malvina s’empresse d’imiter les hommes politiques ; elle oublie son serment et aime sir Edmond, beau, brave, mélancolique, etc… mais fort libertin ; il trompe sans scrupules plusieurs Malvinas simultanément […] Mais Chactas surgit et soudain la Française se réveille : elle se sent en présence d’un enjôleur ; elle répond à ses propositions de promenades sentimentales dans les bois : « Mon jeune ami, vous avez appris le langage des blancs, et il est bien aisé de tromper une jeune Indienne. » On devine dans cette réponse, sous le badigeon anglais et indien, la délurée grisette parisienne, qui sait que la chair est faible et le doux parler fort à l’ombre des bois de Romainville. […] Elle s’indigne que « des fortes têtes regardent les travaux de la pensée, les services rendus au genre humain comme seuls dignes de l’estime des hommes… Mais combien d’êtres peuvent se flatter de quelque chose de plus glorieux que d’assurer à soi seul la félicité d’un autre.
Ses lèvres articulaient à peine un léger et imperceptible mouvement ; mais ses yeux tour à tour baissés sur la page ou levés vers le ciel, la pâleur et la rougeur alternative de ses joues, ses mains qui se joignaient quelquefois en déposant pour un moment le livre sur ses genoux, l’émotion qui gonflait sa poitrine et qui se révélait à moi par une respiration plus forte qu’à l’ordinaire, tout me faisait conclure, dans mon intelligence enfantine, qu’elle disait à ce livre ou que ce livre lui disait des choses inentendues de moi, mais bien intéressantes, puisqu’elle, habituellement si indulgente à nos jeux et si gracieuse à nous répondre, me faisait signe de ne pas interrompre l’entretien silencieux ! […] L’homme rejette sa veste ; la jeune femme ne garde que sa chemise de toile épaisse et forte comme le cuir ; ils prennent la pioche dans leurs mains hâlées, et on entend résonner partout sur les collines, jusqu’au milieu du jour, les coups de la pioche de fer luisant, sur les cailloux qui l’ébrèchent. […] Un fusil double luisait au soleil sur ses épaules, un fouet de chasse badinait dans sa main, un chapeau rond découvrait à demi son front haut et ses cheveux noirs ; ses bottes fortes, armées aux talons d’éperons d’argent, trahissaient en lui l’homme de cheval et l’homme de chasse plus que l’homme du sanctuaire. […] La littérature n’est pas moins indispensable au récit qu’à l’action des grandes choses ; le peuple lui-même le plus illettré, quand il est rassemblé et élevé au-dessus de son niveau habituel, comme l’Océan dans la tempête par une de ces grandes marées ou par une de ces fortes commotions qui soulèvent ses vagues, prend tout à coup quelque chose de subitement littéraire dans ses instincts ; il veut qu’on lui parle, non dans l’ignoble langage de la taverne ou de la borne, mais dans la langue la plus épurée, la plus imagée et la plus magnanime que les hommes des grands jours puissent trouver sur leurs lèvres. […] Chaque entretien, d’inégale grandeur, contiendra tantôt 64 pages, tantôt 80 pages, tantôt 96 pages, selon l’étendue du sujet, mais de manière à former toujours 2 forts volumes à la fin de l’année.