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201. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

C’est un fait admis que nous sommes capables de toutes les conceptions que la généralisation peut former en partant des lois observées de nos sensations. […] Les différences que notre conscience reconnaît entre une sensation et une autre nous donnent l’idée générale de différence et associent indissolublement à chaque sensation que nous avons le sentiment qu’elle est différente d’autres choses ; et, quand une fois cette association a été formée, nous ne pouvons plus concevoir une chose quelconque sans être capables et même obligés de former aussi la conception de quelque chose de différent. […] Lorsque rien ne contredit la conception ainsi formée et que, au lieu d’être réprimée et niée, elle est provoquée et suscitée par la sensation actuelle, elle est affirmative et devient un jugement. […] La première de ces deux choses est animale, la seconde est humaine. — En effet, il suffit de l’expérience animale pour attacher à la sensation le groupe d’images ; on a vu les lois de réviviscence et d’association qui le forment et l’éveillent. […] De l’analyse du mouvement, il suit qu’il n’est pas absolument hétérogène à la sensation ; car l’idée que nous en avons est formée avec des matériaux fournis par nos sensations musculaires de locomotion.

202. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

Elles ramènent à la surface des débris organiques où le microscope reconnaît ces sédiments formés de coquilles dont Buffon composait les couches végétales de ces terres à naître. […] Lesage les lut avec un goût formé par Molière. […] Heureux esprit, Fleury fut toujours, et dès sa jeunesse, aux meilleurs endroits et sous les meilleurs guides pour s’instruire et se former. […] Il annonce une histoire des études, et il ne donne que le tableau un peu vague des connaissances qui, chez les anciens et les modernes, ont formé la matière des études. […] J’ai grand’peur que, pour former son élève imaginaire, Quintilien n’ait créé qu’un maître chimérique.

203. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — III. (Fin.) » pp. 479-496

Quiconque ne connaît point les monts du premier ordre, ne saurait se former une idée de cette couleur dorée et transparente, qui teint les plus hautes sommités de la terre. […] L’Oberman de Senancour dans ses voyages aux Alpes sera capable de former un tel vœu, mais il ne le formera que comme rêveur et pour avoir une sensation neuve, extatique, trop stérile : ici Ramond, tout en rêvant et en jouissant des âpres saveurs d’un tel spectacle, entend bien avoir le baromètre en main, peser, mesurer, calculer, faire son office enfin de disciple de Galilée et d’Empédocle, et c’est ce mélange, cette combinaison en lui du physicien et du savant avec le disciple de Jean-Jacques qui a de quoi se faire admirer, et dont le sentiment est si grandement rendu. […] L’opinion définitive qu’il se forma de la Révolution française répond bien à cet aspect sous lequel elle s’offrit à lui.

204. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée, par M. le chevalier Alfred d’Arneth et à ce propos de la guerre de 1778 »

On formait toutes les années des camps dans les provinces, où les troupes étaient exercées par des commissaires-inspecteurs instruits et formés aux grandes manœuvres de la guerre ; l’impératrice se rendit elle-même à différentes reprises dans les camps de Prague et d’Olmütz, pour animer les troupes par sa présence et par ses libéralités- : elle savait faire valoir mieux qu’aucun prince ces distinctions flatteuses dont leurs serviteurs font tant de cas ; elle récompensait les officiers qui lui étaient recommandés par ses généraux, et elle excitait partout l’émulation, les talents et le désir de lui plaire. En même temps se formait une école d’artillerie sous la direction du prince de Lichtenstein ; il porta ce corps à six bataillons, et l’usage des canons à cet abus inouï auquel il est parvenu de nos jours ; par zèle pour l’impératrice, il y dépensa au-delà de cent mille écus de son propre bien. Enfin, pour ne rien négliger de ce qui pouvait avoir rapport au militaire, l’impératrice fonda près de Vienne un collège où la jeune noblesse était instruite dans tous les arts qui ont rapport à la guerre ; elle attira d’habiles professeurs de géométrie, de fortification, de géographie et d’histoire, qui formèrent des sujets capables, ce qui devint une pépinière d’officiers pour son armée.

205. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Affaires de Rome »

Les doctrines religieuses, morales et politiques, les lois et les institutions qu’elles avaient consacrées, formaient comme un vaste édifice, demeure commune de la grande famille européenne. […] Ce sont les écrivains qui, sous la Restauration, formaient le monde philosophique, dit éclectique. […] Dès les premières lignes du livre, M. de La Mennais remarque que « le temps fuit de nos jours avec une telle rapidité, qu’en quelques années l’on voit s’accomplir ce qui jadis eût été l’œuvre d’un siècle ou même de plusieurs. » Cette idée sur la rapidité du temps et la multiplicité de ce qui s’y passe, qui est juste et même banale à un certain degré, devient propre à M. de La Mennais par la singulière préoccupation qu’elle a toujours formée dans son esprit. […] Sans s’attendre à le trouver parfait, ce qui ne serait pas seulement de la simplicité, mais de la folie, on se figure qu’entre lui et le type idéal qu’on s’en est formé d’après les maximes spéculativement admises, il existe au moins quelque analogie.

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