On trouverait à ce fait incontestable bien des causes ; mais une des principales est assurément dans la manière dont on s’est accoutumé, durant la marche rapide, à se passer presque absolument des horizons de l’antiquité et de ces temples harmonieux qui en couronnent à jamais le fond. […] Ce que nous voudrions ici, c’est de rappeler parfois les regards et de reporter les nôtres particulièrement vers ce fond de majesté et de grâce que le Parthénon couronne, et plus loin aux rivages d’Ionie, là où de siècle en siècle s’est montré le tombeau d’Achille. Nul n’est plus propre qu’Homère à remplir cet objet grandiose que j’invoque et que j’aimerais à voir de loin planer sur toute étude, même diverse, comme on voit au fond de l’atelier du sculpteur régner le front du Jupiter olympien.
Au nord, l’Océan bat les falaises blanchâtres ou noie les terres plates ; les coups de ce bélier monotone qui heurte obstinément la grève, l’entassement de ces eaux stériles qui assiègent l’embouchure des fleuves, la joie des vagues indomptées qui s’entre-choquent follement sur la plaine sans limites, font descendre au fond du coeur des émotions tragiques ; la mer est un hôte disproportionné et sauvage dont le voisinage laisse toujours dans l’homme un fond d’inquiétude et d’accablement. — En avançant vers l’est, vous rencontrez la grasse Flandre, antique nourrice de la vie corporelle, ses plaines immenses toutes regorgeantes d’une abondance grossière, ses prairies peuplées de troupeaux couchés qui ruminent, ses larges fleuves qui tournoient paisiblement à pleins bords sous les bateaux chargés, ses nuages noirâtres tachés de blancheurs éclatantes qui abattent incessamment leurs averses sur la verdure, son ciel changeant, plein de violents contrastes, et qui répand une beauté poétique sur sa lourde fécondité. — Au sortir de ce grand potager, le Rhin apparaît, et l’on remonte vers la France. […] Des deux côtés les versants qui le nourrissent se redressent avec un aspect énergique ou austère ; les pins couvrent les sommets de leurs draperies silencieuses, et descendent par bandes jusqu’au fond des gorges ; le puissant élan qui les dresse, leur roide attitude donne l’idée d’une phalange de jeunes héros barbares, immobiles et debout dans leur solitude que la culture n’a jamais violée.
Au fond, l’on reprochait à Larroumet que son étude ne ressemblait pas à son auteur : « Il a, disait quelqu’un, déposé un éléphant sur un papillon. » Ce mot révèle une conception purement esthétique de l’histoire littéraire : l’essai doit être l’image, la réduction, comme l’eau-forte de l’œuvre originale. […] Nous étions sortis de l’École Normale, mes camarades et moi, très admirateurs des grandes constructions d’art littéraire que Taine avait édifiées, mais au fond très décidés à ne point nous mettre au service d’un système, tout préparés par nos maîtres, Fustel de Coulanges, Tournier, Boissier, Lavisse, qui nous avaient donné l’idée des méthodes exactes, à essayer d’adapter à l’histoire littéraire de la France les procédés de la critique ancienne et de l’histoire. […] Il se permettait d’être charmant, d’être tout à fait lui, dans le journal, dans la courte chronique improvisée au coin d’une table, parce qu’au fond il ne faisait pas grand cas de cette besogne.
Au fond, la marche de l’esprit est la même ici qu’en histoire naturelle. […] Si, en effet, on a reconnu dans les écrits d’un homme un style éclatant, riche en comparaisons et en métaphores, une grande fertilité de combinaisons dramatiques, une habileté remarquable à dresser en pied un être vivant ou à brosser un paysage à grands traits, déclarer après cela que cet homme est doué d’une forte imagination, c’est au fond répéter la même chose en d’autres termes. […] C’est qu’au fond toute disposition naturelle, toute faculté est une force neutre, qui pareille à la langue dont parle Esope, peut-être bonne ou mauvaise dans ses effets, suivant les conditions où elle s’exerce.
Mais il y a aussi les causes secondaires, direction du vent, circonstances locales, configuration du fond de l’Océan, etc. qui ont une grande influence sur la hauteur et l’heure de la marée ; et qui, dans la plupart des cas, ne peuvent être calculées ou prédites. […] Mais il considère comme évident que l’observation de nous-mêmes par nous-mêmes ne peut nous apprendre que très peu de choses sur les sentiments et rien au sujet de l’entendement : au fond, ce reploiement de l’esprit sur lui-même lui paraît impossible. […] Or, rien n’est plus utile pour pénétrer dans le fond et dans l’essence intime des faits complexes, que l’examen des exceptions et des cas rares.