Celui-ci est Compositeur d’un Dictionnaire du vieux langage François, qui peut être utile à ceux qui aiment la lecture de nos anciens Auteurs, aux Généalogistes, aux Chartriers, aux Notaires, sur-tout aux derniers, lorsqu’ils sont embarrassés pour l’intelligence de quelques expressions hors d’usage.
Ce genre est l’Histoire, dont il a défiguré l’esprit & le style, en la surchargeant de traits plus oratoires qu’historiques, d’une intempérance de figures, d’un luxe d’expressions déplacées, d’une affectation de grands mots qui ne produisent que des sons, lorsqu’on a droit d’attendre des réflexions ou des faits.
Ne dites point que vous avez du goût pour notre état : embrassez-en un autre, si cette expression froide vous suffit. […] Ceux qui ont ce trait, ce neuf, ce piquant, peuvent encore ne pas être parfaitement aimables ; mais, si l’on unit à cela de l’imagination, de jolis détails, peut-être même des disparates heureux, des choses imprévues qui partent comme un éclair, de la finesse, de l’élégance, de la justesse, un joli genre d’instruction, de la raison qui ne soit pas fatigante, jamais rien de vulgaire, un maintien simple ou distingué, un choix heureux d’expressions, de la gaieté, de l’à-propos, de la grâce, de la négligence, une manière à soi en écrivant ou en parlant, dites alors qu’on a réellement, décidément de l’esprit, et que l’on est aimable. […] On avait Jean-Jacques Rousseau qui avait découvert et révélé la solitude, les douceurs ou les sublimités qu’elle enferme ; on allait avoir Bernardin de Saint-Pierre et Chateaubriand découvrant et décrivant à leur tour la forêt vierge, les sauvages et splendides beautés d’un autre monde ; on allait avoir Oberman s’abîmant dans la contemplation solitaire et dans l’expression intime des aspects reculés ou désolés ; mais les amateurs restés gens du monde, les gens de goût, et d’un noble goût, touchés en effet de la nature, et ne la voulant point cependant séparer jamais de la société, disaient entre autres choses avec le prince de Ligne, et ne pouvaient en cela mieux dire que lui : J’aime dans les bois les quinconces et les percés, de belles routes mieux tenues que celles des jardins, de belles palissades, des allées de hêtres surtout : elles ont l’air de colonnes de marbre quand elles ressortent sur un taillis bien haut et bien vert.
Il est naturel par le fond des choses et dans le courant du récit, sinon dans le détail de l’expression ; il est facile désormais, grâce à son traducteur ; il est agréable, excepté dans le dernier livre ; il est instructif partout sur le chapitre des mœurs et usages. […] La plume d’Apulée n’est point malhabile ; elle est curieuse, elle est coquette même, fertile en diminutifs à la Catulle ; elle va reprendre des expressions antiques, elle sème les expressions neuves pour nous et inusitées.
Aujourd’hui partie complète est gagnée pour les premiers, et les choses sont retournées du tout au tout : les plus grands et les primitifs règnent et triomphent ; les seconds même en invention après eux, mais naïfs et originaux encore de pensée et d’expression, les Regnier, les Lucrèce, sont remis à leur juste rang, et ce sont les modérés, les cultivés, les polis, les anciens classiques, qu’on tend à subordonner et qu’on est disposé, si l’on n’y prend garde, à traiter un peu trop sous jambe : une sorte de dédain et de mépris (relativement parlant) est bien près de les atteindre. Il me semble qu’il y a lieu de tout maintenir, de ne rien sacrifier, et en rendant plein hommage et entière révérence aux grandes forces humaines qui, semblables aux puissances naturelles, éclatent comme elles avec quelque étrangeté et quelque rudesse, de ne cesser d’honorer ces autres forces plus contenues qui, dans leur expression moins semblable à une explosion, se revêtent d’élégance et de douceur. […] Si l’Écossais Robert Burns est fortement senti et dignement classé, William Cowper n’obtient pas, ce me semble, une part suffisante et proportionnée dans cette renaissance du goût naturel, de l’expression réelle et poétique.