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1099. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

« Sous l’empire de ce chant, la vanité du roi s’éveille dans sa pensée ; il livre de nouveau toutes ses batailles ; trois fois il défait ses ennemis, trois fois il retue les morts ! […] Vois comme ces ombres agitent en l’air leurs torches en montrant du doigt les palais des Persans et les brillants temples des dieux ennemis ! […] Je ne veux pas même parler des femmes, car là il faut une extrême retenue et toute la raison possible, puisque, sous ce rapport, la nature elle-même est notre ennemie, et que quiconque n’emploie pas toute sa raison pour se modérer et se maintenir dans les bornes légitimes l’appellera en vain à son secours quand il sera tombé dans l’abîme : c’est là un malheur qui ne se termine ordinairement qu’à la mort.

1100. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Je crains de m’attendrir follement en m’arrêtant trop sur cette réflexion. » Ses ennemis l’accusaient d’être trop bon courtisan. […] Cet ennemi de l’esprit classique a, dans son besoin d’unité, soumis le réel aux simplifications et aux généralisations les plus impérieuses  Sa philosophie se retrouve, dramatisée, dans le roman naturaliste ; et l’on sait que le roman naturaliste lui faisait horreur. […] Il se demande à quoi aura servi d’emprunter à l’ennemi son système de recrutement si l’on n’a pas su lui emprunter du même coup son âme patiente, endurante, disciplinée, encline au respect… Si l’on s’était trompé, pourtant ?

1101. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

On vit plusieurs fois des clochers de Venise les armées ennemies, et Florence fut presque toujours en guerre, ou contre les Medicis qui la vouloient assujettir, ou contre les pisans qu’elle vouloit remettre sous le joug. Rome vit plus d’une fois des troupes ennemies ou suspectes dans ses murailles, et cette capitale des beaux arts, fut saccagée par les armes de l’empereur Charles-Quint, avec autant de barbarie que le seroit une ville prise d’assaut par les turcs. […] La guerre étoit aux environs de cette ville, sur laquelle ses ennemis faisoient tous les jours des entreprises qui mettoient en danger l’état des marchands, des ecclesiastiques et de tous les principaux citoïens.

1102. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Oubliez-vous que Henri VIII a déchiré les trois royaumes de la Grande-Bretagne de la carte pontificale, et que, sur la terre comme sur la mer, la Rome papale a ses plus acharnés ennemis là où elle avait ses plus fanatiques défenseurs ? […] Oubliez-vous enfin que, de toutes ces puissances allemandes, quelquefois auxiliaires, quelquefois ennemies des papes, trois seules puissances n’ont pas déserté l’obéissance spirituelle aux papes, et composent, avec la Pologne asservie, le seul domaine spirituel de la papauté ?

1103. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

Ils inventèrent pour la France ce qui n’avait jamais été inventé avant eux en diplomatie, l’alliance avec les petites puissances, c’est-à-dire l’alliance de la force avec la faiblesse, l’alliance de la grandeur avec la petitesse, l’alliance de quarante millions d’hommes avec des puissances de trois ou quatre cent mille sujets, l’alliance d’un budget d’un milliard avec des indigents et des nécessiteux qui ont à peine de quoi solder la sentinelle veillant à leur porte ; alliance qui compromet sans cesse les grands États dans la cause des petits, sans que les petits États aient d’autres secours à porter aux grands que leur faiblesse et leur insignifiance ; alliance qui donne pour ennemis éventuels à la France l’Angleterre, la Russie, la Prusse, l’Autriche, et qui lui donne pour amis Bade ou Turin ! […] L’Espagne, autrefois si militaire, si navale, si terrible par son infanterie et par ses flottes, n’existait plus, comme Espagne, qu’en Amérique ; en Europe, elle était notre alliée à tout prix contre la maison d’Autriche dépossédée du midi ; les Pays-Bas autrichiens n’étaient pour ainsi dire qu’une colonie continentale, trop séparée de l’Autriche pour tenir longtemps à l’Empire ; les Italiens des papes étaient les ennemis naturels et invétérés de l’Autriche, vieux Italiens de souche, détestant le joug des Germains, toujours pour eux des barbares ; le beau royaume de Naples et de la Sicile était devenu espagnol bourbonien, et par conséquent français ; la Toscane appartenait encore à un dernier des Médicis, Parme à l’Espagne, Venise et Gênes s’appartenaient à elles-mêmes ; le Piémont, puissance alors insignifiante, oscillait entre l’Autriche et nous, toujours plus entraîné vers le plus fort.

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