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1008. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre V. Des Grecs, et de leurs éloges funèbres en l’honneur des guerriers morts dans les combats. »

Eschine, avec toute l’éloquence d’un ennemi et d’un rival, s’écrie, dans le fameux discours qu’il prononça contre lui : « Comment, avec ces mêmes pieds qui ont si lâchement quitté leur poste dans le combat, as-tu osé monter sur la tribune pour y louer ces mêmes guerriers que tu as conduits à la mort ? 

1009. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXV. Des éloges des gens de lettres et des savants. De quelques auteurs du seizième siècle qui en ont écrit parmi nous. »

Des savants dans les langues, tels qu’Adrien Turnèbe, un des critiques les plus éclairés de son siècle, Guillaume Budé, qu’Érasme nommait le prodige de la France, et dont il eut la faiblesse ou l’orgueil d’être jaloux, qui passait pour écrire en grec à Paris comme on eût écrit à Athènes, et qui, malgré ce tort ou ce mérite, fut ambassadeur, maître des requêtes et prévôt des marchands ; Longueil, aussi éloquent en latin que les Bembe et les Sadolet, et mort à trente-deux ans, comme un voyageur tranquille qui annonce son départ à ses amis ; Robert et Henri Étienne, qui ne se bornaient pas, dans leur commerce, à trafiquer des pensées des hommes, mais qui instruisaient eux-mêmes leur siècle ; Muret exilé de France, et comblé d’honneurs en Italie ; Jules Scaliger, qui, descendu d’une famille de souverain, exerça la médecine, embrassa toutes les sciences, fut naturaliste, physicien, poète et orateur, et soutint plusieurs démêlés avec ce célèbre Cardan, tour à tour philosophe hardi et superstitieux imbécile ; Joseph Scaliger sort fils, qui fut distingué de son père, comme l’érudition l’est du génie ; et ce Ramus, condamne par arrêt du parlement, parce qu’il avait le courage et l’esprit de ne pas penser comme Aristote, et assassiné à la Saint-Barthélemi, parce qu’il était célèbre, et que ses ennemis ou ses rivaux ne l’étaient pas.

1010. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Madame de Verdelin  »

Chaque noble écrivain ramasse sur sa route et emporte avec soi ses ennemis, ses envieux cachés, des êtres ignobles qui lui sont acharnés, qui s’attachent à lui et en vivent : il est juste que des êtres généreux l’en dédommagent ; il est juste qu’il ait aussi, par compensation, ses joies cachées, des suavités de bonheur qui n’arrivent qu’à lui. […] Elle a sa place dans la seconde partie des Confessions, dans ce dixième livre où il raconte son installation et sa vie à Montmorency après sa sortie de l’Ermitage ; elle n’y est qu’à moitié travestie et défigurée ; le passage où il est question d’elle et de son mari est des plus piquants d’ailleurs, et l’on sent que Rousseau s’y égayé plus vivement qu’il ne le ferait s’il croyait avoir affaire à une ennemie masquée. […] Ses amis et ses ennemis.

1011. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Elle est le contraire de l’épopée, et le comique est l’ennemi juré du sublime. […] Le plus haut point de l’idéal tragique, dit-il, consiste dans l’opposition de deux puissances morales, harmoniques dans leur essence, mais devenues ennemies, parce qu’elles ont fait alliance avec des passions individuelles, qui, en troublant leur divine pureté, ont rompu momentanément leur accord. […] Si elle avait invité à sa table quelques-uns de ses ennemis les philosophes, et qu’entre les convives la discussion tombât, comme il arrive souvent, même entre des convives philosophes, sur les qualités agréables d’un vin, Uranie arrêterait la controverse, en disant : Messieurs, vous paraissez oublier ce que vous avez écrit dans vos livres, qu’en matière de goût physique, il ne faut point disputer.

1012. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

Il y avait le romain, langue sonore, majestueuse, grandiose, mais le pape et les cardinaux étaient là ; la liberté souriait à la langue, mais les hommes imposaient la servitude sacrée, cela ne pouvait convenir à l’ennemi poétique de toute tyrannie. […] Ce fut alors que la cour de France, lasse de l’oublier totalement, songea à réveiller dans ce sang des Stuarts une rivalité toujours possible au sang ennemi des Stuarts en donnant des héritiers à Charles-Édouard. […] Le féroce ennemi des rois ne comprend pas les reines dans son aversion.

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