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197. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

Mirabeau, déjà connu par d’énormes scandales, et très peu encore à des titres honorables, entassant brochures sur brochures, en fit une contre la compagnie dite des Eaux de Paris. Les frères Perrier, moyennant l’établissement de la pompe à feu, avaient entrepris de fournir Paris d’eaux salubres, abondantes, et à plus bas prix qu’on ne le faisait jusqu’alors ; chaque maison qui s’abonnait recevait par des conduits et tuyaux toute l’eau nécessaire, ce qui était très utile et très digne d’encouragement. […] Je suis d’acier contre les injustices, et mon cœur s’amollit, mes yeux fondent en eau sur le moindre trait de bonté.

198. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1873 » pp. 74-101

Il se voit, je ne sais à propos de quel petit méfait, à la suite duquel il avait été sermonné par son précepteur, puis fouetté, puis privé de dîner, il se voit se promenant dans le jardin, et buvant, avec une espèce de plaisir amer, l’eau salée qui de ses yeux, le long de ses joues, lui tombait dans les coins de la bouche. […] La soupe est mangée, et Hugo, qui a annoncé avoir la cholérine, mange du melon, boit de l’eau glacée, disant que tout cela pour lui, n’a pas d’importance. […] Au milieu de son speach, une allusion à l’église de Montmartre lui fait dire : « Moi, vous savez depuis longtemps mon idée, je voudrais un liseur par village, pour faire contrepoids au curé, je voudrais un homme qui lirait, le matin, les actes officiels, les journaux ; qui lirait, le soir, des livres. » Il s’interrompt : « Donnez-moi à boire, non pas du vin supérieur que boivent ces messieurs — il fait allusion à une bouteille de Saint-Estèphe — mais du vin ordinaire, quand il est sincère, c’est celui que je préfère, non pas du Bourgogne, par exemple : ça donne la goutte à ceux qui ne l’ont pas, ça la triple à ceux qui l’ont… Les vins des environs de Paris, on est injuste pour eux, ils étaient estimés autrefois, on les a laissé dégénérer… ce vin de Suresnes sans eau, ce n’est vraiment pas mauvais… Tenez, monsieur de Goncourt, il y a longtemps de cela, mon frère Abel, en sa qualité de lorrain et de Hugo, était très hospitalier. […] Hugo fait un cours d’hydrothérapie, il nous entretient de l’ablution qu’il prend chaque matin : ablution qu’il a enrichie de quelques carafes d’eau glacée, qu’il se verse lentement sur la nuque, dans le cours de la journée, — vantant fort ce réconfort pour les travaux de l’intelligence et autres.

199. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

Ainsi je puis refuser aux philosophes d’être les inventeurs des sas des écluses trouvées il y a deux cens ans, et qui sont non-seulement d’une utilité infinie dans le commerce, mais qui ont encore donné lieu à tant de remarques sur la nature et sur la pente des eaux. Je puis leur dénier d’être les inventeurs des moulins à eau et à vent, comme des horloges à poids et à balancier, qui ont tant aidé aux observations de tout genre, en donnant moïen de mesurer toujours le temps avec exactitude. […] Le célebre Galilée avoit bien remarqué que les pompes aspirantes élevoient l’eau jusqu’à la hauteur de trente-deux pieds, mais Galilée, comme l’avoient fait ses prédecesseurs, et comme le feroient encore nos philosophes sans la découverte fortuite dont je vais parler, attribuoit cette élevation de l’eau, opposée au mouvement des corps graves, à l’horreur du vuide.

200. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Poésies complètes de Théodore de Banville » pp. 69-85

Il m’est arrivé d’écrire une grande folie : J’irais à Rome à pied pour un sonnet de lui, c’est-à-dire pour qu’il me fût accordé de trouver en moi un de ces beaux sonnets à la Pétrarque, de ces sonnets après la mort de Laure, diamants d’une si belle eau, à la fois sensibles et purs, qu’on redit avec un enchantement perpétuel et avec une larme. […] Pas d’Alcide vainqueur du monstre de Némée, Ni de Cypris naissant sur la mer embaumée ; Pas de Titans vaincus dans leurs rébellions, Ni de riant Bacchus attelant les lions Avec un frein tressé de pampres et de vignes ; Pas de Léda jouant dans la troupe des cygnes ; De naïades aux fronts couronnés de roseaux, Ou de blanche Phœbé surprise au sein des eaux. […] Moissonneuses, surprises À mi-jambe dans l’eau     Du clair ruisseau !

201. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre IV. Suite du parallèle de la Bible et d’Homère. — Exemples. »

« Il a conçu la douleur et enfanté l’iniquité 103. » Quand le même Job veut relever la grandeur de Dieu, il s’écrie : « L’enfer est nu devant ses yeux104  : — c’est lui qui lie les eaux dans les nuées 105  : — il ôte le baudrier aux rois, et ceint leurs reins d’une corde 106. » Le devin Théoclymène, au festin de Pénélope, est frappé des présages sinistres qui les menacent. […] Si le chantre d’Ilion peint un jeune homme abattu par la lance de Ménélas, il le compare à un jeune olivier couvert de fleurs, planté dans un verger loin des feux du soleil, parmi la rosée et les zéphyrs ; tout à coup un vent impétueux le renverse sur le sol natal, et il tombe au bord des eaux nourricières qui portaient la sève à ses racines. […] Semblable à un fleuve dont les eaux sont si basses en certains endroits, qu’un agneau pourrait y passer, et en d’autres, si profondes, qu’un éléphant y nagerait. » 100.

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