Lucrèce, par exemple, aimerait à discuter l’origine du monde et le débrouillement du chaos avec Milton ; mais, en raisonnant tous deux dans leur sens, ils ne seraient d’accord que sur les tableaux divins de la poésie et de la nature.
Pour que le jeune cœur de Madame Royale ne prît point à cette heure une haine irréconciliable et un mépris sans retour pour la race humaine, pour qu’elle conservât sa sérénité, sa candeur, sa foi, son espérance au bien, il fallut les divins exemples et les secours qu’elle trouva autour d’elle, surtout dans sa tante Élisabeth, cette personne céleste ; il fallut cette religion précise, pratique, dont nul esprit fort n’aura jamais le droit de sourire, puisqu’elle seule est de force à soutenir et à consoler de telles douleurs.
Elle mêlait dans toute sa conversation une douceur qu’on ne trouvait point dans toutes les autres personnes royales : ce n’est pas qu’elle eût moins de majesté, mais elle en savait user d’une manière plus facile et plus touchante, de sorte qu’avec tant de qualités toutes divines, elle ne laissait pas d’être la plus humaine du monde.
La prétention, en effet, des principaux chefs de cette génération qui ne relevait ni du droit divin ni d’aucun principe préconçu, et qui arrivait à la politique par l’étude des choses et de l’histoire, était de tout comprendre ; et, depuis quelque temps, ils me semblent, en vérité, ne se plus mettre en peine de cela.
Et pourtant, du moment qu’on admet, comme il avait la sagesse de le faire, l’adoration publique et le culte, n’y a-t-il donc pas dans l’âme humaine des émotions, dans la destinée humaine des mystères et des profondeurs, qui appellent et justifient l’orage de la parole divine ?