Cette différence entre le point de vue de Malherbe et celui de Vaugelas est capitale, et notre auteur, si déférant d’ailleurs envers l’illustre poète, ne perd aucune occasion de la marquer. […] Combien n’ai-je pas à dire encore au sujet et à l’occasion de Vaugelas, et sur la différence profonde qu’il y a de son moment au nôtre ! Cette différence peut se résumer en deux mots : Cour et Démocratie.
Écoutons, sur ce passage du Saint-Bernard, Napoléon lui-même : « Le Premier consul montait, dans les plus mauvais pas, le mulet d’un habitant de Saint-Pierre, désigné par le prieur du couvent comme le mulet le plus sûr de tout le pays. » Voilà bien la différence de la réalité au tableau, ou plutôt de la déclamation à la vérité. […] J’aime les peintres et les poètes, et ce n’est pas moi, certes, qui voudrais les amoindrir ; mais je ne puis m’empêcher de noter les différences. […] Toutes les autres différences que Napoléon ne dit pas éclatent à la pensée.
Il est curieux de comparer cette différence qui tient à celle des humeurs et comme au tempérament des deux esprits : Tout ce que vous me représentez, madame (écrit la princesse des Ursins), depuis que l’officier des gardes vint annoncer la venue de M. de Chamillart qui conduisait M. de Silly dans votre petite chambre de Marly, pendant que vous soupiez dans votre cabinet, jusqu’à ce que Sa Majesté vînt dire elle-même à la porte cette grande nouvelle, me paraît si naturel, que je crois vous avoir vue jeter votre serviette par terre, courant pour entendre ce que l’on disait ; Mme de Dangeau voler pour aller écrire à monsieur son mari ; Mme d’Heudicourt marcher comme si elle avait eu de bonnes jambes, sans savoir presque ce qu’elle faisait ; M. de Marsan sauter sur un siège pour se faire voir, malgré sa goutte, avec la même facilité que l’eût pu faire un danseur de corde. […] On sent la différence de mouvement et d’animation ; Mme de Sévigné, si elle était là, conterait encore la même chose d’une troisième manière, qui pourrait bien faire pâlir les deux autres. […] C’est ici encore que les différences de nature entre elles se dessinent nettement.
Mais n’est-ce point-là, déjà, une différence entre les poètes nouveaux, sûrs de leur accent et de leur chanson, et tels nourrissons qui vont près du Pinde, épelant le modèle, et comptant les syllabes comme les pas d’une faction ? […] Son historique de la question est d’ailleurs exact, et il a vu la différence entre le vers libéré, verlainien, et le vers libre fort nettement, s’il s’est un peu borné en sa nomenclature des poètes participant au premier de ses mouvements, assez parents tous deux pour que le groupe symboliste avec ses aînés admirés et tels prosateurs fût suffisamment uni quelque temps par une similitude momentanée de vues ; les idées d’affranchissement et de complexité plus grande prêtant le terrain commun. […] Une autre différence entre la sonorité du vers régulier et du vers nouveau découle de la façon différente dont on y évalue les e muets.
Il y aura toujours une très-grande différence entre les honneurs décernés par une Postérité sage aux plumes vertueuses consacrées à l’amour du bien général, sur-tout dans une partie aussi essentielle que l’éducation de la Jeunesse, & l’atroce célébrité de tant de Productions funestes, que le vain appareil du talent ne sera jamais capable de sauver de l’indignation des Siecles moins corrompus que le nôtre.