Et puis une autre raison encore me fait aimer et respecter Victor Hugo : nous avons presque commencé ensemble cette longue traversée de la vie, où le hasard, qui est Dieu aussi, fait embarquer à la même date, sur la même nef, dans les mêmes circonstances et sur la même mer, ces passagers plus ou moins mémorables qu’on appelle des contemporains. […] Être contemporains, c’est presque être amis, si l’on est bons ; la terre est un foyer de famille, la vie en commun est une parenté.
Toute la poésie contemporaine est faite, semble-t-il, d’inquiétude morale et d’esprit critique mêlé de sensualité. […] On songe au Ve livre de Lucrèce ; puis on se dit qu’il y a là autre chose encore qu’une intuition de poète, que la science contemporaine, l’archéologie, l’anthropologie, ont seules rendu possibles de pareilles résurrections, et que, de toutes façons, un tel poème sonne glorieusement l’heure exacte où nous sommes.
Bien que le silence sur les contemporains soit de rigueur, paraît-il, je ne puis taire le nom d’Emmanuel Signoret, ni celui du grand lyrique qu’est Raymond de La Tailhède. […] Car elles sont plus sensuelles que sensibles, selon la signification que le romantisme a prêtée à ce terme, et ce serait peut-être pourquoi Maurras, par exemple, a été aussi sévère pour cette école, ou plutôt, pratiquement, pour ses aboutissements contemporains.
L’éternel désaccord entre l’idéal et la vie, la recherche toujours inassouvie de visées vaguement pressenties mais jamais reconnues, ont précocement mis un terme à la vie de cet artiste qui par une force irrésistible fut poussé à communiquer son idéal à ses contemporains. […] Mais, lui et son contemporain Klopstock, ils étaient arrivés à la limite de ce que les paroles peuvent exprimer ; et, comme leurs formes poétiques ne s’adaptaient pas bien à la musique, ils sont tous deux restés impopulaires ; Platen avoue lui-même que « le poète lyrique qui n’est plus un avec le musicien, a besoin du compositeur pour devenir populaire. » Mais Platen ne connaissait guère la musique comme art, il n’en saisissait que le côté formel et extérieur, et, n’ayant pas en lui-même l’esprit de de la musique, il ne pouvait créer une lyrique qui, malgré les perfections de sa forme, devînt immédiatement compréhensible et vraiment populaire.
Augier, est particulier au théâtre contemporain. […] Pour l’immense Moutard-Club de la jeunesse contemporaine, les cheveux gris prennent déjà la teinte des ailes de pigeon.