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292. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Le duc de Nivernais passa quelques mois à voir tous les jours Frédéric et à l’entretenir sur les objets les plus intéressants, à étudier son caractère : car,, pensait-il avec raison, dans les monarchies mixtes et non purement absolues, là où l’organisation de certains conseils est régulière et où l’État se conduit par les vrais principes, on peut saisir les motifs déterminants de la conduite, par la combinaison des circonstances avec l’intérêt de l’État : ainsi, les puissances voisines d’une telle monarchie ont des moyens de direction solides pour traiter avec elle ; mais, dans les pays où le souverain n’a d’autre conseil que lui-même, où ses perceptions non comparées à d’autres perceptions sont la seule occasion et la seule règle des mouvements de l’État, le caractère du prince est le gouvernail de l’État : la politique, l’intérêt fondamental ne sont que ce que l’intuition du prince veut qu’ils soient ; et les puissances voisines d’une telle monarchie ne peuvent traiter avec elle que d’après la connaissance des mouvements intérieurs du monarque, qui seuls impriment le mouvement à toute la machine. […] Après son retour, et dans un remaniement de ministère (fin de 1757), Bernis essaya inutilement de faire entrer au conseil le duc de Nivernais : « La connaissance qu’on avait de ses talents, écrivait Duclos, ne put triompher de la répugnance que Mme de Pompadour a toujours eue pour ceux qui sont liés de sang ou d’amitié avec le comte de Maurepas, et le duc de Nivernais avait ce double titre de réprobation. » S’il n’avait pu prévenir à Berlin l’explosion de la guerre de Sept Ans, le duc de Nivernais fut plus heureux à Londres pour mettre un terme aux conséquences de cette guerre si désastreuse pour la France. […] Une des premières lettres du duc de Nivernais au comte de Choiseul (bientôt duc de Praslin), chargé des Affaires étrangères, est pour lui présenter une description fidèle de l’état des partis et de l’opinion (24 septembre 1762) : Comme, par la constitution de ce pays-ci, l’état respectif des partis est la seule boussole qui puisse nous guider dans la négociation présente quant au fond et quant à la forme, je vais, dans cette lettre, avoir l’honneur de vous transmettre toutes les connaissances locales, que j’ai prises avec autant de soin que de diligence, des intérêts, des vues, des forces desdits partis ; et j’ose me persuader que ce détail pourra vous servir utilement pour apprécier au juste les discours du plénipotentiaire anglais (à Versailles), qui doivent, si je ne me trompe pas, servir de preuve à mes observations, comme mes observations leur serviront de clef et d’éclaircissement. […] [NdA] J’ai eu, depuis que ceci est écrit, le plaisir de trouver l’opinion que Frédéric avait du duc de Nivernais, exprimée aussi nettement qu’on peut le désirer. — Dans une lettre de Frédéric à Maupertuis du 12 mars 1756, on lit : « J’ai ici le duc de Nivernais qui me paraît d’un caractère bien estimable ; avec beaucoup d’esprit et de connaissances, il est sans prétentions. […] Je suis bien malheureux qu’il ne soit pas né à Berlin, je vous assure bien que je ne l’enverrais à aucune ambassade, et qu’il ne sortirait de chez moi. » — Dans une lettre du 20 mars : « Ne me parlez plus du duc de Nivernais, je dirai de lui ce qu’on disait à Rome à la mort de Marcellus : Les dieux n’ont fait que le montrer à la terre, Ce n’était pas la peine de faire sa connaissance pour le perdre pour toujours. » — Et le 8 avril : « Le duc de Nivernais est parti d’ici, comme vous le saurez.

293. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

Base de connaissance, d’où doit se dégager la seule émotion poétique réelle, parce qu’ainsi de sens universel. […] Du côté paternel : Facultés de création avec nécessité de construction harmonieuse et de plan, la tendance philosophique et le recours premiers à la connaissance, à la Science. […] Et cette crânerie me plaisait, autant que la connaissance de Montaigne dont se targuait l’un de mes correspondants, en citant « qu’il devrait être quelque coercition des lois contre les escrivains ineptes et inutiles ». […] Ils étaient selon la théorie « instrumentale », conçus symphoniquement  et c’est pourquoi il m’en donnait connaissance. […] Il ne veut pas dire que l’Homme conscient par le plus de connaissance émotive des rapports universels, que lui donne la Science, recréer en lui cet univers devenu ainsi conscient et ému de soi, en son cerveau.

294. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

— Nous voilà devenus suspects pour vouloir en revenir aux études logiques, à la connaissance des origines de notre langue, de sa lente formation ! […] À l’heure actuelle, dans toutes les branches des connaissances humaines, étant donné les progrès de l’activité scientifique dans tous les pays, l’impossibilité pour les travailleurs de se documenter entièrement, faute de connaître toutes les langues étrangères, rend éminemment désirable l’adoption d’une langue scientifique universelle. […] L’esprit français est dangereusement menacé du fait que la connaissance de la langue périclite. […] Enfin, lorsqu’on rencontre dans une circulaire signée de M. le Ministre de l’Instruction publique (authentique), des phrases entières écrites dans le plus pur charabia, par exemple : « Que les instituteurs imprègnent leurs leçons d’un souffle amplement patriotique… » et bien d’autres du même acabit, on est endroit de se demander si la connaissance du latin, cette langue si logique et si intransigeante sur la propriété des termes, ne devrait pas être exigée des rédacteurs de nos ministères, afin que nos actes officiels français soient au moins écrits en français.

295. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « I »

Or, il est positivement avéré que Wagner ne fit la connaissance de la philosophie de Schopenhauer qu’en hiver 1853-54, époque à laquelle le poète Herweghg lui apporta Le Monde comme Volonté et Représentation (Wolzogen, bayr. […] Et quelle est l’explication du charme magique qu’opéra sur le maître la connaissance des œuvres de Schopenhauer ? […] L’Art joue dans son système un rôle important : « L’Art, dit-il, a connaissance de la véritable essence du monde, des idées (I, 217)… Il résout, mais d’une façon différente de la philosophie, le problème de l’existence… Dans les œuvres d’art toute sagesse est contenue, mais virtuellement ou implicitement (II, 461, 463)… » Et dans la Musique plus spécialement : « Les autres arts ne nous montrent que l’ombre, la Musique nous révèle l’essence des choses… La Musique est l’image de la Volonté elle-même (1, 303, 310)… Aucun autre art n’exerce sur l’homme une action aussi immédiate, aussi profonde, car nul ne nous fait pénétrer aussi profondément dans l’essence même du monde (Fragments, 373)… etc. » Ce sont là les propres pensées de Wagner avant qu’il ne connût Schopenhauer. […] Je l’ai entendu parler de Tannhæuser avec une vive admiration, louer les fragments de Lohengrin dont il a connaissance : enfin, il y a environ un mois environ, il applaudissait la marche funèbre de Siegfried au concert Lamoureux.

296. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre II : Examen critique des méditations chrétiennes de M. Guizot »

J’affirme au contraire : 1° que, si les limites du monde fini sont celles de la science humaine, elles ne sont pas celles de la réalité ; 2° que l’homme porte en lui-même non-seulement des désirs et des ambitions, mais des instincts et des notions qui lui révèlent des réalités au-delà du monde fini, et que, si l’homme ne peut pas avoir la science de ces réalités, il en a la perspective ; 3° que, sous l’impulsion et le légitime empire de cette perspective, l’homme poursuit dans sa vie intellectuelle la connaissance de ces réalités, qu’il ne peut que reconnaître, comme il poursuit dans sa vie pratique la perfection morale, qu’il ne peut atteindre. […] N’est-ce pas ce que vous dites vous-même, quand vous dites : « Je ne crois pas ma pensée adéquate à l’essence des choses. » Il n’y a de science que là où la pensée est adéquate à l’objet qu’elle étudie, quand il y a connaissance effectivement et possiblement complète et claire des faits et de leurs lois, de l’enchaînement des causes et des effets ; à ces conditions seulement, la science existe, et l’esprit scientifique est satisfait. […] « Ceux qui croiraient que la philosophie positive nie ou affirme quoi que ce soit là-dessus se tromperaient : elle ne nie rien, elle n’affirme rien, car nier ou affirmer, ce serait déclarer que l’on a une connaissance quelconque de l’origine des êtres et de leur fin. […] L’immensité, tant matérielle qu’intellectuelle, tient par un lien étroit à nos connaissances, et devient par cette alliance une idéepositive du même ordre ; je veux dire que, en les touchant et en les bordant, cette immensité apparaît sous son double caractère, la réalité et l’inaccessibilité.

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