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346. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Après trois années d’une vie indépendante et toute parisienne, aux approches de la mort, les siens eurent la consolation de le voir redevenir chrétien. […] Guérin, à cette date, est encore rigoureusement chrétien. […] Une certaine sobriété méfiante et craintive est imposée, comme première condition, au contemplateur chrétien. […] En 1833, Guérin, ce Breton d’adoption et qui était alors bien plus Breton de génie et d’âme que Brizeux, vivait donc en plein de cette vie rurale, reposée, poétique et chrétienne, dont la sève montait à flots dans son talent et s’épanchait avec fraîcheur dans ses pages secrètes.

347. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les Saints Évangiles, traduction par Le Maistre de Saci. Paris, Imprimerie Impériale, 1862 »

Je sais bien qu’on a plus d’une fois discuté et contesté l’originalité entière de cette morale chrétienne, telle qu’elle apparaît à la réflexion et que je l’exprime en ce moment ; on a prétendu qu’il n’y avait pas une si grande distance entre elle et les maximes des plus sages de l’Antiquité, et, pour ne parler que des plus en vue dans notre Occident, de Socrate, de Platon, de Cicéron, de Sénèque, et plus tard de Marc-Aurèle. […] Mais encore les racines vives et chrétiennes, mises à nu, continuaient de reverdir du côté même où les branchages superbes avaient été retranchés. […] Raphaël, le plus admirable des peintres chrétiens, est, à certains égards, le plus éloigné du ton primitif. […] Le vrai chrétien a ses scrupules et ses repentirs, le véritable artiste également

348. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre III. Madame de Staël »

Ce qui lui fera comprendre Rousseau, ce seront les Allemands : elle deviendra, dix ans avant sa mort, une chrétienne fervente, hors de toute église et de toute confession : le duc de Broglie définira son état « un latitudinarisme piétiste », c’est-à-dire un protestantisme libéral, très indépendant, très peu théologique, plutôt mystique ; cette religion est à la fois très rationnelle et très sentimentale. […] Du jour où son esprit au-dessus du sentiment, conçoit la loi morale, elle est chrétienne. […] Mais elle fait un pas de plus, et un pas décisif : les littératures modernes sont des littératures chrétiennes, et la littérature française s’est placée dans des conditions désavantageuses en s’imposant les formes et les règles des œuvres anciennes et païennes. Il y a des littératures qui, mieux que la nôtre, ont rencontré les véritables conditions de la beauté littéraire, parce qu’elles ont été franchement nationales et chrétiennes.

349. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 272-292

Son grand principe, d’après la Religion chrétienne, est de rappeler tous les hommes à la concorde & à l’union, d’établir entre eux une correspondance de secours mutuels, d’émouvoir tous les cœurs en faveur de l’humanité, & de les intéresser au sort des malheureux, de quelque Nation qu’ils soient. […] Ce Discours est un vrai modele à proposer aux Orateurs Chrétiens, soit pour l’art d’appliquer sans affectation l’Ecriture Sainte, soit pour celui de savoir disposer, embellir & animer les Productions de leur propre génie. […] Sans adopter son systême, qui donneroit peut-être plus de ressort à l’imagination & aux vrais talens, les Orateurs Chrétiens doivent au moins en suivre les préceptes, & se garantir des défauts qu’il condamne.

350. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre X. Mme A. Craven »

C’est l’histoire d’une famille de chrétiens, charmants et sublimes tour à tour, comme le sont les âmes saintes, racontée par eux-mêmes encore plus que par Mme Craven, leur sœur et leur fille, qui n’a guère fait, elle, que de mettre en ordre leur correspondance et leurs mémoires. […] Et il en est de même pour le Mot de l’énigme, un autre livre de cette femme vouée à ces romans qu’on pourrait tout aussi bien imprimer chez Marne que chez Didier, et qui nous avait raconté une assez belle histoire pour se dispenser d’écrire des romans, lesquels, du reste, pâtiraient tous devant cette noble et magnifique histoire, l’épopée d’une famille chrétienne ! […] … Et d’ailleurs, puisque de sœur et de fille, enterrant pieusement les siens comme Antigone — une Antigone plus grande que l’autre, puisqu’elle est chrétienne — elle a voulu passer femme de lettres, elle a voulu se ravaler à la vie du bas-bleu, au travail et à l’ambition du bas-bleu, ce n’est pas le roman qu’elle aurait dû écrire ; ce n’est pas au roman qu’elle aurait dû se brûler les doigts.

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