A l’ordinaire, on faisait bon ménage ; on s’entendait au moins sur les négations, sur les haines, et Voltaire, mettant son esprit endiablé au service de la cause, avait dans tous les « frères » des prôneurs ardents de ses louanges ; il donnait de l’agrément à leurs idées, ils faisaient de la réclame à ses écrits. […] Le Sermon des Cinquante (1762) inaugure cette nouvelle manière : dans toute une suite d’ouvrages importants547, Voltaire ne met plus en cause les prêtres ou les croyants, mais la religion elle-même, la Bible, l’Evangile. […] En même temps il se chamaillait avec les ennemis qui poursuivaient Rousseau, le professeur Claparède, le pasteur Jacob Vernet, l’archevêque d’Auch Montillet : tant leurs causes étaient liées, indépendamment de leurs différends personnels. […] Il se fit le défenseur de toutes les causes justes, de tous les innocents que les institutions ou les hommes opprimaient.
Deux causes nous en dérobaient depuis longtemps la vue : l’ignorance qui avait perdu le sens de ses monuments, et la scolastique, qui obstruait de sa fausse science la source même de la vraie science, c’est-à-dire les livres où elle est consignée. […] La Renaissance et la Réforme ne furent d’abord qu’une seule et même cause, ayant pour ennemis tous ceux qu’offusquait cette double lumière. […] Par l’inégalité dernière de ces deux noms, presque aussi retentissants l’un que l’autre à cette époque, mesurez la justice des deux causes. […] Les lettres de Marguerite, presque toutes écrites à son frère, quoique d’un tour moins vif que ses contes, à cause des formes de respect qu’elle observe à l’égard du roi jusque dans les expressions du plus tendre attachement pour le frère, sont pleines de cette douceur de cette adresse, de cette insinuation qu’on admire dans les discours de dame Oysille.
Quoiqu’il n’entre pas dans mon sujet de faire connaître les causes qui opérèrent la révocation de l’édit de Nantes, ni de faire connaître la vie politique de madame de Maintenon, je veux indiquer au moins les autorités et les faits d’où il résulte que madame de Maintenon a été non seulement étrangère, mais aussi opposée qu’elle pouvait l’être à la persécution des protestants, et je crois pouvoir conclure, avec une pleine assurance, de tout ce qui précède, que la fortune de madame de Maintenon fut exclusivement le triomphe de ses charmes. […] Ils accusèrent les jansénistes de faire cause commune avec les protestants, et ceux-ci d’être des républicains, et de dangereux ennemis du pouvoir royal. […] Dès 1677, les remontrances de l’assemblée du clergé, ou les jésuites avaient de puissants amis, les sollicitations de la cour de Rome, provoquées par les intrigues de la société, les conseils du chancelier Le Tellier et du marquis de Louvois son fils, tous deux ennemis de Colbert, qui protégeait les protestants comme des sujets utiles, enfin l’intérêt particulier de Louvois, ministre de la guerre, qui était atterré, dit Saint-Simon, par le poids d’un armistice de vingt années, à peine commencées, et qui voulait rendre ses troupes nécessaires par la persécution des huguenots, (elles furent les causes des dragonnades de 1683 et 1684. […] Telle lui la cause de la révocation de l’édit de Nantes.
Avant de mourir, il s’était fait amener son jeune fils, le duc de Broglie actuel, âgé seulement de huit ans, et lui avait recommandé, malgré tout, de ne jamais déserter la cause de la liberté. […] Et lorsque, des hauteurs où cette pensée nous transporte, on abaisse ses regards sur l’état actuel de l’Europe, lorsque l’on songe que ce sont ces mêmes cabinets que nous avons vus pendant trente ans si complaisants envers tous les gouvernements nés de notre Révolution, qui ont successivement traité avec la Convention, recherché l’amitié du Directoire, brigué l’alliance du dévastateur du monde ; lorsque l’on songe que ce sont ces mêmes ministres que nous avons vus si empressés aux conférences d’Erfurt qui viennent maintenant, gravement, de leur souveraine science et pleine autorité, flétrir de noms injurieux la cause pour laquelle Hampden est mort au champ d’honneur et lord Russell sur l’échafaud, en vérité le sang monte au visage ; on est tenté de se demander : Qui sont-ils enfin, ceux qui prétendent détruire ainsi, d’un trait de plume, nos vieilles admirations, les enseignements donnés à notre jeunesse, et jusqu’aux notions du beau et du juste ? […] Le concert de l’opinion publique était rassurant alors : l’élite de la jeunesse semblait apporter chaque jour à ce qu’on appelait la bonne cause une force qui n’était pas dépourvue de prudence. […] Et en général, quel que soit le sujet qu’il traite, l’auteur remonte aux origines, aux causes ; il s’y complaît ; il reprend tout dès le principe, et il redescend de là jusqu’à l’extrême conclusion sans passer un seul anneau de la chaîne.
murs jadis glorieux, paraissez dans la cause de la nature même ! […] Mais le xviiie siècle, dans son ambition, ne se contente point de si peu ; Sieyès, dans un de ses rares moments d’épanchement, disait : « La politique est une science que je crois avoir achevée. » Et quant à la morale, plus d’un philosophe du temps eût été plus loin et eût dit : « Je crois l’avoir à la fois achevée et inventée. » Piqué par les reproches du Génie et enhardi par sa présence, le voyageur s’ouvre donc à lui ; il veut savoir « par quels mobiles s’élèvent et s’abaissent les empires ; de quelles causes naissent la prospérité et les malheurs des nations ; sur quels principes enfin doivent s’établir la paix des sociétés et le bonheur des hommes. » Ici les ruines de Palmyre s’oublient : le Génie enlève le voyageur dans les airs, lui montre la terre sous ses pieds, lui déroule l’immensité des lieux et des temps, et commence à sa manière toute une histoire de l’humanité et du principe des choses, de l’origine des sociétés, le tout sous forme abstraite et en style analytique, avec un mélange de versets dans le genre du Coran. […] Mais ce qui a donné à ce livre, qui n’est aujourd’hui qu’ennuyeux, sa réputation et son attrait auprès de quelques esprits, ce sont les derniers chapitres où, dans une assemblée générale des peuples, s’agite et se plaide contradictoirement la cause des diverses croyances religieuses. […] D’ailleurs, il n’a aucun goût sensible pour les écrivains éloquents ou les poètes ; il cite une fois, sur « la crainte qui serait la cause première des religions (Primus in orbe Deos, etc.) », un mot de Pétrone ou de Stace, qu’il attribue par mégarde à Lucrèce : jamais il ne lui arrive de citer Virgile, Horace, un vers d’Homère, ce qui fait la douceur habituelle de ceux qui ont pratiqué ces sentiers de l’Antiquité ; il ne fleurit jamais son chemin d’un souvenir : avec des connaissances si approfondies et si particulières, il n’a pas plus la religion de la Grèce que celle de Sion.