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307. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Selon nous, qui voulons rester juste, même envers Gœthe, l’histoire méprisée lui a porté plus de bonheur dans Egmont que dans Berlichingen. […] Chose singulière, Gœthe, cet homme qui tenait tant à sa place au soleil et qui l’a eue si belle, cet égoïste qui s’est mis à côté de chaque événement pour ne pas troubler son bonheur, cet arrangeur de toutes choses, depuis ses Poésies sans élan jusqu’à sa maison et ses bibelots, avait la philosophie des fakirs, mais sans en avoir le mysticisme. […] Méthode de bonheur qu’il n’a pas eu beaucoup de peine à s’appliquer, — lui, le Pangloss, car il est Pangloss, que les circonstances ont dorloté depuis sa naissance jusqu’à sa mort, — mais qu’il appliquait à ses amis et connaissances. […] Le seul chagrin de la vie de Gœthe, de cet insolent de bonheur, de ce Nabuchodonosor qui resta sur pied et à qui Dieu n’a pas fait manger l’herbe à laquelle il avait droit, a été le peu de succès de sa Critique de Newton et le mépris dans lequel elle est tombée. […] Du reste, cette Capoue d’un bonheur permanent dans laquelle il passa ses jours, et qui, vu sa froideur, l’a durci plus que corrompu, cette Capoue était, de splendeur extérieure, proportionnée aux exigences de son âme.

308. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Un cas de pédanterie. (Se rapporte à l’article Vaugelas, page 394). »

Elle lui donna successivement deux filles, mortes trop tôt pour le bonheur de tous deux. Son dernier bonheur à lui s’éteignit avec l’épouse à jamais regrettée, dont les restes sont ensevelis ici.

309. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Poésie — I. Hymnes sacrées par Édouard Turquety. »

je courus alors : j’étais plein de bonheur, Car j’avais bien souffert de l’ardente chaleur,    Et ma lèvre était tout en flamme. […] J’en citerai une fort belle, traduite avec un grand bonheur par le prince Mestscherski.

310. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — V »

Leur fanatisme est de même ordre ; car ils croient l’un et l’autre qu’il existe une vérité objective, propre, à l’exclusion de toute autre conception, à assurer le bonheur humain. […] Nécessité, dit encore Nietzsche, nécessité, pour tout ce qui vit « d’obéir longtemps et dans une même direction. »21 L’opportunité et le bonheur du choix entre plusieurs vérités, cette question de convenance qui a pourtant une importance considérable, de ce fait qu’une réalité quelconque est toujours entourée de réalités voisines avec lesquelles il lui faut compter, cette question de convenance ne vient pourtant qu’après l’autre, la question d’autorité qui assure la durée.

311. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre III. Paradis perdu. »

Qu’on nous permette de penser qu’il y a quelque chose de plus intéressant, de plus grave, de plus semblable à la condition humaine, dans un poème qui aboutit à l’infortune, que dans celui qui se termine au bonheur. […] Cependant la faute est connue au ciel, une sainte tristesse saisit les anges ; mais that sadness mixt with pity, did not alter their bliss ; « cette tristesse, mêlée à la pitié, n’altéra point leur bonheur » ; mot chrétien et d’une tendresse sublime.

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