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685. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

La littérature et la science La littérature et la science poursuivent deux buts différents : l’une cherche à plaire, l’autre à instruire ; l’une vise à la beauté, l’autre à la vérité. […] Dans les périodes réalistes, la science, qui constate, accumule et ordonne des faits réels, triomphe et fait invasion sur le territoire de sa voisine ; dans les périodes idéalistes, la littérature, qui ne peut créer la beauté sans avoir devant les yeux un idéal, prend sa revanche et ressaisit une partie du terrain conquis. […] C’est de savoir se subordonner à celle qu’elle veut aider ; c’est de ne pas satisfaire, aux dépens de la vérité, sa prédilection pour la beauté ! […] L’appréciation des œuvres littéraires ou artistiques, qui est affaire de goût personnel, varie et ne peut cesser de varier d’un individu à un autre ; mais ce qui est affaire de science, pure question de fait, je veux dire l’analyse des caractères qui distinguent un ouvrage, le relevé des rapports qui l’unissent aux choses du même temps, voire même la connaissance des causes qui font varier d’une époque à l’autre le genre de beauté à la mode, tout cela s’élève lentement au-dessus de la discussion. […] Quand la littérature en est là, elle revient brusquement à l’idéal, à la passion, à l’amour ardent de la vie et de la beauté, et la science fait, non pas banqueroute, comme le croient et le crient les gens à courte vue, mais une retraite momentanée hors des territoires usurpés où elle prétendait commander.

686. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

La beauté qui hait le mouvement, ses larges yeux aux clartés éternelles, appartiennent au même ordre que la froide majesté de la femme stérile. […] En poésie comme en beauté féminine la perfection n’est rien sans l’« agrément ». […] Il est fait même, parfois de la défaillance, qui devient une beauté, ou qui contribue à la beauté, de la dissonance qui sur tant de faiblesses, d’impropriétés et de chevilles, suscite la pureté ou creuse les profondeurs de vers qui s’élargissent et palpitent comme des yeux infinis sur ces membres débiles et sur cette chair impuissante. […] On dirait que la scène est prise à contresens, qu’elle est mélodramatique, sans gravité, sans majesté, sans beauté, sans rien d’auguste, presque théâtrale. […] Et pourtant, de ce qui est sorti de cette maison de Genève, c’est l’œuvre d’Amiel seule qui aujourd’hui vit, agit, apporte un bienfait, de la beauté, de l’âme.

687. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Tout leur être et toute leur beauté consistent dans l’accord de leurs parties : renverser cet accord, c’est abolir leur être et leur beauté. […] Dryden veut mettre dans son théâtre les beautés de la tragédie française, et d’abord la noblesse des sentiments ; Est-ce assez de copier, comme il fait, des phrases chevaleresques ? […] Vous devinez quelle peut être la beauté dans une pareille œuvre. […] Alexandre est sur son trône dans le palais de Persépolis ; à côté de lui Thaïs florissante de beauté ; devant lui, dans l’immense salle, tous ses glorieux capitaines. […] Puis un chant tendre l’amollit : Timothée célèbre l’amour et la rayonnante beauté de Thaïs.

688. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

. —  Peinture de la beauté et du bonheur sensible. —  Haydée. […] Comme les bras se tendent alors vers la beauté idéale, et comme ils retombent impuissants au contact de notre fange et de notre immortalité ! […] Partout où est la vie, même bestiale ou maniaque, est la beauté. […] La beauté est venue, la beauté méridionale, éclatante et harmonieuse, épanchée sur toutes choses, sur le ciel lumineux, sur les paysages calmes, sur la nudité des corps, sur la naïveté des cœurs. […] Est-ce que les convenances peuvent empêcher la beauté d’être belle ?

689. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

La beauté de sa femme est une gloire, un triomphe de tous les instants. […] Quelle puissance protège donc sa beauté contre l’amour de Raphaël ? […] Pourquoi donc refuse-t-elle à Raphaël le don de sa beauté ? […] Ou je m’abuse singulièrement, ou la plupart des lecteurs éprouveront la même impression que moi : les louanges sans nombre que M. de Lamartine donne à la beauté de sa mère, à la beauté de ses sœurs, à sa beauté personnelle, loin d’éveiller la sympathie, répandent sur toutes ses paroles une singulière monotonie. […] La beauté même d’une jeune fille ne résisterait pas à cette manie de procès-verbal.

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