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1061. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Mais toute pièce à la fois très belle et très nouvelle ne peut pas plaire à la foule en sa nouveauté. […] Entra l’on ne voit rien de si beau sous le ciel. […] Et d’où cette belle science enfin peut-elle être venue aux hommes ? […] Corneille dit par toutes ses pièces ou par la plupart ou par les plus belles : « Il n’y a de beau que de vivre dangereusement et il n’y a de beau que d’agir contrai-renient à ses intérêts. » Molière dit : « Il faut vivre prudemment et conformément à ses intérêts bien entendus. […] Il l’accuse d’ignorance, de mauvais goût et d’indifférence à l’égard de la belle littérature.

1062. (1900) La culture des idées

Le beau, c’est ce qui est à sa place. […] Leur civilisation donne le spectacle et l’idée d’une belle animalité sociale. […] Elle guérit même la vague inquiétude spirituelle des âmes simples ; et cela est très beau. […] On écrira là-dessus des choses très belles et très inutiles quand les Barbares auront incendié Paris. […] Mais la complainte a eu sa belle période.

1063. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Quatre moments religieux au XIXe siècle. »

Rousseau est meilleur que Voltaire ; il a le sentiment de ce qui est beau et généreux et ne méprise pas son lecteur. […] Il est vrai que ce n’est pas un beau thème à l’éloquence : cela se débite en chambre, non en chaire ; à quelques-uns et à demi-voix, non à une foule assemblée. Les beaux thèmes ! […] Je n’entends rien à ces magies-là, ou plutôt j’appelle cela des magies et de belles impostures, comme elles le sont en effet. […] Se rappeler aussi, dans la Lettre de Chateaubriand à M. de Fontanes sur la Campagne romaine, le beau passage : Aujourd’hui je m’aperçois que je suis beaucoup moins sensible à ces charmes de la nature, etc.

1064. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

Le genre donné, son ode est belle et devra tenir sa place, dans les cours de littérature, parmi les hymnes ou sonates sacrées : La foudre t’obéit comme un coursier docile ; Tu sais où va l’orage, et d’où vient l’aquilon ; Ton regard a scruté le granit et l’argile Jusque dans leur dernier filon. […] Ce sont de beaux accents, dignes des Harmonies de Lamartine, avec je ne sais quelle saveur plus pénétrante et plus âcre. […] Ce qui est beau, ce qui est vraiment élevé, ce qui vient du cœur et non de la tête, c’est le sentiment qui, après tant de misères et d’affronts, l’oblige non à maudire, mais à bénir ses persécuteurs, à leur pardonner. […] Il est beau ce spectacle ; eh bien ! […] Après cette suite de beaux vers, d’un souffle élevé et juste, notre estime, celle de tous les lecteurs, est acquise au jeune poëte.

1065. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre premier. La critique et la vie littéraire » pp. 1-18

Les matins ou les nuits que j’ai goûté pour la première fois aux Dialogues philosophiques, à la Cousine Bette, à la Chartreuse, à Bouvard et Pécuchet, à En ménage, à Une belle journée, à Sous l’œil des barbares, à L’Écornifleur me demeurent d’émotion inoubliable au point que je pourrais dire maintenant s’il pleuvait ces jours-là ou quel temps il faisait. […] J’y consens, les digressions, les rêveries que suggèrent les œuvres belles peuvent revêtir un charme infini elles ne sont que le délassement du critique, son dessert. […] Il y a une beauté dans L’Assommoir et dans La Belle Hélène aussi bien que dans le Phédon et dans Cymbeline. […] S’il y a, dans un ouvrage, dans un caractère, dans un tableau, dans une statue, un bel endroit, c’est là que mes yeux s’arrêtent ; je ne vois que cela ; le reste est presque oublié. » Qu’est-ce à dire ? […] L’auteur de Michel Teissier, que j’ai nommé sans complaisance, doit me traiter de crapule ou de girouette quand je m’exalte sur Paul Adam : c’est qu’il ne sent pas la différence d’un conteur passable à un bel écrivain.

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