/ 2911
1746. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

Wollaston lui-même a prévue ; car, dès qu’un nouvel insecte arriva dans l’île, la tendance de la sélection naturelle à agrandir ou à diminuer ses ailes dut dépendre de ce qu’un plus grand nombre d’individus furent sauvés en luttant avec succès contre le vent, ou en renonçant à toute tentative de résistance contre lui, c’est-à-dire en ne volant plus ou en ne volant que rarement. […] Je crois aussi pouvoir inférer d’une observation du professeur Owen, au sujet de la longueur des bras de l’Orang-Outang, que ce naturaliste est arrivé à des conclusions analogues. […] Conséquemment, lorsqu’un organe, quelque anormal qu’il puisse être, s’est transmis à peu près sans changements à un grand nombre de descendants modifiés, comme c’est le cas pour l’aile de la Chauve-Souris, d’après ma théorie, c’est qu’il doit avoir existé presque dans ce même état pendant une période immense, et qu’il est arrivé ainsi à n’être pas plus variable que tous les autres. […] D’autre part, les points de dissemblance qui distinguent les unes des autres les espèces du même genre constituent leurs caractères spécifiques ; et comme ces caractères, dits spécifiques, ont varié et sont arrivés successivement à différer plus ou moins depuis l’époque où ces diverses espèces se sont séparées de leur progéniteur commun, il est probable qu’ils doivent encore être en quelque mesure variables, ou du moins plus variables que les parties de l’organisation qui, pendant une longue période, sont demeurés constants. […] Les caractères spécifiques, c’est-à-dire les caractères qui sont arrivés à différer depuis que les diverses espèces d’un même genre se sont séparées de leur souche commune, sont plus variables que les caractères génériques, c’est-à-dire que ceux qui se sont transmis pendant longtemps et qui n’ont pas varié depuis cette même époque.

1747. (1753) Essai sur la société des gens de lettres et des grands

Pour répond re à cette objection, je remarque que parmi les gens de lettres qui courent une même carrière, comme il est différents degrés de talents, il est aussi différentes classes ; ces classes sont d’elles-mêmes assez marquées, et les gens de lettres par une espèce de convention tacite les forment presque sans le vouloir : chacun, je l’avoue, cherche à se mettre dans la classe la plus élevée qu’il lui est possible ; mais il n’est pas à craindre que les rangs soient trop bouleversés par cette prétention ; car la vanité n’est aveugle que jusqu’à un certain degré ; il arrivera seulement de là qu’il y aura moins de classes, jamais qu’elles se confondent en une seule : celui surtout qui aspirerait à la monarchie universelle et perpétuelle, quand même il en serait digne, courrait risque de trouver bien des rebelles ; l’anarchie qui détruit les États politiques, soutient au contraire et fait subsister la république des lettres ; à la rigueur on y souffre quelques magistrats, mais on ne veut point de rois. […] Tel milord arrive ici avec une réputation très méritée, qui ne paraît dans la conversation qu’un homme assez ordinaire ; c’est qu’on peut être un grand homme d’État, traiter éloquemment en sa propre langue dans les assemblées de sa nation des matières importantes qu’on a étudiées toute sa vie, et balbutier dans une langue étrangère parmi des sociétés dont on ne connaît ni les usages, ni les intérêts, ni les ridicules, ni la frivolité. […] C’est là sans doute faire prendre le grand tour à la renommée ; mais le chemin le plus long est en ce cas le moins orageux, et pourvu que la renommée arrive enfin, on se résout à prendre patience. […] On arrive à ce vaste temple par une forêt immense, une espèce de labyrinthe semé de petits sentiers tortueux et fort étroits, où deux voyageurs ne peuvent se rencontrer sans que l’un des deux renverse l’autre. […] C’est en faisant un long et heureux usage de cet esprit si commun, que des hommes sans mérite et sans nom peuvent arriver à la plus grande fortune et aux plus brillants emplois.

1748. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Granier de Cassagnac » pp. 277-345

On vient, en suivant l’historien, de parcourir tant de misères, de sottises et de fétidités, qu’on a hâte d’en finir, — qu’on a hâte de voir enfin ce gouvernement d’infamie entièrement écrasé, entre la roue de la charrette révolutionnaire qui s’en va et celle du char de la Gloire militaire qui arrive ! […] En effet, — et nous insistons sur ce point, parce qu’il a des conséquences de vérité inattendue pour l’histoire qui nous semblent plus importantes à reconnaître que le mérite de Cassagnac, — ce qui distingue et classera véritablement à part le nouvel ouvrage de l’éminent écrivain, c’est ce qui avait tant frappé d’abord dans l’Histoire des causes de la Révolution française : la faculté d’écarter tous les attirails, tous les oripeaux, toutes les mises en scène des partis, pour arriver jusqu’à l’homme exagéré ou menti, jusqu’à l’intrus dans la gloire ou le respect des hommes, — et l’en arracher ! […] L’historien des Classes nobles eut ses jours de thèse et de systèmes, et ces jours-là furent brillants ; mais, quels qu’eussent été le mouvement et la fécondité d’un esprit qu’il voulait, comme de très grandes intelligences l’ont voulu, trouver les moules de ses idées dans l’histoire, ce n’est pas cependant par cette manière de la comprendre et de l’écrire qu’il fût arrivé à l’emploi juste et vrai de ses facultés. […] est arrivé triomphalement, quoique lentement ; car je suis convaincu qu’il est dans le vrai, et pour une raison plus puissante que toutes les preuves et contre-épreuves philologiques qu’il nous donne : selon moi, il a pour lui le bon sens, ce maître des affaires et des livres ! […] Si l’entraînement vers la philologie était, en Cassagnac, une ambition, au lieu d’être un amour, je lui dirais, pour l’en guérir, qu’on n’arrive pas aux Instituts en leur prouvant qu’ils sont des imbéciles.

1749. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

D’attendrissement en attendrissement, vous la pouvez conduire jusqu’aux larmes : mais si vous tardez trop à exciter les premieres émotions, vous n’aurez peut-être pas le tems d’arriver aux grands effets. […] Il nous arrive dans la passion de laisser échaper quelques paroles que nous n’adressons qu’à nous-mêmes : c’est encore de n’y point admettre les raisonnemens, ni à plus forte raison les récits. […] Il en arrive que vous réfutez tout ce que je n’ai pas dit, et que vous ne répondez presque pas un mot à ce que j’ai dit ; méprise qui vous divertiroit vous-même, si vous la pouviez voir d’un oeil indifférent. […] Dans la nature, il n’est jamais arrivé qu’une action aussi étenduë que celle de nos tragédies, se soit passée dans le même lieu. […] Je dirai plus : il faut se défier, si j’ose parler ainsi, de cet orgüeil de profession : il peut nous jetter dans le mépris de bien des choses qui valent souvent mieux que celles que nous faisons ; et c’est ce qui arrive dans le bourgeois gentilhomme au maître à danser et au maître de musique.

1750. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Ici-bas, le mieux ne se rencontre jamais ; le pire seul arrive. […] Il lui arrive de découvrir ainsi un certain nombre de vérités courantes. […] Ses personnages lui ressemblent : ils n’arrivent point à se dégager de l’absolu. […] Critiques tous les deux, en même temps que romanciers, il est arrivé que nul n’a mieux parlé de M.  […] Il arrive ainsi que des romanciers bien doués, ayant, comme M. 

/ 2911