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647. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

la tragédie de Racine enseigne aux plus grands seigneurs de cette monarchie, les timidités, les sciences, les élégances, les politesses de l’amour, et voici ce damné Don Juan qui mène, tambour battant et haut la main, les duchesses et les bergères ! […] Ce singe effronté et malin inventait la musique du grand siècle, comme Racine a inventé la tragédie. […] » Et cette folle, qu’on fait parler ainsi trois pages durant, c’est madame de Montespan, cette superbe dont parle Racine dans Esther, et dont l’orgueil humilia même l’orgueil de Louis XIV ! […] Bulwer eût seulement lu une seule des tragédies de Racine, il eût appris comment pleuraient, comment s’enveloppaient dans leur chaste douleur, comment mouraient les femmes de Louis XIV ; il se fût dit que toutes les femmes de Racine étaient faites à l’image de mademoiselle de La Vallière et de quelques âmes d’élite qui ont honoré ce siècle, afin que rien ne manquât à sa beauté, comme rien ne manque à son génie ; il eût respecté à la fois Louis XIV et mademoiselle de La Vallière, et comme tout respect bien placé porte sa récompense, M. 

648. (1914) Une année de critique

C’est que Racine ne donne pas avec ostentation Phèdre comme modèle aux femmes de quarante ans ni Néron comme exemple aux souverains. […] Ainsi, pourquoi faire appel à la Fatalité, à cette farouche divinité qui anime l’œuvre des Sophocle, des Shakespeare et des Racine, pour expliquer les déportements d’une gamine dévergondée ? […] Elle n’a pas de prolongement en nous ; elle ne réalise pas ce merveilleux équilibre de précision psychologique et d’harmonie indéfinissable qui constitue l’art suprême, l’art de Racine. […] De la poétique de Racine, rien ne pouvait sortir et rien n’est sorti. Racine est le marbre parfait et stérile.

649. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LONGUEVILLE » pp. 322-357

On voit dans les fragments (à la suite de l’Histoire de Port-Royal, par Racine) que Nicole était plus au goût de Mme de Longueville qu’Arnauld, comme plus poli en effet, plus attentif. […] On voit par un petit fragment qui suit l’Abrégé de Racine, et qu’il n’a pas eu le temps de fondre, de dissimuler dans son récit, que si Mme de Longueville avait gardé jusqu’aux dernières années la grâce, la finesse, et comme dit Bossuet de ces personnes revenues du monde, l’insinuation dans les entretiens, elle avait gardé aussi les prompts chatouillements, les dégoûts, les excès d’ombrage : « elle étoit quelquefois jalouse de Mlle de Vertus, qui étoit plus égale et plus attirante. » Enfin, pourquoi s’étonner ?

650. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Son génie est un génie mâle, — car le génie a un sexe : Raphaël est un génie féminin, ainsi que Racine ; Corneille est un génie mâle. — Nul ne se rapproche davantage de la grandeur sauvage d’ […] Victor Hugo n’est-il pas aussi grand homme que Racine, Calderon, Lope de Vega et tant d’autres admirés depuis longtemps ?

651. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Que chercheront Pascal, La Rochefoucauld, Bossuet, Bourdaloue, La Bruyère, Fénelon ; et, dans la poésie, Racine, Molière, La Fontaine, Boileau, sinon, dans les genres les plus divers, des parties de la vérité universelle ? […] Racine en avait recueilli et comme respiré la tradition vivante dans son commerce avec Port-Royal ; et si ses personnages raisonnent moins et pensent plus que ceux de Corneille, j’y vois un fruit de cette doctrine qui avait changé la définition de la logique, et remplacé l’art de raisonner par l’art de penser.

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