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218. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Première partie. Écoles et manifestes » pp. 13-41

Ce genre un peu spécial de classicisme qui n’est ni celui de Bossuet, ni celui de Racine, ni celui de Fromentin, a son origine dans l’œuvre du plus grand poète européen : Frédéric Mistral. […] « Croire qu’en imitant certaines qualités de pureté, de sobriété, de correction et d’élégance, indépendamment du caractère même et de la flamme, on deviendra classique, c’est croire qu’après Racine père, il y a lieu à des Racine fils, rôle estimable et triste, ce qui est le pire en poésie. […] Bien avant Boileau, même avant Racine, ne sont-ils pas aujourd’hui unanimement reconnus les plus féconds et les plus riches pour les traits d’une morale universelle ? 

219. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Post-scriptum sur Alfred de Vigny. (Se rapporte à l’article précédent, pages 398-451.) »

Je suis presque avec vous tous, bientôt j’y serai mieux encore. » Et il m’écrivait le 7 mai 1829 : « Adieu, mon ami, si vous n’avez pas embrassé mon Victor sur les deux joues, j’irai vous chercher querelle. » Je n’ai nullement dessein de publier les lettres de M. de Vigny toutes remplies de compliments et d’éloges pour moi : mais, puisqu’il niait en 4 835 le droit et la légitimité de ma méthode critique, je me contenterai de lui opposer ce passage d’une de ses lettres, du 29 décembre  1829 (je venais d’écrire dans la Revue de Paris un premier article sur Racine) : « Je suis distrait, et outre cela il m’arrive presque toujours d’être en présence de mes amis ce qu’est un amant devant sa maîtresse, si aise de la voir qu’il oublie tout ce qu’il avait à lui dire. Je ris encore en pensant que j’ai passé, il y a quelque temps, deux heures avec vous sans vous rien dire de votre bel article sur Racine, et je venais d’en parler toute la matinée à quatre personnes de différentes opinions, à qui je disais ce que j’en pense.

220. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 40, si le pouvoir de la peinture sur les hommes est plus grand que le pouvoir de la poësie » pp. 393-405

La tragédie de Racine met sous nos yeux plusieurs instans de cette action, et ces differens incidens se rendent réciproquement les uns les autres plus pathétiques. […] Racine pour nous faire frémir d’horreur lors qu’Iphigenie sera conduite à l’autel fatal, nous la peint vertueuse, aimable et chérie d’un amant qu’elle aime.

221. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Et que nous a-t-on donné en échange de ces plumes d’aigle retranchées à Corneille et à Racine ? […] , comme plus tard on lapidera Racine avec Corneille, Voltaire avec Racine, comme on lapide aujourd’hui tout ce qui s’élève avec Corneille, Racine et Voltaire. […] Racine éprouva les mêmes dégoûts, sans faire d’ailleurs la même résistance. […] Il est le père (lui, et non Racine, grand Dieu !) […] Pour se convaincre du peu d’obstacles que la nature de notre poésie oppose à la libre expression de tout ce qui est vrai, ce n’est peut-être pas dans Racine qu’il faut étudier notre vers, mais souvent dans Corneille, toujours dans Molière, Racine, divin poëte, est élégiaque, lyrique, épique ; Molière est dramatique.

222. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Tout ce que l’on pouvait faire alors pour préparer la tragédie de Corneille ou de Racine même, il l’aurait fait. […] Et, à la vérité, il n’a pas tout à fait réussi, en ce sens que longtemps, jusqu’à Racine même, la tragédie française est demeurée trop oratoire encore. […] Racine seul, au xviie  siècle, saura peindre et représenter comme d’Urfé les passions de l’amour. […] Je ne connais qu’un style, à cet égard, qui soit comparable à celui de Pascal ; et il est aussi de Port-Royal, puisque c’est celui de Racine. […] Mais le génie de Racine, une partie au moins du génie de Racine, et quelques-unes des différences qui distinguent si profondément sa tragédie — et la conception du monde et de la vie qu’elle enveloppe, ou dont elle procède — de celle de Corneille, ne peuvent s’expliquer que par ses origines et son éducation jansénistes.

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