L’œuvre, on ne la considère alors que comme le produit plus ou moins passif de ces deux forces également inconscientes au fond : le tempérament de l’écrivain et le milieu où il se développe. […] Pour qui serait également capable de faire œuvre personnelle en éclairant une qualité ou un vice, lequel vaudrait-il mieux mettre en lumière ?
Il se dit d’un autre côté que, s’il était nécessaire qu’on vît la servitude se traîner sous les pieds des burgraves, il était nécessaire aussi qu’on vît la souveraineté éclater au-dessus d’eux ; il se dit qu’il fallait qu’au milieu de ces princes bandits un empereur apparût ; que dans une œuvre de ce genre, si le poète avait le droit, pour peindre l’époque, d’emprunter à l’histoire ce qu’elle enseigne, il avait également le droit d’employer, pour faire mouvoir ses personnages, ce que la légende autorise ; qu’il serait beau peut-être de réveiller pour un moment et de faire sortir des profondeurs mystérieuses où il est enseveli le glorieux messie militaire que l’Allemagne attend encore, le dormeur impérial de Kaiserslautern, et de jeter, terrible et foudroyant, au milieu des géants du Rhin, le Jupiter du douzième siècle, Frédéric Barberousse. […] Ainsi, toute proportion gardée, et en supposant qu’il soit permis de comparer ce qui est petit à ce qui est grand, si Eschyle, en racontant la chute des titans, faisait jadis pour la Grèce une œuvre nationale, le poëte qui raconte la lutte des burgraves fait aujourd’hui pour l’Europe une œuvre également nationale, dans le même sens et avec la même signification.
Il y consentit, mais à cette condition que Ménage ôteroit également de sa réponse les personnalités dont elle étoit remplie. […] Il dit que mademoiselle de Scudéri, lorsqu’ils étoient liés, lui avoit communiqué sa carte de Tendre ; & que, se trouvant en train de confidence, il lui avoit également fait celle qu’il avoit autrefois composé quelque chose sur un sujet semblable ; mais que l’habit d’ecclésiastique qu’il portoit l’empêchoit de laisser paroître cette bagatelle.
Ils ont eu raison d’introduire cette regle : car il est également messeant de commencer à gesticuler avant que d’avoir ouvert la bouche, et de continuer à gesticuler après avoir cessé de parler. […] Mais nos artisans ont cru qu’il falloit à quelque prix que ce fut, prescrire une methode qui reglât la mesure du geste, qui déplaît également, soit qu’il soit trop lent, soit qu’il soit trop précipité, et le principe qu’ils ont établi est ce qu’ils ont pu imaginer de mieux. " j’ai traduit le mot d’ artifices dont se sert ici Quintilien par ceux qui font profession de composer la déclamation des pieces de théatre, et de les faire representer sur la scene, fondé sur deux raisons.
Ni Aubrey, le premier historien de Shakespeare, qui écrivait cinquante ans après la mort de ce grand homme, compris par le public de son temps avec la finesse et la sûreté d’appréciation ordinaires à toutes les foules et à tous les publics ; ni Nathan Drake, qui a fait un livre énorme sur Shakespeare qu’il appelle Shakespeare et son temps (Shakespeare and His Time), un titre, je crois, de la connaissance de Guizot ; ni Guizot enfin, lequel pourtant, je m’imagine, ne doit pas être l’ennemi complet du représentatif dans l’humanité, n’ont pensé comme Emerson et, comme lui, fait également bon marché de la prodigieuse originalité du génie de Shakespeare et de la vie privée de cet homme phénoménal, — à lui seul tout un monde perdu, qui attend encore son Cuvier ! […] Le poète le plus écarlate de la sonorité et de la couleur est trop exclusivement extérieur pour parler profondément de ce Shakespeare, qui surplombe, lui, également les deux mondes, le monde visible et l’invisible.