Richelieu, dans sa première forme, était plus particulièrement un négociateur ; en arrivant au pouvoir et en se saisissant de l’autorité, il ne l’exerce qu’à condition de la justifier, de la motiver, et il est proprement l’idéal du conseiller d’État. […] Ce rôle de l’homme d’État, qui, à chaque moment social, est le principal et le plus actuel, n’est pas le seul, et deux forces en lutte gouvernent le monde. […] À une lecture superficielle, le Testament politique peut sembler procéder d’abord par maximes un peu banales et par lieux communs : mais lisez bien, vous retrouverez toujours l’homme d’État et le moraliste expérimenté. […] La présomption est un des grands vices qu’un homme puisse avoir dans les charges publiques, et, si l’humilité n’est requise dans ceux qui sont destinés à la conduite des États, la modestie leur est tout à fait nécessaire. […] il ne le croyait certes pas lorsqu’il a écrit : « Ceux qui sont vindicatifs de leur nature, qui suivent plutôt leurs passions que la raison, ne peuvent être estimés avoir la probité requise au maniement de l’État.
Le duc de Parme, dans une lettre qui fut interceptée comme les précédentes, rend à Mayenne et à son conseiller ce témoignage involontaire, qu’ils veulent avant tout conserver l’intégrité de l’État. […] Un autre moment décisif, une détermination dans laquelle le président eut positivement la plus directe influence, ce fut le choix qu’on fit de Paris plutôt que de toute autre ville, pour la tenue des États généraux de 1593. […] Choisir Paris pour le lieu de la tenue des États était donc un coup de maître ; c’était choisir un milieu relativement modéré, empêcher l’assemblée de se trop émanciper si elle en avait envie, et si elle était tentée de faire une royauté irréconciliable et non nationale ; c’était empêcher une armée étrangère de s’emparer du lieu où les États siégeaient et de les tenir en sujétion ; c’était à la fois brider Paris, en y étant présent, et pouvoir aviser à tout. […] Éclairés comme nous le sommes aujourd’hui par les divers accidents et régimes que nous avons traversés, j’avoue que je goûte ses Mémoires d’État, si peu agréables qu’ils soient au point de vue littéraire ; je me contente d’y trouver des maximes de grand sens. […] Il y a dans le président pendant la Ligue deux hommes en quelque sorte : d’une part, le conseiller politique, l’homme sage et patriote qui cherche le salut général et la pacification de l’État ; et de l’autre il y a l’ami, l’intime du duc de Mayenne, « celui qui connaît le mieux l’intérieur de son cœur ».
Ces hommes d’État, si sûrs de leur fait, se sont trouvés des enfants. […] Il n’y a pas d’exemple dans l’histoire d’un État unitaire et centralisé décrétant son morcellement. […] Ce qu’il faut désirer, c’est une réforme libérale du catholicisme, sans intervention de l’État. […] Dans ce système, l’individu, très peu protège par l’État, aussi très peu gêne par l’État. […] L’individu, dans ce système, donne énormément à l’État ; il reçoit en échange de l’État une forte culture intellectuelle et morale, ainsi que la joie de participer à une grande œuvre.
Je fonde mon État sur une unité vraie et une continuité réelle. […] Vous faites naître l’État tous les dix ans. […] Ils sont dans le secret de l’État. […] Les privilèges sont des États dans l’État, et les libertés individuelles sont des sécessions : autant de crimes sociaux. […] L’État s’arrête où la conscience commence ; l’État ne peut me commander ce que ma conscience m’interdit.
On examine si la justice, vertu de l’individu, n’est pas logiquement aussi vertu de l’État. « Qui est-ce qui a donné naissance aux États ? […] Il veut que les gardiens de l’État et les guerriers ne possèdent rien en propre, comme dans nos ordres monastiques du moyen âge. […] Ainsi, dans un État, comme dans un particulier, ce qui doit succéder à l’excès de liberté, c’est l’excès de servitude. […] » « La République de Platon, dit plus bas le philosophe français, est la conception d’un État fondé exclusivement sur la vertu !